Eglises d'Asie – Inde
Des groupes chrétiens et des partis politiques demandent l’interdiction des organisations hindouistes
Publié le 18/03/2010
Le 11 septembre à New Delhi, des appels ont été lancés en ce sens par le Conseil chrétien pan-indien, le Forum social chrétien ou bien encore le Parti du pouvoir populaire (Lok Janashakti Party), d’obédience communiste. Tous demandent l’interdiction du Bajrang Dal et du Vishwa Hindu Parishad (VHP, Conseil mondial hindou), deux des principales organisations de la galaxie hindouiste qui gravitent autour du Bharatiya Janata Party (BJP, le Parti du peuple indien), vitrine politique des extrémistes hindous.
En Orissa, la situation tend à revenir à la normale, affirment les autorités, mais divers témoignages font état de pressions et d’un climat de terreur dans les camps de personnes déplacées. Le 13 septembre au soir, dans le district de Kandhamal, des forces paramilitaires ont eu un accrochage avec une cinquantaine d’hindous qui avaient tenté d’attaquer une église et la maison d’un chrétien. Les émeutiers ont ouvert le feu sur les soldats, dont l’un a été blessé. Les paramilitaires ont riposté, tuant deux hindous et faisant onze blessés, a déclaré le chef de la police de l’Orissa, dont les propos sont rapportés par l’AFP (1). Le 6 septembre, le VHP défiait un ordre du gouvernement interdisant toute manifestation en mémoire du religieux hindou assassiné le 23 août, acte qui a déclenché la vague de violences antichrétiennes de ces derniers jours. Selon les médias locaux, des religieux hindous ont promis d’éradiquer toute présence chrétienne dans le district de Kandhamal ; dans les villages, des milices seront mises sur pied pour « s’opposer à toute conversion d’hindous au christianisme ».
Par ailleurs, des attaques antichrétiennes ont été signalées dans différents Etats de l’Union. Le 7 septembre, au Karnataka, des hindouistes s’en sont pris aux fidèles d’un temple protestant, sans faire de victimes. Deux jours plus tard, le BJP fêtait les cent jours marquant son accession au pouvoir de cet Etat du sud-ouest de l’Inde. Ce même 7 septembre, un temple protestant, construit par les Britanniques en 1922, était détruit par le feu à Ratlam, au Madhya Pradesh, un Etat du centre du pays tenu par le BJP depuis 2003. D’autres attaques enfin ont été rapportées au Chhattisgarh (centre de l’Inde), au Gujarat et au Rajasthan (ouest de l’Inde), trois Etats où le BJP est au pouvoir (2). Dimanche 14 septembre, au Karnataka, des hindouistes se sont livrés à de nouvelles manifestations de force : une quinzaine d’églises, catholiques et protestantes, ont été saccagées, des tabernacles profanés ; des fidèles et des pasteurs ont été blessés. Le district le plus touché, celui de Dakshina Kannada, est l’un des bastions du diocèse catholique de Mangalore. Presque partout, la police a adopté une attitude neutre, sinon hostile, aux chrétiens, laissant faire les hindouistes. Le 15 septembre, Mgr Aloysius Paul D’Souza, évêque de Mangalore, est apparu sur une télévision locale pour demander le retour au calme.
Pour le P. John Fernandes, professeur d’études chrétiennes à l’Université de Mangalore, au Karnataka, les attaques antichrétiennes ont été « planifiées » à des fins électoralistes. « Sur la scène électorale, le poids des chrétiens est insignifiant, mais, pour unir les hindous, une campagne de haine dirigée contre les chrétiens peut se révéler payante », explique le prêtre catholique, qui s’inquiète du fait que les « succès » rencontrés ici et là par les extrémistes hindous les incitent à porter leur violence ailleurs. L’inquiétude des chrétiens ne peut que croître à mesure que les hindouistes s’activent à la préparation des prochaines élections législatives, prévues en 2009.
Sur le plan international, le ministre italien des Affaires étrangères a indiqué que les persécutions antichrétiennes en Orissa ont été inscrites à l’ordre du jour du prochain sommet entre l’Union européenne et l’Inde, qui se tiendra à Paris les 29 et 30 septembre prochains. C’est l’Italie qui a demandé l’inscription de ce sujet, proposition acceptée par les 26 autres membres de l’UE. Ce sommet, le quatrième depuis 2004 et la mise en place d’« un partenariat stratégique » entre l’Europe et l’Inde, sera présidé par le Premier ministre Manmohan Singh et le président Nicolas Sarkozy, qui assume actuellement la présidence de l’UE.