Eglises d'Asie – Philippines
La présidente invite les leaders religieux à lui apporter leur aide dans sa lutte contre les armées privées
Publié le 25/03/2010
… à voir ce travail achevé avant la tenue des élections générales le 10 mai prochain et a nommé des responsables religieux pour siéger au sein de la commission.
Prochainement, la présidente doit désigner le président de la commission, un ancien président de la Cour suprême étant pressenti pour le poste. Outre un général à la retraite, un conseiller à la Sécurité nationale et Dante Jimenez, fondateur de l’ONG Volunteers Against Crime and Corruption, la commission comprendra Mgr Juan de Dios Pueblos, évêque du diocèse catholique de Butuan, et le religieux musulman Mahmod Mala Adilao, de Davao. Le président de l’association nationale des radios FM, Hernan Basbano, figure également parmi les membres du groupe.
Avant d’accepter sa nomination, Mgr Pueblos a fait savoir qu’il comptait demander son accord au nonce apostolique accrédité auprès de Manille, Mgr Edward Joseph Adams. « J’estime que la mission confiée à la commission est légitime mais je veux être certain que le nonce m’autorise à siéger dans une telle instance », a-t-il déclaré. Pour sa part, Mgr Deogracias Iniguez, président du Comité pour les Affaires publiques de la Conférence épiscopale des Philippines, a apporté son plein soutien à l’initiative de la présidente Arroyo. « Je suis parfaitement d’accord avec la nécessité d’éliminer ces groupes armés. Ils ne devraient pas exister. Les Philippines ne doivent avoir qu’une seule armée, celle du gouvernement », a-t-il affirmé, soulignant l’urgence du travail à accomplir avant les élections du 10 mai.
Pour Mahmod Mala Adilao, la commission doit se mettre sans délai au travail si elle veut espérer accomplir la tâche dans les cinq mois qui lui ont été impartis. Selon Dante Jimenez, le travail doit se faire de manière « organisée ». « Nous devons en premier lieu définir ce qu’est une armée privée. Nous devons ensuite localiser ces armées privées, les identifier. Ensuite, nous devons mener des enquêtes. Ce n’est qu’ensuite que nous pourrons les traduire en justice », a-t-il expliqué.
Dans la presse philippine, les analyses vont bon train pour dire que personne ou presque ne peut justifier l’existence d’armées privées dans le pays, tout particulièrement après le massacre commis à Maguindanao, mais la tâche confiée à la commission est considérable. Tout d’abord, de nombreux hommes politiques, leurs familles et leurs partisans avec eux, revendiquent la volonté de conserver une armée privée, afin de garantir leur sécurité et celle de leurs proches. Parmi eux, se trouvent des alliés politiques de la présidente. Il reste donc à voir si la commission va s’attaquer de la même manière à toutes les armées privées (on en dénombrerait 132) (2) ou si l’émotion créée par le massacre du 23 novembre servira en fait à affaiblir uniquement les adversaires politiques de Gloria Arroyo. Ensuite, l’existence de ces armées privées dans le pays a été, dans certaines régions du pays, tolérée sinon encouragée par le gouvernement lui-même. Ainsi, à Mindanao, des hommes politiques ont levé des milices pour se défendre contre les menaces posées par des groupes tels le Front moro de libération islamique, la Nouvelle armée du peuple (d’obédience communiste), le groupe Abu Sayyaf ou d’autres formations évoluant à la frontière de la politique et du banditisme. C’est bien parce que le gouvernement s’est montré incapable de lutter contre ces groupes que les armées privées ont vu le jour, écrivent des éditorialistes. Si l’Etat remplissait les fonctions régaliennes qui sont les siennes, ces armées privées n’existeraient pas et le palais présidentiel n’aurait pas à accepter, voire à soutenir, telle ou telle de ces armées au motif qu’elles obéissent à tel ou tel allié politique.
Le 5 janvier, le principal inculpé dans le massacre de Maguindanao, Andal Ampatuan Jr., a plaidé non coupable des charges pesant contre lui (41 meurtres). Le clan auquel il appartient et qui est dirigé par son père était, avant l’action du 23 novembre, un important allié de la présidente Arroyo. Celle-ci a reconnu l’existence de cette alliance, pour immédiatement ajouter que ce lien politique n’autorisait pas la famille Ampatuan à régler ses différends politiques par les armes. Depuis, l’armée et la police ont investi les propriétés de la famille, où un millier d’armes lourdes et légères a été saisi. La presse philippine a souligné que l’armée privée du clan des Ampatuan avait vu le jour grâce à une ordonnance signée par la présidente Arroyo en 2006, intitulée Civilian Volunteer Organizations.