Eglises d'Asie

L’archevêque de Nagasaki poursuit son engagement en faveur du désarmement nucléaire

Publié le 26/04/2010




Le 19 avril dernier, Mgr Joseph Mitsuaki Takami, archevêque de Nagasaki et Mgr Michael Goro Matsuura, évêque auxiliaire d’Osaka (et également président du Conseil épiscopal pour la justice et la paix), remettaient au Secrétaire adjoint du gouvernement,Yorihisa Matsuno, une pétition de 16 000 signatures, appelant le gouvernement japonais et l’ensemble des chefs d’Etat de la planète à « unir leurs efforts…

pour franchir une étape décisive en faveur du désarmement nucléaire » voire « pour abolir définitivement l’arme atomique ».

Cette pétition reprenait, dans ses grandes lignes, les mêmes arguments que ceux développés dans la lettre ouverte qui avait été adressée le 26 février dernier par l’archevêque de Nagasaki et l’évêque d’Hiroshima, Mgr Atsumi Misue, au Premier ministre japonais, Yukio Hatoyama, au président américain, Barack Obama, ainsi qu’à d’autres chefs d’Etat. A la veille de la Conférence internationale sur le Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP) qui se déroulera au siège des Nations Unies à New York, du 3 au 28 mai prochains, la pétition se veut très clairement une « piqûre de rappel ».

Afin de renforcer la portée de ce message, Mgr Takami a déclaré qu’il se rendrait lui-même à New York, et y présenterait la statue dite de la « Vierge bombardée » (Bombed Maria). Celle-ci a été découverte après le bombardement nucléaire de Nagasaki du 9 août 1945, dans les ruines de ce qui avait été la cathédrale Sainte-Marie d’Urakami. Seul le buste de la statue de bois sculpté avait été épargné, non sans garder des traces du cataclysme (1).

Pour Mgr Takami, cette « Vierge bombardée » de Nagasaki est la meilleure ambassadrice de paix qui puisse être. « La paix ne peut jamais être créée par la violence (…). Je souhaite que le pèlerinage [de la statue], non seulement fasse connaître à davantage de personnes les souffrances causées par la bombe atomique, mais qu’il soit également un appel à construire la paix par la non-violence ».

Le 21 avril dernier, Mgr Takami était au Vatican, où il a pu s’entretenir avec le pape Benoît XVI, lequel a béni solennellement le buste de la statue, place Saint-Pierre. Après l’Italie, la Bombed Maria partira pour l’Espagne (avec un passage à Barcelone et à Guernica) avant d’être accueillie aux Etats-Unis.

Elle sera présentée aux fidèles à la cathédrale Saint-Patrick à New York, lors d’une messe qui sera célébrée le 2 mai, veille de la conférence sur le TNP aux Nations Unies. Mgr Takami dit espérer ainsi faire comprendre « la tragédie et l’inhumanité de la bombe nucléaire » ainsi que l’importance de « continuer à travailler ensemble [..], non pas sur la base de l’armement, mais par le dialogue et la compréhension mutuelle ».

Il est d’ores et déjà prévu que l’archevêque de Nagasaki rencontre le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, ou du moins son adjoint, afin de lui présenter sa requête. Pour Mgr Takami, ajouter « sa voix à celles de tous ceux qui à travers le monde appellent au désarmement » sans arriver à se faire entendre, fait partie de sa mission « d’archevêque d’une région dévastée par l’arme nucléaire ».

Ce drame de l’histoire récente du Japon a touché de près le prélat, puisqu’il a perdu plusieurs de ses proches dans le bombardement de Nagasaki. L’archevêque lui-même, qui est né en mars 1946 à Nagasaki, peut être considéré comme un survivant in utero, sa mère étant enceinte de lui lors de l’explosion de la bombe atomique.

Dans cette ville du sud-ouest du Japon vivaient à l’époque près des deux tiers de la population catholique du pays, qui fut ainsi pratiquement anéantie en un seul jour. Considérée comme le berceau du christianisme au Japon, Nagasaki reste encore aujourd’hui le symbole de l’Eglise qui a survécu aux persécutions. Dès les premiers temps de l’évangélisation du Japon au XVIe siècle, et malgré les persécutions particulièrement violentes qui s’abattirent à plusieurs reprises sur eux, faisant des milliers de martyrs (2), les chrétiens de la région de Nagasaki avaient réussi à survivre, vivant leur foi dans la clandestinité, reconstruisant inlassablement leur église d’Urakami, dès que la persécution se relâchait. Puis fut construite de 1875 à 1914, la cathédrale Sainte-Marie d’Urakami, qui sera, à l’époque, l’une des plus grandes d’Asie. Totalement détruite par la bombe atomique trente ans plus tard, elle a été reconstruite en 1980, au même endroit (3).