Eglises d'Asie

Le surplus de naissances masculines vient menacer l’équilibre démographique du Vietnam

Publié le 29/10/2010




Les résultats du recensement du 1er avril 2009, publiés au mois d’août dernier montraient que le déséquilibre démographique en défaveur des femmes, traditionnel au Vietnam, subsistait encore (1). Au 1er avril 2009, les femmes représentaient 50,6 % de la population globale pour 49,4 % d’hommes. Mais le dernier « rapport sur l’état de la population dans le monde »…

… que vient de faire connaître le Fonds des Nations Unies pour la population dans le monde (2) souligne avec force qu’une autre tendance est désormais à l’œuvre. Si l’on tient compte des naissances de ces dernières années, le déséquilibre va très rapidement s’inverser. Les spécialistes assurent même qu’il pourrait avoir de très fâcheuses conséquences sur l’avenir démographique du pays.

Le dernier rapport du Fonds des Nations Unies pour la population dans le monde montre en effet que, pour les naissances de l’année 2010, la proportion a été de 110,6 enfants de sexe masculin pour 100 enfants de sexe féminin. Cette proportion est qualifiée de « déséquilibrée » par les spécialistes en démographie qui invitent le gouvernement à prendre rapidement des mesures susceptible de régulariser la croissance démographique. Selon eux, la cote d’alerte est franchie lorsque le nombre moyen des garçons dépasse 104-106 pour 100 filles. Certaines régions sont plus marquées que d’autres par ce déséquilibre ; c’est le cas par exemple des plaines du fleuve Rouge, dans les provinces de Hai Duong, Bac Ninh ou encore Hung Yen où la proportion est de 130 garçons pour 100 filles.

Les démographes relèvent encore que ce choix volontaire d’un enfant de sexe mâle par les couples apparaît dès la première ou la deuxième naissance, mais elle est encore plus manifeste dans les naissances qui suivent. Le rapport note que, pour les premières naissances, la proportion moyenne des garçons est de 110 pour 100 filles. Elle passe à 115 lors de la troisième naissance.

Les possibilités données aujourd’hui au couple de connaître de très bonne heure le sexe du fœtus, associées aux contraintes du contrôle des naissances mis en place par l’Etat, ont favorisé ce déséquilibre. Conscient du danger, le Comité national de la démographie et du planning familial essaie, depuis 2001, de trouver des mesures capables de freiner cette tendance. A cette époque, une loi interdisant la détermination du sexe lors de la grossesse a été proposée à l’Assemblée nationale. La loi est aujourd’hui en vigueur mais reste apparemment sans effet.

La préférence accordée au sexe masculin a certainement son origine dans la conception traditionnelle de la famille au Vietnam et l’influence très forte encore du confucianisme culturel. Seul l’enfant mâle peut perpétuer la tradition familiale et entretenir le culte des ancêtres. Le reflux actuel, pour ne pas dire la quasi-disparition de l’idéologie marxiste-léniniste, a favorisé le retour en force de certaines conceptions traditionnelles de la société. Une raison également puissante de la préférence des couples pour un enfant de sexe masculin est d’ordre économique. Dans une société encore en majorité paysanne, où les pensions de retraite et les assurances sociales n’existent pas, ce sont les garçons, les aînés, qui assureront la subsistance des parents, les filles suivant leur époux dans leurs belles-familles.

Quoi qu’il en soit des motifs de ce phénomène qui n’a cessé de s’aggraver au cours des cinq dernières années, il risque bien, s’il se prolonge, de priver de femmes de très nombreux jeunes Vietnamiens. A ce rythme, avait fait remarquer le Vice-Premier ministre Nguyên Thiên Nhân, en 2030, environ 3 millions de Vietnamiens ne pourront fonder de foyer avec une femme de leur pays.