Eglises d'Asie

Selon un récent sondage, le protestantisme en Corée souffre d’un manque de crédibilité

Publié le 18/03/2010




Selon une récente étude, les Sud-coréens déclarent ne pas avoir une grande confiance dans le protestantisme et reprochent à ses fidèles de ne pas mettre en pratique ce qu’ils prêchent, à commencer par la tolérance envers les autres religions. Le Mouvement pour une éthique chrétienne de Corée (CEMK), qui a mené l’étude conjointement… 

… avec le Global Research Institute, a présenté les résultats de cette enquête lors d’un séminaire qui s’est tenu le 20 novembre dernier. Le sondage d’opinion a été effectué dans tout le pays, du 23 au 27 octobre, auprès de 1 000 personnes âgées de 20 à 60 ans, afin de connaître la manière dont les Sud-Coréens appréhendaient le protestantisme local.

A la question de savoir si elles accordaient leur confiance aux Eglises protestantes, 18,4 % des personnes interrogées ont répondu positivement – un chiffre qui correspond à peu près à la proportion des protestants dans la société sud-coréenne (18,3 % selon les données officielles du recensement de 2005). Presque une majorité des Coréens a déclaré ne pas faire confiance aux Eglises protestantes (48,3 %) et un tiers ne se prononce pas sur cette question (33,3 %) 

A la question de savoir quelle est la religion sur laquelle on peut le plus compter, 35,2 % des personnes sondées choisissent le catholicisme – qui représente seulement 10,9 % de la population sud-coréenne, toujours selon les chiffres du recensement de 2005. Le bouddhisme, quant à lui, réunit 31,1 % des suffrages – on compte 22,8 % de bouddhistes parmi les 47 millions de Sud-Coréens (1). Le protestantisme ne rallie que 18 % des personnes sondées, chiffre suivi de près par celui des personnes déclarant qu’on ne peut compter sur aucune religion (15,7 %). Quant à savoir quelle est la religion que les personnes sondées privilégient le plus, la hiérarchie des réponses est à peu près inchangée : 31,5 % pour le bouddhisme, 29,8 % pour le catholicisme, 20,6 % pour le protestantisme et 15 % pour aucune religion. 

L’étude fournit quelques éléments de réponse pour comprendre pourquoi le protestantisme connaît un désamour relatif. Interrogées à propos des actions qui permettraient au protestantisme de gagner la faveur de l’opinion, les personnes sondées sont 42 % à répondre que les responsables de communauté ou simples fidèles protestants devraient « accorder leurs actes à leur discours » ; pour 25,8 % des personnes sondées, c’est « la tolérance envers les autres religions » qui leur fait défaut ; 11,9 % attendent des protestants un investissement dans « l’action et le service social » et 11,5 % enfin appellent de leurs vœux « la transparence financière »

A propos des activités sociales dans lesquelles elles aimeraient voir s’engager les Eglises protestantes, 47,6 % des personnes sondées ont choisi les services de volontariat et d’assistance, 29,1 % des campagnes en faveur de la morale et l’éthique, et 12,5 % un engagement dans l’action sociale telle que les mouvements pour les droits de l’homme ou la défense de l’environnement. 

Kim Byung-yeon, professeur d’économie de l’Université nationale de Séoul et directeur général du Honest and Credibility Promotion Movement du CEMK (2), a assuré la coordination de l’étude. Selon lui, « les résultats du sondage montrent que le protestantisme coréen est en plus grand danger qu’il ne l’imaginait. Il s’est aujourd’hui coupé de la société (…). L’Eglise catholique de Corée (quant à elle) est vue comme ayant apporté une importante contribution à la société, dans le domaine de la démocratisation ou du bien-être social, et le bouddhisme (de son côté) attire fortement les jeunes générations ». 

Lors du séminaire du 20 novembre, Lee Sook-jong, de l’Université Sungkyunkwan, analysait : « Le manque de confiance provient essentiellement des problèmes éthiques soulevés par les responsables protestants et leurs fidèles, ainsi que de leur attitude intolérante envers les autres religions. » Elle soulignait également le fait que beaucoup de gens critiquent la transmission par nombre de pasteurs de leurs Eglises à leurs enfants, celles-ci étant alors considérées comme un bien patrimonial comme un autre. Dans la société sud-coréenne, la stature morale est un facteur important et les Eglises doivent se montrer irréprochables sur ce plan, en faisant preuve, notamment d’une grande transparence financière et fiscale. 

Pour Yim Sung-bihn, professeur au Collège et séminaire presbytérien de théologie, la défiance de la société envers une religion est à mettre en relation directe avec la foi. « Si une Eglise n’a pas la confiance de la société (…), cela signifie que ses relations avec le divin et avec le prochain sont jugées comme étant problématiques. Pour les protestants, regagner la confiance de l’opinion passe par la faculté à mener une authentique vie chrétienne. » 

Le Rév. Han Kee-chae, pasteur de la Korea Evangelical Holiness Church, ne se montre pas surpris des résultats du sondage. « Les premières Eglises n’avaient ni or ni argent et ne tenaient leur autorité que du ‘nom de Jésus’. Aujourd’hui, les Eglises coréennes possèdent l’or et l’argent mais n’agissent plus ‘au nom de Jésus’, constate-t-il (3). Nous devrions mettre notre foi en pratique par le service, le partage et l’attention apportée à notre prochain. »