Eglises d'Asie

Orissa : la tension reste forte dans les districts où les hindouistes ont pourchassé les chrétiens durant quatre jours

Publié le 18/03/2010




Dans l’Etat de l’Orissa, marqué par plusieurs journées de très graves attaques antichrétiennes, les militants hindouistes continuent de faire régner la terreur. En dépit de l’intervention des forces de l’ordre, dont les forces fédérales, les extrémistes hindous n’ont pas hésité ces derniers jours à attaquer des camps où les chrétiens avaient trouvé refuge.

Selon l’Eglise catholique en Orissa, il est encore trop tôt pour faire un bilan des violences qui ont éclaté après l’assassinat du religieux hindou, Swami Laxmanananda Saraswati, le 23 août dernier (1). Mais on estime le nombre des personnes qui ont fui les violences à environ 50 000 ; 13 des 30 districts de l’Etat ont été particulièrement touchés et il y aurait au moins 25 morts. Malgré l’intervention des forces de l’ordre, tardive selon l’Eglise, la tension reste toutefois palpable et les chrétiens sont terrorisés. Les 3 et 4 septembre derniers, au moins trois camps de personnes déplacées, sur les sept camps qui ont été installés pour accueillir 15 000 personnes, ont été attaqués ou menacés par des militants hindouistes.

 

Le 4 septembre, des femmes hindouistes ont tenté d’investir le camp installé à Tikabali, à 200 km au nord-ouest de Bhubaneswar, capitale de l’Etat. Elles ont jeté des pierres sur les policiers en faction devant le camp et « la panique s’est emparée des chrétiens », témoigne une catholique. Dans un autre camp, à Nuagam, dans le district de Kandhamal, épicentre des violences, il semble que les hindouistes aient pris le contrôle du camp. Enfin, dans un camp à Raikia, la confusion a été totale après que des activistes soient parvenus à empoisonner les réserves d’eau. Le 3 septembre, dans ce même camp, les hommes de la Central Reserve Police Force, une unité des forces fédérales dépêchées sur les lieux pour protéger le camp, ont rencontré des difficultés à cause du refus de la police locale de coopérer avec eux.

 

Depuis New Delhi où il s’est installé afin de tenter de mobiliser l’attention du gouvernement fédéral, Mgr Raphael Cheenath, archevêque de Cuttack-Bhubaneswar, dénonce des attaques « d’une férocité inouïe ». Si les attaques ont baissé en intensité ces derniers jours, « c’est parce qu’il n’y a plus rien à détruire », a-t-il déclaré. Il a particulièrement dénoncé le fait que, selon certains rapports, dans des villages chrétiens, des croyants ont été forcés de signer des documents indiquant qu’ils étaient hindous ; certains ont été contraints de détruire eux-mêmes des églises et des habitations de chrétiens. Ces violences sont le fruit « des campagnes de haine » propagées par des groupes radicaux hindous en Orissa depuis 25 ou 30 ans, a-t-il encore affirmé. Les esprits sont « contaminés et les gens ont perdu la capacité de raisonner de manière juste ». Les organisations hindouistes ont prospéré car cela servait les intérêts de certains partis politiques, mais ces groupes « sont désormais hors de contrôle », a-t-il dénoncé.

 

Face aux violences et à l’incapacité des forces de police à protéger les chrétiens sur le terrain, l’Eglise catholique a répondu par la non-violence, des démarches officielles et la prière. Le 29 août, dans les 160 diocèses du pays, les 20 275 institutions éducatives de l’Eglise ont fermé leurs portes ; elles scolarisent plus de 10 millions d’élèves, dont huit sur dix ne sont pas chrétiens. La Cour suprême a été saisie afin qu’une enquête soit ouverte au sujet de la réponse du gouvernement à ces violences, tant en Orissa qu’au plan fédéral. Dimanche 7 septembre, à l’initiative de la Conférence épiscopale, les catholiques indiens ont été appelés à prier et à jeûner pour la paix et l’harmonie, à l’occasion d’une « Journée pour l’amitié entre les communautés ».