Eglises d'Asie

POUR APPROFONDIR – Les catholiques appelés à ouvrir un dialogue avec la société tout entière

Publié le 25/03/2010




En dehors de la remise en mémoire de leur histoire et de la prière d’action de grâces, la communion dans l’Eglise et le dialogue avec la société seront, selon Mgr Pierre Nguyên Van Nhon, évêque de Dalat et président de la Conférence épiscopale, les objectifs des catholiques vietnamiens au cours de l’année sainte qui va s’ouvrir dans une semaine, le 24 novembre 2009.

Dans une interview mise en ligne le 12 novembre dernier (1), il a précisé ce qu’impliquait cette double visée. S’il n’a mentionné aucun événement précis, il s’est cependant appliqué à ne pas rester sur le plan des principes, plus particulièrement lorsqu’il a évoqué le dialogue de l’Eglise avec la société en vue de son développement intégral.

 

Pour le président de la Conférence épiscopale, le dialogue des catholiques avec la société tout entière ne peut qu’être accompagné par le respect mutuel et la collaboration. Il serait tout à fait inefficace sans la présence de ces deux éléments. Ainsi, dit-il, si l’un des partenaires n’est pas respecté et reconnu dans les valeurs qu’il défend et dans le rôle qu’il tient, le dialogue se transformera en « monologue ». Ce respect exige aussi que les paroles du dialogue ne soient ni transformées, ni tronquées.

Par ailleurs, Mgr Nhon refuse de limiter ce dialogue au seul domaine des relations entre l’Eglise et l’Etat. L’objectif de l’Eglise étant le développement intégral de l’homme et de la société, le partenaire principal de l’Eglise reste la société vietnamienne tout entière, une société qu’elle doit contribuer à transformer en tous ses domaines, dans un dialogue qui n’est pas seulement fait de paroles, mais aussi d’activités et d’attitudes. Nous traduisons ci-dessous, la réponse de Mgr Nhon à la question concernant ce dialogue.

L’Eglise en dialogue

« On peut dire que le dialogue est le moyen le plus adapté pour contribuer au développement intégral de l’homme et de la société selon l’esprit de l’Evangile, et plus particulièrement selon l’orientation pastorale du concile Vatican II. Cela est vrai pour la mission de toute l’Eglise universelle à notre époque et pas seulement pour la société vietnamienne. Cependant, il n’existe de dialogue, comme nous le savons tous, que s’il y a « collaboration » et « respect mutuel ». Sans eux, il n’y a plus qu’un « monologue ». Sans compter que, lorsque le respect mutuel fait défaut, les paroles peuvent être alors interprétées d’une façon erronée, ou tronquées en fonction des objectifs de chacune des parties.

Par ailleurs, le respect mutuel suppose que chacune des parties soit reconnue dans les valeurs qui sont les siennes et le rôle légitime tenu par celles-ci. Les valeurs et le rôle des religions en général et du christianisme en particulier dans les divers domaines de la société vietnamienne restent encore un problème à débattre… Dans les faits, l’Eglise continue d’élever la voix en vue du dialogue et elle ne veut que sa parole soit toujours et partout accueillie et communiquée fidèlement.

C’est pour cela que la Conférence épiscopale du Vietnam est en train d’essayer de mettre en place un lieu « officiel » pour faire entendre sa voix et nous espérons que le site Internet de la Conférence des évêques du Vietnam pourra, pour une part, jouer ce rôle.

Pour en revenir à la question du dialogue comme un moyen de contribuer au développement humain intégral, il me semble que nous devons prendre en compte toute la dimension du problème. Il ne s’agit pas de le réduire aux relations entre l’Eglise et l’Etat. Dialoguer dans l’esprit de l’Evangile, c’est dialoguer avec l’homme et pour l’homme, quel qu’il soit. Plus encore, le dialogue revêt une signification « salvifique ». Il ne se limite pas à la parole, surtout lorsque la parole devient inutile ou peu efficace. Alors l’engagement dans l’action est plus convaincant que le fait d’élever la voix. Nous ne devons pas attendre que les autres reconnaissent notre rôle et nos valeurs pour commencer à les vivre et pour agir. Au contraire, nous devons nous engager, nous devons vivre les valeurs de l’Evangile comme des témoins. Ainsi notre présence au sein de la société aura par elle-même une force d’attirance. Dans ce sens, l’Eglise du Vietnam, à travers les diverses composantes du peuple de Dieu, a élevé la voix fortement, et l’élève encore aujourd’hui par ses activités en de nombreux domaines de la société, de l’éducation à la santé en passant par le monde des migrants… bien que ce soient là des domaines où la voix de l’Eglise n’est pas encore reconnue de façon officielle. Des chrétiens, silencieux mais fermes et décidés, ont dialogué avec la société pour protéger et faire progresser l’homme.

C’est pourquoi, en fin de compte, l’œuvre nouvelle qui nous reste à accomplir, ce n’est pas seulement de nous efforcer de dialoguer avec des paroles, mais aussi avec notre cœur, de renouveler notre charité et de réveiller l’ardeur de notre engagement chrétien dans tous les domaines de la vie humaine telle qu’elle est vécue dans notre patrie bien-aimée…»

L’Eglise en communion

Dans la première partie de l’interview, Mgr Nhon a renouvelé l’appel de la Conférence épiscopale, invitant les fidèles à édifier l’Eglise sur le modèle de la communion et de la participation. Il a déclaré en particulier : « Nous construisons l’Eglise. En même temps, nous sommes nous-mêmes l’Eglise du Christ. Car nous – les membres du peuple de Dieu – ne pouvons construire l’Eglise sans une conversion profonde et intégrale, conformément aux exigences de la Bonne Nouvelle. Ceux qui portent la responsabilité de diriger dans l’Eglise, comme les évêques, les prêtres, ne peuvent édifier l’Eglise s’ils ne sont eux-mêmes, animés par l’esprit du serviteur qui les invite à servir et non pas à être servis (…). Les laïcs ne pourront pas non plus édifier l’Eglise s’ils ne sont pas animés par l’esprit de l’Evangile, c’est-à-dire s’ils n’abandonnent pas leurs projets d’ascension sociale ou leurs désirs de gains matériels. Ils devront en même temps avoir une conscience juste de leur propre dignité ainsi que de leur vocation en tant que membres du corps du Christ et ouvriers de la vigne du Seigneur. Toute contribution des membres, aussi humble qu’elle soit, sera profitable à l’ensemble du corps. A plus forte raison, si tous les membres vivent en conformité avec leur vocation, ils permettent à l’ensemble du corps de se développer avec force. De même, chaque fidèle est appelé lui aussi à travailler dans la vigne du Seigneur. (…) »