Eglises d'Asie

L’Eglise catholique obtient que le film Anges et démons sorte sur les écrans indiens amputé de plusieurs scènes jugées « choquantes »

Publié le 25/03/2010




Le 4 mai dernier, à Rome, le film Anges et démons du réalisateur Ron Howard, avec l’acteur américain Tom Hanks dans le rôle titre, était projeté en première mondiale dans un cinéma situé à proximité du Vatican. Le même jour, en Inde, la Conférence des évêques catholiques demandait – et obtenait – que ce film sorte sur les écrans des cinémas indiens avec la mention « Ceci est une œuvre de fiction »…

… et soit amputé de plusieurs scènes. La sortie du film, en Inde et dans le reste du monde, est programmée pour le 15 mai prochain.

Le P. Babu Joseph, porte-parole de la Conférence épiscopale, a expliqué que les évêques avaient pris l’initiative, le 17 avril dernier, de saisir le Central Board of Film Certification, l’instance fédérale responsable de la délivrance des visas d’exploitation pour les œuvres cinématographiques. Dans leur lettre à l’administration fédérale, ils ne demandaient pas l’interdiction pure et simple du film en Inde, mais que des coupes y soient pratiquées, au motif qu’Anges et démons « représente une tentative pour calomnier les chrétiens et leur foi, en altérant délibérément les faits ». Cette œuvre ne peut que « heurter les sentiments religieux des chrétiens » en Inde, où « le christianisme est, encore à l’heure actuelle, dans une phase où il commence seulement à être compris » ; présenter le christianisme « d’une manière erronée est une insulte », pouvait-on encore lire dans cette lettre.

Ainsi saisi par les évêques, le Central Board of Film Certification a organisé une projection spéciale, à laquelle huit représentants de la Conférence épiscopale ont été conviés. A l’issue de celle-ci et après délibération, il a été décidé que le film sortirait sur les écrans indiens assorti d’une interdiction aux mineurs et coupé de plusieurs scènes. De plus, le générique du film portera la mention : « Ceci est une œuvre de fiction. »

Pour le P. John Edappilly, expert dans le domaine des médias qui faisait partie du groupe des huit représentants de l’Eglise admis à voir le film en avant-première, l’Eglise n’a pas cru bon de demander, comme elle l’avait fait en 2006 pour le Da Vinci Code (1), son interdiction. « Ne décidons pas à la place des spectateurs ! Ils sont capables de juger par eux-mêmes », a-t-il précisé, ajoutant que demander l’interdiction du film n’aurait fait que générer plus de publicité pour celui-ci et augmenter les profits de ses producteurs. Selon le P. Babu Joseph, Anges et démons « n’est rien de plus qu’un simple thriller de facture occidentale, mais certaines de ses scènes sont choquantes parce qu’elles visent directement la papauté et la religion chrétienne ». Dans le film, le professeur Robert Langdon, interprété par Tom Hanks, déjoue les plans d’un haut dignitaire du Saint-Siège et se retrouve aux prises avec la secte des Illuminati, qui veut anéantir l’Eglise catholique.

A Bombay, capitale du cinéma en Inde, le Catholic Secular Forum, une organisation de laïcs catholiques, militait pour l’interdiction du film sur les écrans indiens. Après la décision rendue par le Central Board of Film Certification, son président, Joseph Dias, a déclaré : « Nous nous attendions certainement à un geste plus fort, mais nous comprenons que la discrétion, dans le cas présent, est sagesse. »

A Rome, le Bureau de presse du Saint-Siège s’est refusé à faire tout commentaire sur ce film. L’agence I-Media rapporte que L’Osservatore Romano a observé la même discrétion. En mai 2006, lors de la sortie en salles du Da Vinci Code, le Vatican avait très vivement réagi, contribuant malgré lui au succès du film (2).