Eglises d'Asie

Nouvelle mobilisation de l’Eglise catholique contre le projet des Quatre fleuves

Publié le 22/06/2011




 Le 21 juin dernier, l’Eglise catholique a sommé le gouvernement sud-coréen de stopper immédiatement les travaux entrepris dans le cadre du projet de « réaménagement des quatre fleuves » (1), avant que ne commence la saison des pluies, imminente en cette fin de juin. Cette injonction a été faite à l’occasion d’une messe organisée par…

 … The Catholic Solidarity for Deterrence of Four Major Rivers Project à l’église de Yeoju, dans le diocèse de Suwon, près du fleuve Hangang (Han). Présidée par Mgr Matthias Ri Iong-hoon, président du Comité ‘Justice et Paix’ de la Conférences des évêques catholiques de Corée du Sud, la célébration a rassemblé quelque 1 500 catholiques, rapporte l’agence Ucanews (2).

Différents sondages indiquent que plus de 70 % de la population sud-coréenne serait opposée aux travaux entrepris par le gouvernement de Lee Myung-bak, pour « réhabiliter » les quatre principaux fleuves de Corée du Sud (le Han, le Nakdong, le Geum (Kum) et le Yeongsan (Yongsam)), dont le coût est estimé à 22 trillions de wons (13 milliards d’euros). Les détracteurs du projet, dont font partie massivement les Eglises chrétiennes, les responsables des principales religions de Corée et plusieurs centaines de mouvements citoyens, dénoncent l’impact destructeur et irréversible qu’auront ces travaux sur la faune et de la flore des fleuves et accusent le président de favoriser les intérêts financiers des entreprises chargées du réaménagement des cours d’eau. De son côté, le gouvernement affirme que le dragage et l’aménagement du lit des fleuves ainsi que la construction de plusieurs de barrages (équipés de centrales hydroélectriques) n’ont pour but que de dépolluer les rivières, assurer une meilleure distribution de l’eau et gérer le débit des fleuves, tout en créant des espaces verts et de loisirs sur les berges.

Florentius Kim Jae-uk, secrétaire général de Catholic Solidarity, explique : « Nous nous devons de faire prendre conscience à tous les catholiques des dangers de ce projet des Quatre fleuves qui seront décuplés avec l’arrivée de la mousson. » Alors que le projet est présenté officiellement comme le moyen de prévenir les variations de débit des fleuves et empêcher les inondations ou le manque d’eau, les nouveaux aménagements des berges n’ont pas résisté aux très légères pluies de printemps, privant d’eau courante des dizaines de milliers de riverains en mai dernier, rapporte le mouvement catholique. Dans une déclaration publiée à l’issue de la célébration du 21 juin, Catholic Solidarity a mis en garde le gouvernement, lui demandant « de stopper le dragage du lit des fleuves, afin de réduire les dégâts causés par les inondations ».

Cette déclaration est loin d’être la première sommation faite au gouvernement. Toutefois, bien que, depuis le lancement des travaux en 2009, se soient succédées de très nombreuses manifestations d’opposition, pétitions, déclarations (dont l’une en 2010, demandant la démission de Lee Myung-bak), grèves de la faim et même l’immolation d’un moine bouddhiste en mai 2009 sur les rives du fleuve Nakdong (3), le gouvernement poursuit son projet controversé.

Dès les prémices du projet, l’Eglise catholique de Corée du Sud, très engagée dans les questions sociales, les droits de l’homme et la défense de l’environnement, avait lancé de nombreuses actions, rejoignant les quelque 400 associations écologistes opposées au programme gouvernemental. Elle avait ensuite rapidement rallié les principales religions à sa cause, unissant pour la première fois dans l’histoire du pays, catholiques, protestants, bouddhistes (avec l’ordre Jogye), adeptes du bouddhisme-won, dans un combat commun, multipliant les célébrations interreligieuses, manifestations et messes devant les fleuves sud-coréens.

Ces « messes pour la vie et pour la paix », initiées par The Catholic Solidarity for Deterrence of Four Major Rivers Project, se poursuivent sans interruption depuis février 2010, des prêtres et des évêques se relayant chaque jour pour une célébration en plein air sur les rives des différents fleuves et cours d’eau menacés (4).