Eglises d'Asie

Les évêques catholiques s’opposent à l’éducation sexuelle dans les écoles primaires

Publié le 07/06/2010




Le 1er juin dernier, Leandro Mendoza, secrétaire exécutif de la présidence des Philippines, a déclaré que le ministère de l’Education avait été prié de se mettre en rapport avec la Conférence des évêques catholiques des Philippines avant d’appliquer un projet pilote concernant l’éducation sexuelle à l’école. Reconnaissant que le ministère de l’Education aurait cependant le dernier mot auprès de bureau du président, …

… il a précisé que la consultation de l’Eglise catholique, qui est une force qui compte dans ce pays très majoritairement catholique, était incontournable.

 

Ce projet d’éducation sexuelle à l’école est très controversé aux Philippines. Il est soutenu par le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) mais décrié par tous les évêques du pays, bien que le secrétaire d’Etat à l’Education leur ait assuré qu’il ne comporterait pas d’informations sur les moyens de contraception (1).

 

Déjà, lors de la campagne électorale pour les présidentielles qui a abouti en mai dernier à l’élection de Benigno ‘Noynoy’ Aquino, fils de la présidente des Philippines Cory Aquino aujourd’hui décédée, les évêques du pays avaient, à de nombreuses reprises, réaffirmé leur point de vue concernant la protection des valeurs morales, invitant les électeurs à ne voter que pour un candidat dont l’adhésion à ces valeurs soit assurée (2). Dans leur « Catéchisme sur la vie et la famille pour les élections 2010 », paru en décembre 2009, les prélats rappelaient qu’afin de « protéger la société d’un afflux de valeurs contraires à la vie et à la famille », ils avaient pour rôle de veiller à « la bonne formation des consciences », notamment en s’opposant au projet de loi sur « la santé reproductive » en discussion devant le Congrès philippin (3).

 

Depuis des années, cette loi fait l’objet de débats agités au sein de la société comme des structures législatives des Philippine. Elle prévoit, entre autres, un financement public obligatoire de tous les moyens de contraception et des centres de santé qui y sont rattachés, ainsi que l’obligation pour tous les établissements scolaires publics comme privés (catholiques compris) d’enseigner l’éducation sexuelle à partir de la classe de CM2 (fifth grade).

 

Bien que le projet de loi soit toujours en discussion – et a même été tout récemment ajourné dans l’attente de la passation de pouvoir entre Gloria Arroyo et Noynoy Aquino –, le ministère de l’Education a décidé de tester les programmes d’éducation sexuelle, en les intégrant aux matières déjà existantes dont les sciences et la santé, l’anglais et l’éducation physique. Le projet pilote devrait démarrer sous peu dans 80 écoles élémentaires (à partir de 11-12 ans, CM2) et 79 collèges.

 

Selon la plupart des responsables de l’Eglise catholique qui s’opposent à ce nouveau programme, l’enseignement de l’éducation sexuelle dans les établissements scolaires pourrait encourager les adolescents à flirter et même à avoir des relations sexuelles.

 

D’autres, comme le P. Conegundo Garganta, de la Commission pour la jeunesse de la Conférence des évêques catholiques des Philippines, font remarquer que ces flirts sont inévitables en raison de l’environnement ambiant dans lequel évoluent les jeunes et de l’influence d’Internet, que l’éducation sexuelle soit enseignée à l’école ou pas. Le prêtre a cependant émis le souhait que cette matière ne soit pas enseignée aux élèves avant l’âge de 17 ans, voire davantage (4).

 

Le nouveau président des Philippines, Benigno Aquino III, qui recevra officiellement l’investiture le 30 juin prochain, avait montré quelques réticences à l’égard du projet de loi sur la santé reproductive lors de la campagne présidentielle, alors qu’il avait été auparavant l’un de ses partisans les plus engagés. Il avait cependant maintenu qu’il considérait comme nécessaire de donner la possibilité de choisir (y compris la contraception) à tous les Philippins.

 

Depuis l’élection de Noynoy Aquino, l’Eglise catholique craint donc que le nouveau président, une fois installé dans ses fonctions, ne donne un coup d’accélérateur à la loi en faveur de laquelle il s’était si fréquemment prononcé. Certains responsables des Eglises protestantes ont fait part récemment de leur soutien à la loi sur la santé reproductive. The United Church of Christ in the Philippines (UCCP) (5), par la voix de son secrétaire sortant, Mgr Eliezer Pascua, a déclaré le 26 mai dernier lors d’une assemblée générale à Dumaguete : « Nous plaidons depuis longtemps en faveur d’un planning familial et d’une régulation des naissances responsable. »

 

La réponse de l’Eglise catholique ne s’est pas fait attendre. « Quand bien même la loi emporterait le soutien de l’Eglise, quand bien même les sondages montrerait que la plupart des catholiques y seraient favorables, elle n’en resterait pas moins un mal », a affirmé Monseigneur Gamaliel Tulabing, du diocèse de Dumaguete, précisant que l’Eglise promouvait les méthodes de régulation naturelle des naissances.