Eglises d'Asie

Des responsables religieux font pression sur le gouvernement sud-coréen pour que soit rétablie l’aide alimentaire à la Corée du Nord

Publié le 25/05/2011




Le 23 mai dernier, une trentaine de responsables d’organisations civiles et religieuses ont tenu une conférence de presse à Séoul pour demander à leur gouvernement de reprendre l’aide alimentaire à la Corée du Nord. « Des millions de Nord-Coréens souffrent actuellement de la faim. Nous souhaitons leur faire parvenir 5 000 tonnes de farine, un don qui a été financé par les contributions de citoyens », peut-on lire dans le communiqué commun, …

… qui demande également aux autorités sud-coréennes de faciliter les visites au Nord des groupes et ONG sud-coréennes désireux de venir en aide aux populations nord-coréennes.

Les pressions sur le gouvernement sud-coréen s’accumulent depuis plusieurs mois afin que reprenne l’aide alimentaire à la Corée du Nord, quasi interrompue en 2008 (1). En avril dernier, le groupe plurireligieux « Solidarité des religions pour la réconciliation et la paix en Corée » présentait une pétition pour réclamer cette reprise de l’aide au Nord. Réunissant des responsables religieux issus du bouddhisme, du bouddhisme Won, du Cheondo-gyo (2) ainsi que du protestantisme et du catholicisme, le groupe mettait, là aussi, en avant l’urgence à venir en aide à une population nord-coréenne en proie, de nouveau, à une situation de disette, voire de famine.

A Séoul, le président Lee Myung-bak, qui depuis son accession au pouvoir en 2008 a mis fin à « la politique de la main tendue » mise en œuvre par ses prédécesseurs, ne se montre pas désireux de céder à ces pressions. Les incidents meurtriers de l’année dernière (46 morts lors du naufrage de la corvette sud-coréenne Cheonan en mars 2010 et 4 morts lors du bombardement de l’île sud-coréenne de Yongpyong en novembre 2010) ainsi que l’enlisement des pourparlers sur le nucléaire ne traduisent pas, selon lui, une amélioration des tensions dans la péninsule. Dans ce cadre, une reprise de l’aide alimentaire à la Corée du Nord ne servirait qu’à renforcer le régime nord-coréen, peut-être fragilisé par une transition dynastique incertaine, et cette aide risquerait d’être détournée par Pyongyang en vue des distributions de nourriture qui auront très certainement lieu en 2012 lors du 100ème anniversaire de la naissance du « grand leader » Kim Il-sung.

Sur la scène internationale, les pressions s’intensifient toutefois pour que l’aide alimentaire retrouve une grande ampleur en Corée du Nord. En mars dernier, le Programme alimentaire mondial (PAM) a rendu public un plan d’aide de 200 millions de dollars visant à subvenir aux besoins alimentaires de 3,5 millions de Nord-Coréens. L’Unicef a lancé un appel pour une assistance de 20 millions de dollars. Mais les principaux bailleurs de fonds que sont les Etats-Unis et la Corée du Sud pour ce type de programmes se montrent réticents à les financer.

Pour certains acteurs de la scène humanitaire en Corée du Sud, la situation alimentaire n’est pas aussi catastrophique que l’a annoncé la Corée du Nord et elle ne peut être comparée à la famine des années 1990, qui avait fait entre 600 000 et un million de morts. Ha Tae-kyung, président de l’ONG Open Radio for North Korea, affirme ainsi que les enquêteurs du PAM ont été abusés par Pyongyang : « Le riz et le maïs ont été enlevés des maisons visitées. Le régime fait croire qu’il n’y a plus de nourriture » (3). Le PAM maintient néanmoins son analyse quant au caractère alarmant des pénuries alimentaires en Corée du Nord et cite le chiffre de six millions de personnes potentiellement en danger.

Dans ce contexte, les résultats de la visite qu’a entamée hier, 24 mai, Robert King en Corée du Nord seront certainement décisifs. Haut fonctionnaire du département d’Etat, chef du bureau chargé des droits de l’homme en Corée du Nord, Robert King et des responsables d’USAID ont reçu de Pyongyang l’assurance de pouvoir se déplacer en dehors de la capitale nord-coréenne durant les cinq jours de leur visite dans le pays. A l’issue de son déplacement, le diplomate américain remettra un rapport à ses supérieurs, l’administration Obama devant alors décider si elle reprend on non une aide alimentaire massive à la Corée du Nord.