Eglises d'Asie – Inde
A Calcutta, les missionnaires de la Charité célèbrent le jour anniversaire de la naissance de Mère Teresa
Publié le 30/08/2010
Le Cardinal Telesphore Toppo, évêque de Ranchi et président de la Conférence des évêques catholiques de l’Inde (CBCI), a présidé la cérémonie et concélébré la messe avec Mgr Lucas Sirkar, Mgr Henry D’Souza, respectivement actuel et ancien archevêques de Calcutta, Mgr Salvadore Lobo, évêque de Baruipur (1), et une soixantaine de prêtres, dont le P. Brian Kolodiejchuk, Père Missionnaire de la Charité et postulateur de la cause en canonisation de Mère Teresa.
La célébration, d’une durée de deux heures, a débuté à 6 h 30, selon la règle des Missionnaires de la Charité (M.C), qui ne commencent leur journée de travail auprès des plus démunis qu’après avoir participé à l’eucharistie. Une foule importante s’était également massée à l’extérieur de la chapelle (qui ne pouvait accueillir qu’un millier de personnes, uniquement sur invitation), mêlant toutes les couches de la société, castes et religions : familles venues des slums, religieux chrétiens, hindous fortunés, sikhs vendeurs des rues, volontaires travaillant dans les centres des M.C, accompagnant même parfois des malades venus rendre hommage à « Mataji » (Mère). L’actuelle supérieure des M. C, Sr Mary Prema, ainsi que Sr Nirmala à laquelle elle a succédé, ont évoqué leur fondatrice et lancé officiellement les célébrations du centenaire de Mère Teresa dont « la vie et l’ oeuvre continuent d’être une source d’inspiration pour tous (…), quels que soient leurs horizons culturels et religieux ».
Dans son homélie, Mgr Toppo a insisté sur le message que la religieuse a laissé au monde : « être l’instrument de l’amour de Dieu ». Il a également lu un message du pape Benoît XVI dans lequel ce dernier faisait part de « sa confiance dans le fait que cette année sera pour l’Eglise et pour le monde, une occasion de rendre grâces à Dieu pour le don inestimable que Mère Teresa a été au cours de sa vie et continue d’être à travers le travail plein d’amour et inlassable [des Missionnaires de la Charité] qui [sont] ses enfants spirituels ». (…)
Après un lâcher de ballons et de colombes dans la cour de la maison-mère, les novices de la congrégation ont chanté « happy birthday ! » sur la tombe de la Bienheureuse, concluant gaiement par « May you soon be a saint !». Les fidèles ont ensuite déposé des guirlandes de fleurs sur la tombe de Mère Teresa ainsi que des bougies et de petites lampes à huile.
La ville de Calcutta a tenu de son côté à célébrer de façon officielle l’anniversaire de naissance de « sa » sainte. Pour l’occasion, les officiels ont fait garnir de colliers de fleurs et de guirlandes lumineuses la statue de bronze de Mère Teresa qui se dresse désormais sur l’une des artères les plus prisées de Calcutta, anciennement Park Street, dont le nom a été changé en 2004 pour devenir Mother Teresa Sarani. Au soir du 26 août, a été également donné le signal du départ du train-exposition baptisé « Mother Express », qui sillonnera l’Inde en présentant la vie de mère Teresa pendant les six prochains mois. Entre autres manifestations, festivals du film, colloques, et évènements culturels, le gouvernement indien a également prévu une cérémonie nationale en présence du chef de l’Etat Partibha Patil, à New Delhi le 28 août prochain, et a d’ores et déjà proclamé le jour de naissance de la religieuse, « journée nationale des orphelins », en hommage à son action en faveur de l’enfance abandonnée.
Si l’Inde aujourd’hui considère Mère Teresa comme une part de son héritage et l’une des figures avec Gandhi, qui peut transcender les religions et les cultures, il n’en a pas toujours été ainsi. A ses débuts, la religieuse en sari blanc bordé de bleu s’était heurtée à de fortes oppositions, en particulier de la part des hindous traditionalistes, pour lesquels les soins qu’elle donnait aux mourants, aux dalit (intouchables) et à des personnes considérées comme impures, représentaient une offense aux lois religieuses. Ils sont cependant aujourd’hui nombreux à l’avoir intégrée dans leur panthéon et il n’est pas rare de voir, surtout à Calcutta, l’image de Mère Teresa enguirlandée de fleurs, aux côtés de celles de Vishnou ou de Kali la Noire, la déesse tutélaire de la ville. Les musulmans bengalis ont quant à eux pour habitude de désigner la Mother sous le nom de Zinda Pir (« sainte vivante », en ourdou).
Mère Teresa, née Ganxhe Bojaxhiu, entra chez les soeurs de Lorette à 18 ans, et fut envoyée en Inde en 1929 où elle prit le nom de Sr Teresa. Elle travailla tout d’abord dans un dispensaire avant d’enseigner au prestigieux Collège St Mary de Calcutta. Le 10 septembre 1946, elle reçoit « l’appel dans l’appel », fêté par les M.C comme l’Inspiration Day, où Dieu lui demande de se consacrer totalement à lui dans le service des « plus pauvres d’entre les pauvres » (2). En 1948, après avoir obtenu l’autorisation de quitter son ordre, elle rejoint les déshérités de Calcutta, suivie par quelques anciennes élèves. Sa congrégation est approuvée en 1950 et dès 1952, elle fonde le mouroir de Nirmal Hriday (Maison du Coeur Pur) dans le quartier de Kalighat, à l’ombre du temple de Kali. La religieuse dont l’ordre ne cesse de croître, crée de nouveaux centres d’accueil : pour les enfants des rues et les orphelins, les lépreux, les sidéens et tout ceux dans lesquels elle voit le Christ lui demandant « d’étancher sa soif d’amour ».
En 1979, elle reçoit le prix Nobel de la Paix. Les fondations se multiplient dans toute l’Inde puis dans de nombreux pays, tandis que naissent les différentes branches issues de l’arbre des Missionnaires de la Charité (3).Lorsque Mère Teresa meurt le 5 septembre 1997 à l’âge de 87 ans, le gouvernement indien organise des funérailles nationales. La religieuse est béatifiée en 2003 par le pape Jean-Paul II, soit six ans après sa mort, un record dans l’histoire des béatifications au sein de l’Eglise catholique.
Partout dans le monde, l’anniversaire de la naissance de Mère Teresa a donné lieu à des cérémonies et manifestations diverses, qui se poursuivront jusqu’au 26 août 2011, date de la clôture du centenaire. Les Etats des Balkans qui se disputent avec l’Inde (la religieuse est devenue citoyenne indienne en 1951) l’héritage de la Mother, ont tenu à marquer tout particulièrement le jour anniversaire de la célèbre Albanaise. Pélerinages, messes solennelles, mais aussi cérémonies officielles, ont alterné à Skopje, lieu de naissance de Ganxhe Bojaxhiu, comme dans les sanctuaires d’Albanie, patrie de sa famille, ou encore au Kosovo qui a décrété une « année mère Teresa ».