Eglises d'Asie – Inde
Karnataka : les Eglises chrétiennes fondent un Forum oecuménique pour la défense de leurs droits
Publié le 25/03/2010
… de l’Eglise de l’Inde du Sud (Church of South India, CSI) a accueilli huit évêques catholiques du Karnataka, ainsi que les représentants des Eglises méthodiste, orthodoxe, jacobite, de l’Eglise des croyants (Believer’s Church), de la Fédération des Eglise chrétiennes et des Eglises indépendantes, soit une foule composée de délégations de 113 Eglises de l’Etat du Karnataka (1).
Cette grande première dans l’histoire de l’œcuménisme en Inde est l’œuvre de Mgr Bernard Moras, archevêque catholique de Bangalore. En octobre dernier, en pleine persécution antichrétienne, il lançait l’idée d’une institution regroupant les différentes Eglises pour la défense de leurs droits. Après l’Orissa, l’Etat du Karnataka a été en effet l’un de ceux qui ont le plus souffert de la vague de violence de 2008, avec une quarantaine de lieux de culte saccagés et de nombreux chrétiens agressés, de toutes confessions. L’unité n’allait pas de soi, surtout après les fortes tensions qui avaient surgi entre l’Eglise catholique et les Eglises évangéliques, en particulier celles appartenant à la mouvance de la New Life Fellowship (2), à laquelle il avait été reproché d’avoir en partie provoqué les attaques hindouistes par ses méthodes d’évangélisation controversées.
L’œcuménisme voulu par les fondateurs du Forum était déjà à l’œuvre pour ce premier rassemblement inaugural : après l’accueil de Mgr Vasanthkumar, de l’Eglise de l’Inde du Sud (3), le Rev. Jesu Prasad, de la Believer’s Church (4), a fait prier l’assemblée. Puis Mgr Moras a expliqué les fondements et buts du Forum, relayé par le P. Ronnie Prabhu, secrétaire de la Commission du Karnataka pour l’œcuménisme, lequel avait également dirigé le comité de création du Forum. Se sont ensuite exprimés le P. Faustine Lobo, porte-parole de l’archidiocèse catholique de Bangalore, le président du FCCO, le Rev. Yeswanth Kumar (5), le Rev. Prabhakar Shadrack, pasteur de l’Eglise méthodiste, et le P. Arokianathan, secrétaire de l’archidiocèse catholique de Bangalore pour l’œcuménisme.
Au cours de son allocution, Mgr Bernard Moras a tenu à préciser que « bien que la raison première de la création du Forum ait été les violences antichrétiennes, [les participants savaient] qu’il fallait aller plus loin et faire de ce Forum un lieu d’échanges où [ils pourraient] déterminer ce [qu’ils possédaient ] en commun et [pouvaient] faire en commun, comme tendre la main aux déshérités de la société» (6).
Le prélat, également président du Conseil des évêques catholiques du Karnataka, a ajouté : « Les attaques contre nos églises n’ont eu pour effet que de faire grandir notre foi et nous rassembler. Nous avons entendu certains de nos politiciens dire que le Karnataka deviendrait un second Gujarat (7), mais rien ne peut l’emporter sur l’unité de l’Eglise. »
Selon les statistiques officielles de 2001, l’Etat du Karnataka compte près de 53 millions d’habitants, en grande majorité hindous, les musulmans représentant environ 12 % de la population et les chrétiens moins de 2 %, subissant régulièrement les attaques des fondamentalistes hindous.
« Dieu a le pouvoir de faire jaillir le bien du mal, a poursuivi Mgr Moras. La création de ce Forum en est la preuve. Les attaques des églises et de ceux qui sont à leur service (…) [nous] ont poussé à réfléchir sur la façon d’arrêter la violation de notre droit à pratiquer et professer notre foi. C’est dans cette souffrance commune que nous avons ressenti le besoin d’unifier nos différentes confessions chrétiennes afin d’être représentés collectivement auprès des autorités, comme de la société. »
Le Forum s’est doté d’une direction tricéphale avec l’archevêque catholique de Bangalore, l’évêque de la Church of South India (CSI) et celui de l’Eglise méthodiste. Les autres membres sont issus des autres confessions chrétiennes, dont deux représentants pour chacun des diocèses catholiques du Karnataka, au nombre d’une dizaine.
Le Forum a déjà mis en place des propositions communes, insistant notamment sur les règles d’éthique concernant l’évangélisation, laquelle ne doit en aucun cas s’accompagner de proposition d’argent, de moyens de pression ou d’autres procédés pouvant remettre en cause la liberté de choix des convertis.