Eglises d'Asie

Le nouveau responsable de l’Eglise catholique syro-malabare lance une année de la mission sous le signe de l’unité

Publié le 07/06/2011




Mar George Alencherry, installé il y a quelques jours archevêque majeur d’Ernakulam-Angalmy et désormais chef de l’Eglise catholique de rite oriental syro-malabare, a inauguré son nouveau mandat en lançant une année de la mission sous le signe du « dialogue et de l’unité » …

… le 2 juin dernier, jeudi de l’Ascension.

 

Entouré des coordinateurs du projet venus des différentes éparchies (divisions ecclésiastiques de l’Eglise syro-malabare), des responsables de nombreux instituts de vie consacrée et de sociétés de vie apostolique, il a dévoilé le logo de l’année missionnaire 2011-2012, tout en rappelant que sa devise épiscopale était « au service de la vérité et de l’amour par le dialogue ».

Cette volonté de donner une nouvelle impulsion à l’oecuménisme avait été clairement annoncée par le prélat dès son installation le 29 mai dernier à la basilique Sainte-Marie à Cochin (Ernakulam). Entouré du nonce apostolique, Mgr Pennacchio, du cardinal Telesphore P. Toppo, président de la Conférence des évêques catholiques de l’Inde (CBCI), du cardinal Sandri, préfet de la Congrégation vaticane pour les Eglises orientales, et devant un auditoire d’évêques catholiques de rite latin, syro-malabar, et de représentants de l’Eglise orthodoxe, Mar Alencherry, avait déclaré que ses « priorités seraient de construire la communion au sein de l’Eglise catholique, de collaborer avec les autres Eglises chrétiennes et de développer le dialogue avec les autres religions ».

Le nouvel archevêque majeur avait invité les trois Eglises catholiques en Inde de rites latin, syro-malabar et syro-malankar (1), à « oublier les rivalités passées » et à « travailler ensemble à l’unité », ajoutant que si elles « avaient peut-être été en compétition les unes avec les autres », il était temps « d’accueillir le pardon de Dieu (…) et de se tourner vers l’avenir avec espoir ». Le nouveau dirigeant de l’Eglise syro-malabare avait lancé le même appel à sa propre communauté, dont il avait souligné les divisions internes sur des questions liturgiques ou même administratives (2).

Selon la tradition, l’Eglise syro-malabare a été fondée au Ier siècle par l’apôtre saint Thomas qui aborda l’Inde par sa côte sud-ouest, le Malabar. Cette Eglise catholique de rite oriental compte aujourd’hui plus de 3,7 millions de fidèles dont la très grande majorité se trouve au Kerala, son foyer historique. Il existe actuellement cinq archidiocèses syro-malabars (tous en Inde) et 29 diocèses établis principalement au Kerala mais aussi dans d’autres Etats de l’Inde, et pour l’un d’entre eux aux Etats-Unis (éparchie Saint-Thomas de Chicago) (3).

Depuis qu’en 1992, le pape Jean Paul II a élevé l’Eglise syro-malabare au rang d’Eglise archiépiscopale majeure, l’archidiocèse d’Ernakulam-Angamaly est devenu le siège de l’archevêque métropolite, lui-même à la tête de la communauté. Lorsque son dernier titulaire, le cardinal Varkey Vithayathil est décédé le 1er avril 2011 à l’âge de 83 ans, le choix du nouvel archevêque majeur de l’Eglise syro-malabare a donné lieu à un événement d’une grande portée historique. C’est en effet par un synode rassemblant ses différents responsables que l’Eglise syro-malabare, rompant avec des siècles de nomination des évêques par Rome, a élu son dirigeant, Mar George Alencherry, le 24 mai dernier à Cochin, élection qui a été officiellement confirmée le 26 mai par Benoit XVI.

Cette nouvelle étape dans l’histoire de l’Eglise syro-malabare est le fruit d’un long travail de plusieurs dizaines d’années entre la communauté catholique de rite oriental et le Saint-Siège. En janvier 2004, Rome donnait en effet l’autorisation au Synode syro-malabar d’élire ses propres évêques dans l’Etat du Kerala. Cette décision était très attendue par l’Eglise de rite oriental qui réclamait depuis longtemps une autonomie plus grande vis-à-vis de Rome. Toutefois cette autorisation ne concerne que les juridictions ecclésiastiques au Kerala et ne s’applique pas aux diocèses établis dans d’autres territoires où les évêques syro-malabars dépendent de la juridiction de l’archevêque local de rite latin (tout en restant sous l’autorité spirituelle et liturgique de leur archevêque majeur d’Ernakulam-Angamaly).

Le chevauchement des territoires ecclésiastiques des deux rites rendant complexe l’exercice de la pastorale et donnant lieu à des querelles récurrentes, les évêques syro-malabars en visite ad limina en avril dernier à Rome ont à nouveau demandé à Benoît XVI que l’autorité accordée sur leurs juridictions au Kerala puisse être étendue à toute l’Inde, ainsi qu’aux pays où les fidèles syro-malabars sont aujourd’hui nombreux, comme la région du Golfe persique, l’Europe ou encore l’Australie. De plus, ont affirmé les prélats, leur Eglise est l’objet de discriminations de la part des représentants locaux de l’Eglise latine, comme le fait que « les autres chrétiens et les autres religions jouissent de la liberté de construire des églises et des bâtiments partout en Inde », mais que les Eglises orientales catholiques “en soint exclues, paradoxalement non par l’Etat, mais par leur propre institution ecclésiale ».

Quoi qu’il en soit, selon les observateurs de la question religieuse en Inde, le nouvel archevêque majeur semble être « l’homme de dialogue qu’il fallait à l’Eglise syro-malabare ». Agé aujourd’hui de 66 ans, Mar George Alencherry, originaire du Kerala, a été secrétaire de l’archevêque de Changanacherry, le futur cardinal Antony Padiyara. Après avoir perfectionné sa formation à l’Institut catholique de Paris, il a été nommé à son retour responsable du centre catéchétique de Changanacherry puis directeur du Centre interrituel d’orientation pastorale, dépendant de la Conférence des évêques catholiques du Kerala. Nommé vicaire général du diocèse de Changanacherry, il a été élevé à l’épiscopat pour le diocèse de Thuckalay récemment créé, avant de devenir en mai dernier le premier archevêque majeur élu de l’Eglise syro-malabare (4).