Eglises d'Asie

Le diocèse de Baguio met en garde contre les dangers de l’exploitation sauvage des mines

Publié le 18/03/2010




Le 2 octobre dernier, les sauveteurs remontaient le dernier survivant d’une catastrophe minière survenue à Itogon, ville de la Cordillière de l’île de Luzon où des mines d’or semi-abandonnées continuent d’être exploitées par les populations locales.

« C’est un vrai miracle », a déclaré Georges Baywong, responsable du Bureau des mines et de la géologie, qui avait décidé ce jour-là d’abandonner les opérations de recherche. Après onze jours passés sous terre, Anaysan est sorti vivant de cette catastrophe, portant à dix le nombre des rescapés ; par ailleurs recherché pour vol par la police, il a été arrêté peu après avoir été remonté à l’air libre.

 

Le mardi 23 septembre, la mine autrefois exploitée par la Benguet Mining Corporation (BMC) n’avait pas résisté au passage du typhon Hagupit qui a inondé et fait s’effondrer des galeries, piégeant les mineurs à plus de 200 mètres sous terre. Au moins six corps ont été remontés par les sauveteurs.

 

« Depuis des années, le diocèse organise des réunions avec les communautés locales sur la sécurité dans les mines et la préservation de l’environnement, explique Erlinda Tindo, du centre d’action sociale du diocèse de Baguio. Mais quoi que l’on fasse, les gens de la province de Benguet et d’ailleurs continuent de venir à Itogon, chercher de l’or dans les galeries creusées par la BMC. »

 

Mgr J. Carlito Cenzon, évêque de Baguio, diocèse dont le territoire correspond à la province de Benguet, a chargé le Bureau diocésain d’action sociale d’enquêter sur l’accident avant de faire une quelconque déclaration. « D’après ce que j’ai compris, ces mineurs étaient illégaux, aussi je ne ferai pas de commentaires. Ils n’auraient pas dû se trouver là, a-t-il déclaré à l’agence Ucanews (1). L’Eglise s’inquiète également pour les familles dont les maisons ont été détruites quand le tunnel s’est effondré. »

 

Lorna Wasia œuvre à la paroisse Notre-Dame de Fatima à Tuding, localité du district d’Itogon. Elle rapporte que la communauté catholique a distribué de la nourriture et porté secours aux familles des mineurs après le passage du typhon, qui a emporté 90 maisons. « De nombreuses familles de la région dépendent de la mine pour leur gagne-pain. L’activité est illégale, mais les mineurs se sentaient ‘en sécurité’ quand ils descendaient dans les puits, même pendant les typhons, parce que la BMC avait, pensaient-ils, construit un tunnel qui détournait l’eau de pluie des galeries. »

 

Pourtant des habitants ne partageaient pas cette confiance et avaient protesté quand ce tunnel avait été construit ; celui-ci passait sous leurs maisons et ils pensaient que cela pouvait être dangereux. Joseph Manzano, journaliste de la Mountain Province Broadcasting Corporation, la télévision du diocèse, auteur de nombreux reportages sur l’activité minière à Itogon, a confié à Ucanews qu’il avait relevé beaucoup de plaintes de ce genre. « Leurs craintes se sont avérées justifiées : le tunnel s’est effondré et l’eau s’est engouffrée dans les galeries. »

 

Depuis Manille, pour répondre aux accusations affirmant que les mineurs pris au piège travaillaient comme sous-traitants de la BMC, un avocat de la compagnie minière a rétorqué que les mineurs exerçaient leur activité illégalement depuis janvier, date à laquelle le site avait été fermé après négociations menées entre la compagnie et les « mineurs artisanaux » (2). La compagnie travaillait dans la région depuis les années 1950 et avait stoppé son activité dans les années 1990, faute d’une rentabilité suffisante. Selon l’avocat, la firme, jusqu’en janvier dernier, « avait autorisé l’exploitation du niveau supérieur de la mine (jusqu’à – 170 mètres), pour satisfaire aux revendications des ‘mineurs artisanaux’ qui ne survivaient que grâce à cette activité ». L’avocat a précisé que ces galeries avaient été réhabilitées et étaient « relativement sécurisées ». « Nous exerçons une surveillance, nous avons des inspecteurs de sécurité, la ventilation et l’électricité ont été installés, c’est un site sécurisé. » La descente plus profond dans la mine était interdite, a-t-il ajouté.

 

Il y a quelques jours, le gouverneur de la province de Benguet, Nestor Fongwan, a demandé à la présidente Gloria Macapagal-Arroyo de confier au ministère de l’Energie et des Ressources naturelles ainsi qu’au Bureau des mines une enquête sur cette catastrophe minière ainsi que sur l’éventuelle nécessité de légiférer sur l’exploitation artisanale des mines dans la région.