Eglises d'Asie

Orissa : nouvelle vague de violence

Publié le 18/03/2010




Les attaques contre les chrétiens, en particulier dans le district de Kandhamal en Orissa, où les violences avaient commencé en août dernier (1), se poursuivent. Le 20 septembre, I. Digal, 42 ans, a été assassiné par un groupe d’extrémistes hindous alors qu’il tentait de retourner au camp de réfugiés, dans le Kandhamal, où il vivait depuis que sa maison avait été incendiée. Sa femme, qui l’accompagnait, a réussi à s’échapper.

Selon des sources ecclésiastiques, une jeune chrétienne de la même région a été violée par les hindouistes. Elle avait quitté le camp de réfugiés pour visiter sa grand-mère dans son village. C’est là qu’elle a été découverte par les hindouistes qui l’ont entraînée dans la jungle et violée.

« Nos vies sont gravement menacées, déclare le P. Prasanna Singh, qui a dû fuir sa paroisse après l’attaque en août dernier. Nous ne pouvons pas agir (…) et n’avons aucune idée de l’endroit où se trouvent nos paroissiens et combien d’entre eux ont survécu. » Comme les autres prêtres des 34 paroisses que compte le district de Kandhamal, le P. Singh avoue son impuissance : « Nos fidèles se cachent ou sont réfugiés dans des camps (…). Nous ne pouvons pénétrer dans la zone. Que pouvons-nous faire ? »

 

Sœur Suma, supérieure régionale des Missionnaires de la Charité en Orissa, était sur les lieux au moment des violences. Elle a porté secours à plusieurs prêtres réfugiés dans la jungle. Dans une interview à l’agence Ucanews, elle dénonce l’attitude des autorités : « Elles ont clairement ordonné qu’aucun religieux chrétien ne puisse entrer dans les camps. » Néanmoins, évêques, prêtres et religieuses de différentes congrégations tentent de faire parvenir des secours d’urgence dans les zones sinistrées et les camps.

 

Une religieuse du camp de Raikia, à Kandhamal, a rapporté à l’agence AsiaNews : « (…) Si les autorités découvrent que nous sommes des religieuses, nous serons chassées. Je suis en habits civils et porte même la tikka (2). (…) Nous sommes constamment surveillées. De ma vie, je n’ai jamais rien vu de tel. J’ai vécu des catastrophes naturelles comme un tsunami, des tremblements de terre ou des cyclones mais rien d’aussi horrible qu’ici. La volonté de détruire l’autre est si forte chez ces fanatiques, leur brutalité, la torture ! Tout cela dépasse l’imagination. »

Selon le Conseil des chrétiens de l’Inde, 37 chrétiens, dont deux pasteurs protestants, ont été tués dans le seul Etat de l’Orissa depuis les événements d’août dernier, plus de 4 000 maisons appartenant à des chrétiens et lieux de culte ont été brûlés et plus de 50 000 croyants ont dû fuir. Parmi eux, seulement 14 000 ont pu trouver refuge dans les 14 camps mis à disposition par le gouvernement. Selon ces estimations, encore incomplètes, de nombreux chrétiens se cacheraient toujours dans la jungle. Plusieurs centaines de chrétiens, catholiques comme protestants, auraient également été forcés de se convertir à l’hindouisme.

 

Cependant, les chrétiens peinent à faire reconnaître leurs droits et rares sont ceux qui osent porter plainte, la police protégeant souvent les suspects. « A Kandhamal, nous avons été traités comme ne le seraient pas même des animaux (…). La police et le gouvernement sont incapables d’agir (…) », dénonce le P. Bernard Digal, trésorier de l’archevêché de Cuttack-Bhubaneswar, laissé pour mort lors d’une attaque des hindouistes (3).

 

Le gouvernement de l’Etat rechigne en effet à reconnaître son impuissance, comme le montre un communiqué officiel du 20 septembre adressé au P. Anand Muttungal, porte-parole de l’Eglise catholique de l’Etat voisin du Madhya Pradesh et initiateur d’une campagne de mobilisation de l’opinion publique en faveur des chrétiens. Dans ce communiqué, le ministre de l’Intérieur de l’Orissa affirmait que la sécurité des chrétiens de l’Etat était assurée et affirmait qu’aucun incident majeur n’avait eu lieu dans le district de Kandhamal depuis le 28 août.