Eglises d'Asie

Crise alimentaire : le réseau Caritas lance un appel à l’aide

Publié le 04/01/2012




Caritas Internationalis a appelé la communauté internationale à intervenir d’urgence pour venir en aide à la population nord-coréenne, frappée par une grave crise alimentaire.Alors que l’attention de la planète est encore concentrée sur les conséquences de la mort du « Cher Leader » Kim Jong-il et le processus de transmission dynastique du pouvoir au profit de son fils Kim Jong-un, Caritas Internationalis a lancé un appel à l’aide à l’attention de la communauté internationale, la pressant de ne pas ignorer la situation de pénurie alimentaire aiguë qui frappe la population nord-coréenne… 

Le 21 décembre dernier, Michel Roy, secrétaire général de Caritas Internationalis, a alerté les médias sur la crise humanitaire en Corée du Nord : « Le message qui parvient de l’intérieur du pays est que les Nord-Coréens ont un besoin urgent d’aide alimentaire. La malnutrition qui sévit parmi les enfants, les femmes enceintes et les personnes âgées a rendu ces personnes si faibles que la moindre difficulté, le moindre événement auront des répercussions dramatiques. C’est un impératif humanitaire que d’aider  la population nord-coréenne sans qu’elle soit otage des enjeux géopolitiques ».

A l’automne dernier, une mission conjointe de la FAO et du Programme alimentaire mondial (PAM) avait déjà tiré la sonnette d’alarme : « Même si les récoltes de 2011 devaient être supérieures d’environ 8,5 % à celles de l’année précédente, le pays afficherait encore des besoins d’importations céréalières de 739 000 tonnes. » Une étude menée sur place révélait que seulement 6 % des foyers nord-coréens bénéficiaient d’un apport alimentaire acceptable. Il était estimé que sur les 24 millions d’habitants de la Corée du Nord, 3 à 6 millions avaient besoin de recevoir d’une aide alimentaire urgente.

Un hiver très rigoureux, puis des inondations inhabituelles pendant l’été ont rendu très difficile la période de soudure et aggravé l’état de pénurie alimentaire déjà endémique dans le pays. « La situation, qui s’est améliorée avec la nouvelle récolte, reste néanmoins précaire », constate Arif Husain, de l’Unité d’analyse de la sécurité alimentaire du PAM à Rome.

Le régime nord-coréen ne semble pas en mesure de faire face par lui-même aux besoins annoncés. Si la production intérieure a augmenté, les capacités de transport à l’intérieur du pays semblent faire toujours défaut. La FAO indique également que les achats de produits alimentaires à l’étranger de Pyongyang sont en baisse cette année.

Mais la communauté internationale semble s’être lassée d’un régime qui n’autorise aucune transparence sur la distribution de l’aide sur le terrain. Le PAM avait ainsi lancé en 2011 un appel pour 300 000 tonnes de produits de base, mais les promesses des Etats n’avaient pas dépassé les 100 000 tonnes et seule une partie de ce montant avait été effectivement livrée. Quant à la Chine, si elle demeure l’un des derniers soutiens du régime, elle garde confidentiel le montant de son aide alimentaire à la Corée du Nord.

En décembre dernier, Michel Roy était à Séoul pour discuter de la situation nord-coréenne avec Caritas Korea. Face à l’ampleur des besoins et l’impossibilité pour elle de fournir les centaines de milliers de tonnes nécessaires, l’association caritative catholique a rappelé que son action, menée depuis plusieurs années, suit les priorités définies par le rapport commun FAO/PAM. Outre une aide d’urgence, les deux agences onusiennes avaient en effet recommandé de fournir des semences de blé, d’orge et de pommes de terre pour les semis de l’hiver 2011 et du printemps 2012, ainsi que des bâches en plastique pour protéger les cultures d’avril à juin. Or, avec le soutien financier de Caritas Internationalis et de catholiques sud-coréens, Caritas Korea construit un laboratoire à Pyongyang afin de produire des semences de pommes de terre exemptes de tout germe ou champignon. D’autres programmes visent à fournir médicaments et équipements à des hôpitaux ainsi qu’à vacciner les enfants en bas âge ou à équiper des jardins d’enfants.

En dépit des critiques que peut susciter le fait de fournir une aide à Pyongyang, dont le risque d’un renforcement du régime totalitaire, les catholiques sud-coréens se sont montrés généreux en 2011 pour financer ces programmes. En juin dernier, une opération spéciale, avec la célébration d’une messe, a été menée pour financer un convoi de 100 tonnes de farine et de nouilles instantanées au profit d’une maternité et d’un hôpital nord-coréens. Un autre convoi a permis l’acheminement d’aide pour les jeunes enfants. De plus, l’équivalent de 105 000 dollars US en matériel médical a été envoyé à l’hôpital populaire Gang-Nam, dans la province de Hwanghae Nord.

En lien avec le PAM, la Caritas participe également à un programme ‘travail contre nourriture’ : des Nord-Coréens reçoivent deux kilo de farine par jour pour un travail de prévention des inondations et d’amélioration de la production agricole.

Dans un pays où il est impossible de recouper les informations, il reste cependant certain que depuis la famine qui a fait entre 600 000 et un million de morts entre 1995 et 1999, le pays continue de souffrir de pénurie alimentaire chronique (1). Si à Pyongyang, capitale vitrine, les habitants paraissent correctement alimentés, le système de distribution centralisé de la nourriture ailleurs dans le pays ne peut répondre aux besoins de la population. Les embryons de libéralisation du système de production agricole paraissent modestes et les marchés privés ou le marché noir ne peuvent s’y substituer. Selon le PAM, le prix d’un kilo de riz dépasse désormais le salaire mensuel moyen.