Eglises d'Asie – Indonésie
Moluques : appels au calme après la flambée de violence du dimanche 11 septembre
Publié le 13/09/2011
A Amboine, chef-lieu de la province des Moluques, deux jours après l’incident, la tension était retombée, les autorités ayant procédé à un important déploiement de forces de l’ordre (y compris des blindés légers), mais la population était encore sous le choc. En effet, mis à part des incidents isolés, ces dernières années avaient été calmes. Les événements du dimanche 11 septembre ont donc surpris : ce jour-là, un conducteur de moto-taxi, Darfin Saimen, de confession musulmane, a trouvé la mort dans le crash de sa moto contre un mur. Très rapidement, une rumeur propagée par SMS a fait état de la responsabilité de chrétiens dans la mort de ce musulman, évoquant des actes de torture. Des violences ont ensuite éclaté, mettant aux prises chrétiens et musulmans, qui, depuis les évènements des années 1999-2002, vivent dans des quartiers séparés. Selon la presse locale, la police a tardé à intervenir avant de le faire avec brutalité, les brigades de maintien de l’ordre étant responsables d’au moins deux des sept morts recensés. En outre, plusieurs dizaines de personnes ont été blessées et quelques centaines d’autres ont dû fuir leurs habitations.
Dans un communiqué commun diffusé le surlendemain des émeutes, des responsables religieux et des dirigeants d’ONG aux Moluques ont appelé au calme, demandant à tous de préserver la paix en maintenant la légalité, la transparence d’action des autorités, l’impartialité des forces de l’ordre et le dialogue entre les religions. « Nous soutenons les aspirations de la population [à vivre en paix] et les entreprises des responsables interreligieux à éteindre le conflit. Ce sont des initiatives très importantes pour créer une atmosphère de paix à Amboine », pouvait-on lire dans le texte rédigé en collaboration avec le P. Benny Susetyo, secrétaire de la Commission pour l’œcuménisme et le dialogue interreligieux de la Conférence des évêques catholiques d’Indonésie. Dans ce message diffusé dans les églises, les mosquées et les écoles d’Amboine, il était aussi précisé que « la maturité des habitants d’Amboine » était appréciée, notamment dans leur recherche d’une solution qui passe par « le dialogue » et « la rencontre ». « Nous soutenons tout effort visant à renforcer le Pela Gandong (le lien), qui est une valeur commune à tous les habitants des Moluques, sans distinction d’appartenance religieuse », était-il encore écrit, les signataires appelant le gouvernement local à se montrer plus efficace dans la recherche d’une réconciliation durable entre les communautés. Mgr Mandagi, évêque du diocèse catholique d’Amboine (1), le Rév. John Ruhulesin, président du Synode de l’Eglise protestante des Moluques, Hie Toekanm, président du Conseil des oulémas d’Indonésie aux Moluques, ainsi qu’Idris Latuconsina, président du Forum pour l’harmonie interreligieuse, figurent parmi les personnalités signataires du communiqué.
Sur place, aucune analyse convaincante n’a émergé pour expliquer cette soudaine flambée de violence. La police se contente d’évoquer « des factions bien connues », et se refuse à caractériser leur appartenance confessionnelle. Les autorités civiles comme religieuses ont demandé à la population de signaler immédiatement la présence de « provocateurs étrangers à la province ». A Djakarta, un forum interreligieux a appelé le gouvernement central à « appliquer les accords de Malino », qui avaient mis fin au conflit des Moluques en 2002.
Dans le Jakarta Post du 13 septembre, un éditorialiste a rappelé qu’il y a quelques mois, un analyste soulignait, lors d’une conférence consacré au pluralisme en Indonésie, que la ségrégation des communautés chrétiennes et musulmans à Amboine (depuis le conflit des années 1999-2002), si elle avait alors permis un retour au calme, était en soi porteuse de dangers futurs. « Les efforts du gouvernement pour la réconciliation des groupes qui se sont faits la guerre à Amboine en 1999 méritent le respect, mais la récente explosion de violence que nous venons de vivre doit nous indiquer que la ségrégation, pour efficace qu’elle puisse être à court terme, n’est pas une recette pour la prévention des conflits », pouvait-on lire dans le quotidien anglophone (2).