Eglises d'Asie – Philippines
A Pasay City, l’Eglise catholique soutient les musulmans dans leur lutte pour sauver leur mosquée de la destruction
Publié le 25/03/2010
… et toutes les organisations chrétiennes qui nous ont apporté leur aide », a déclaré le chef de la communauté musulmane du quartier, Abdelmanan Tanandato, au P. Robert Reyer, lors du rassemblement de jeûne et de prière qui s’est tenu le 19 septembre dernier, à la Grande Mosquée de Pasay City, au sud de Manille (1). Le leader musulman, qui est également à la tête d’une association d’aide aux victimes du plan gouvernemental de démolition, a ajouté : « Nous savons que sans votre aide, notre petite communauté aurait eu beaucoup de difficultés à défendre ses droits face au gouvernement. »
Le P. Reyes, 54 ans, prêtre catholique du diocèse de Cubao, au nord-est de Pasay, surnommé « the running priest » en raison de son combat contre les inégalités et injustices, s’est exprimé devant la foule rassemblée devant la mosquée. Il a expliqué qu’il était venu dans une démarche de solidarité envers la communauté musulmane, qui avait appris le projet d’expulsion et de destruction de ses habitations et de sa mosquée, seulement quelques jours avant le début du ramadan, en août dernier. « Je rejoins votre lutte pour empêcher la destruction de ce lieu saint (….). Si dans ce pays, les églises chrétiennes sont respectées par le gouvernement et ne sont pas démolies, les lieux de culte des musulmans doivent bénéficier du même respect. »
De son côté, Abdelmanan Tanandato a rappelé comment Mgr Broderick Pabillo, évêque auxiliaire de Manille et président de la Commission pour l’Action sociale, la Justice et la Paix de la Conférence des évêques catholiques des Philippines, avait initié les démarches officielles de l’Eglise en faveur de leur communauté. Il a également salué la déclaration, largement diffusée par les médias, de Mgr Oscar Cruz, archevêque de Lingayen-Dagupan, dans laquelle le prélat n’avait pas hésité à qualifier l’affaire de la mosquée de Pasay City, de « bombe à retardement » (2). « Détruire un symbole religieux pour le remplacer par le symbole du vice et de la consommation est une véritable provocation ! (…) C’est une violation des traditions religieuses et des croyances des chrétiens comme des musulmans », s’était indigné l’archevêque, connu pour sa croisade contre la fructueuse industrie des jeux d’argent aux Philippines. En conclusion, Abdelmanan Tanandato a souligné qu’être de religions différentes ne « pouvait empêcher [les communautés chrétiennes et musulmanes] de faire l’unité, car [elles] partageaient le même désir de paix pour [leur] pays ».
Après ces allocutions devant la mosquée, les participants ont effectué une « marche de prière », en tournant sept fois autour du lieu de culte. Les femmes, les enfants, et d’autres manifestants ont ensuite brandi des pancartes où l’on pouvait lire : « Respectez nous, respectez l’islam, respectez notre culture, respectez nos droits ! ». Ceux qui ont été invités à entrer dans la mosquée, dont le P. Reyes, y ont observé plusieurs minutes de silence dans « un temps de prière universel » pour la communauté.
Selon le Daily Tribune, qui avait relayé en août les déclarations des responsables catholiques et musulmans contre la démolition de la mosquée, 14 incidents du même type se seraient produits en 2008, ayant eu pour résultat l’expulsion de 2 411 familles. Ces chiffres avaient été fournis au quotidien philippin par des ONG, dont l’Urban Poor Associates (UPA), qui luttent contre les expulsions et destructions forcées.