Eglises d'Asie – Philippines
L’Eglise et le gouvernement refusent de payer la rançon de 2 millions de dollars demandée par les ravisseurs du P. Sinnott en échange de sa libération
Publié le 25/03/2010
… tenant devant lui un journal daté du 22 octobre, afin de prouver qu’il était en vie, et déclarant « que les ravisseurs avaient pour chef Abu Jayad (1) [et qu’ils] demandaient une rançon de 2 millions de dollars » pour sa libération.
« Nous vivons à l’extérieur dans des conditions difficiles », poursuivait le prêtre de Saint Colomban, enlevé le 11 octobre dernier, dans la maison de la société missionnaire à Pagadian City, dans la province de Zamboanga del Sur (2). Apparaissant souriant sur la vidéo, il ajoutait : « Je suis encore en bonne santé bien que je n’aie pas tout mon traitement avec moi ». Le doute semble ainsi levé concernant la transmission des nombreux médicaments dont le prêtre, âgé de près de 80 ans et ayant subi récemment une grave opération cardiaque, avait besoin quotidiennement. Un émissaire avait été envoyé par les supérieurs du missionnaire avec son traitement médical le 21 octobre dernier et n’avait donné aucune nouvelle depuis (3). On peut supposer que le colis n’est jamais arrivé à destination, étant donné, surtout, qu’il contenait une veste que le prêtre devait porter pour prouver qu’il était en vie et qu’il n’a pas sur la vidéo.
Dans son édition du 2 novembre, l’Inquirer cite le P. O’Donoghue, responsable régional de la société missionnaire de Saint Colomban : « Je ne crois pas qu’il soit bon de payer une rançon (…). Cela ne ferait qu’accentuer la vulnérabilité de chacun d’entre nous et nous deviendrions des marchandises avant d’être des missionnaires (…). » Le prêtre irlandais poursuit : « Je suis persuadé que le P. Mick aurait été intransigeant sur ce fait et aurait voulu que l’argent soit seulement utilisé pour les pauvres, ou pour ouvrir de nouvelles maisons comme celle de Hangop Kabataan (4). Mick ne pensait jamais à lui-même et je suis sûr qu’il n’agirait pas différemment aujourd’hui. »
Un avis qui est également partagé par Mgr Deogracias Iniguez, président du comité des affaires publiques de la Conférence des évêques catholiques de Philippines (CBCP). Interrogé par l’Inquirer, il a déclaré qu’il approuvait la décision des supérieurs du P. Sinnott et du gouvernement, mais qu’il avait été surpris par la haine émanant des kidnappeurs lors des rares contacts établis avec eux, comme de l’énormité de la somme demandée.
A Pagadian City, Allan June Molde, porte-parole d’une cellule de crise mise en place par le gouverneur de la province de Zamboanga del Sur, a annoncé que leur comité se préparait à négocier la libération du P. Sinnott, selon les modalités fixées par le gouvernement, c’est à dire sans versement de rançon : « Nous attendons maintenant la réponse du groupe par l’intermédiaire des personnes qu’il a chargées de communiquer avec nous ».
Il a fallu trois semaines et l’aide du MILF (Front moro de libération islamique) pour retrouver la trace des ravisseurs, lequels n’avaient ni revendiqué leur acte, ni demandé de rançon avant ce week-end. Les efforts de l’armée, de la police locale et des rebelles du MILF, se poursuivent toujours dans la province de Lanao del Norte où le P. Sinnott est détenu.
Depuis l’enlèvement du missionnaire, l’île de Mindanao est le théâtre de grandes manifestations de soutien et de demande de libération du prêtre, très apprécié dans la région, aussi bien par les communautés chrétiennes que musulmanes (5).