Eglises d'Asie

La plainte des catholiques de Thai Ha contre les médias officiels a fait sortir le pouvoir central de la réserve où il se tenait jusqu’à présent, estime un analyste

Publié le 25/03/2010




Avec les récentes interventions de la police de Saigon contre Me Lê Trân Luât, avocat (1), ce que l’on appelle désormais « l’affaire des catholiques de Thai Ha » aurait-elle changé de dimension ? Maintenue dans les limites de la capitale et traitée jusqu’à présent par des autorités municipales, aurait-elle pris maintenant une dimension nationale ? C’est ce que donne à penser un commentaire…

… mis en ligne par une agence en langue vietnamienne, le 5 mars dernier (2). Celui-ci s’efforce de démontrer que, contrairement à ce que certains ont pensé trop rapidement, la riposte du pouvoir aux protestations catholiques est – et l’a sans doute été dès le début – animée, calculée et coordonnée au plus haut niveau du gouvernement.

Toute l’année dernière, les questions soulevées par les réclamations des catholiques et leurs manifestations de prière ont été réglées au niveau de l’arrondissement et, quelquefois, de la ville. Le pouvoir central s’est bien gardé d’émettre une opinion, laissant entendre qu’il s’agissait là d’une affaire locale. La plus haute autorité rencontrée par les fidèles de cette paroisse fut un des membres du Comité populaire de Hanoi. Les autorités supérieures ont donc pris soin de se tenir à distance de l’affaire et de garder celle-ci à l’intérieur du cadre municipal, suggérant ainsi que son importance ne méritait pas leur attention.

Mais, ces derniers jours, les actions illégales menées contre l’avocat et son cabinet de Saigon ont levé le voile sur les véritables instances chargées de traiter cette affaire. Ces dernières ont à leur disposition les forces de sécurité de Saigon. Les policiers de l’arrondissement de Go Vâp, à Hô Chi Minh-Ville, n’ont-ils pas dit à Me Luât, lors de son arrestation et de son internement provisoire du 3 mars, qu’ils agissaient sur ordre supérieur ?

L’avocat est le représentant légal de ses clients catholiques de Hanoi dans la plainte lancée par eux contre le journal et la télévision de la capitale pour déformation de la vérité, plus précisément pour avoir affirmé que les catholiques inculpés s’étaient déclarés coupables devant le tribunal – ce qui était faux. L’arrestation de l’avocat à l’aéroport de Saigon, sa mise en surveillance dans les locaux de la police ont eu lieu le jour même où il devait assister ses clientes, Mmes Nguyên Thi Viêt et Ngô Thi Dung, dans des démarches auprès des médias, objets de la plainte. Cette même matinée, à Hanoi, Mme Viêt était convoquée à la Sécurité de son district sans raison apparente, pour y faire le récit des débats du procès. Cet ensemble de faits montre à l’évidence non seulement une coordination de l’action policière au niveau national mais encore la solidarité existant entre la presse officielle et les divers organismes de l’Etat.

Il apparaît que l’interdit qui empêchait le pouvoir central de s’impliquer trop ouvertement dans cette affaire est tombé. La critique ouverte contre les médias officiels a contraint les autorités centrales à sortir de leur réserve, ce que n’avaient pas réussi à faire les revendications de terrains et les manifestations de prière de l’année dernière.