Eglises d'Asie

Après l’attentat meurtrier de l’église de l’Assomption, les chrétiens refusent de céder aux menaces des extrémistes hindous et manifestent pour la paix

Publié le 25/03/2010




Une grande manifestation organisée conjointement par les catholiques et les protestants a réuni, dimanche 31 mai, plus de 7 000 chrétiens à Katmandou, ainsi que de nombreux autres groupes dans une quinzaine de localités népalaises. Tous protestaient contre l’attentat à la bombe meurtrier du 23 mai dernier dans l’église de l’Assomption, principale église catholique du Népal, …

… qui a fait deux morts et plus d’une quinzaine de blessés graves dont la mère de l’une des victimes qui est décédée quelques jours plus tard des suites de ses blessures (1).

Malgré les fortes pluies de mousson, les participants, comprenant un grand nombre de protestants (au nombre de 4 000 environ), de catholiques (plus de 3 000, venus des trois paroisses de Katmandou) ainsi que des hindous et des musulmans, ont rallié le cœur de la capitale en une « Marche de la paix et de la non-violence, contre le meurtre, la violence et le terrorisme ». Evangéline Rai, de l’Eglise pentecôtiste, déclare avoir voulu protester contre « l’acte haineux » perpétré contre les catholiques. Elle ajoute : « Notre Eglise pourrait être la prochaine victime. C’est une attaque contre l’ensemble de la communauté chrétienne du Népal. »

Mgr Anthony Sharma, vicaire apostolique de l’Eglise catholique au Népal, présent lors de la manifestation, a souligné que « la communauté catholique au Népal [avait] toujours été au service des pauvres et des nécessiteux, et [qu’] il n’y avait aucune raison de viser l’Eglise. Les lieux de culte devraient toujours être respectés et jamais attaqués » (2).

Comme les premiers indices trouvés sur les lieux du drame le laissaient supposer, le groupuscule hindouiste, l’Armée de Défense du Népal (Nepal Defence Army, NDA), a confirmé le 29 mai sa responsabilité dans l’attentat, par une déclaration menaçante : « Nous voulons que le million de chrétiens quitte le pays, sinon nous mettrons un million de bombes dans toutes les maisons où vivent les chrétiens et nous les ferons exploser. »

En 2008, le même NDA avait revendiqué l’assassinat du P. John Prakash Moyalan, prêtre catholique, ainsi qu’un attentat à la bombe qui avait fait deux morts dans une mosquée. D’autres attentats lui ont été imputés depuis que ce groupe s’est fait connaître peu après la transformation, en 2006, du dernier royaume hindou de la planète en une république laïque. Connu pour recruter ses membres parmi d’anciens soldats de la monarchie, d’anciens policiers et des victimes de la guérilla maoïste, le NDA demande la restauration d’un Etat hindou et le départ des humanitaires étrangers et des membres des autres religions au Népal (3).

L’un des organisateurs de la marche pour la paix, le Rév. Isu Jung Karki, affirme : « Ce type de menaces n’affectera en aucune façon notre mission au Népal. Nous avons traversé des temps très difficiles pendant les Panchayati days et nous n’avons pas arrêté pour autant de travailler pour Dieu (…).Cette marche montre que de telles attaques contre les chrétiens ne nous effrayent pas mais renforcent davantage notre unité et notre foi » (4).

Il confirme cependant que bon nombre de pasteurs reçoivent des menaces téléphoniques régulières. Quant à Binod Gurung, président de la Nepal Catholic Society, il considère que, « plus que jamais, depuis l’attentat à la bombe, [les chrétiens] doivent être vigilants et ne pas prendre ces menaces à la légère ».

Dans leurs allocutions lors de la manifestation, tous les responsables chrétiens, aussi bien catholiques que protestants, ont demandé au gouvernement d’assurer la sécurité des églises et des fidèles, de verser un dédommagement aux familles des victimes de la bombe et de prendre des mesures contre les instigateurs de l’attentat.

Rabindra Khanal, hindou, professeur à l’Université, a déclaré avoir participé à la marche parce qu’il croyait au droit de chaque citoyen à bénéficier de la liberté de religion : « Si ce n’est pas possible, il n’y a pas de raison d’appeler notre pays ‘République démocratique fédérale du Népal’ », a-t-il souligné.