Eglises d'Asie – Inde
Cimetière vandalisé au Gujarat : les chrétiens demandent la démission du chef de l’Etat
Publié le 02/02/2012
Le Conseil pan-chrétien indien (All India Christian Council, AICC) pour le Gujarat a dénoncé vigoureusement, le 1er février, l’« acte barbare et choquant » qui s’est produit au cimetière chrétien de Sabarmati, où les tombes ont été détruites et profanées à coup de bulldozers et la presque totalité du site rasée pour faire place à un parking.
Ce cimetière, qui date de l’ère britannique, avait la particularité d’être œcuménique, ayant été concédé à sept Eglises chrétiennes (catholique, Eglise de l’Inde du Nord (CNI), Eglises méthodistes, pentecôtistes).
Selon les témoins qui ont assisté à la scène, le jeudi 26 janvier, des ouvriers sont arrivés aux environs de 19 h 00 avec des bulldozers et plusieurs camions. Ils ont ensuite commencé à raser les sépultures et les éléments funéraires « sous prétexte de nettoyer le site ». Parmi les nombreux chrétiens, accourus sur les lieux après avoir été alertés, Martin Harris raconte : « Quand nous sommes arrives au cimetière, nous n’avons pu que constater que toute une partie du cimetière avait été rasée et servait déjà de parking. » Il ajoute que les ouvriers avaient entassé la terre du cimetière d’un côté et jeté en vrac de l’autre des morceaux de pierres tombales brisées.
L’AICC, qui milite pour la défense des droits des chrétiens en Inde, a protesté officiellement contre l’attitude des autorités locales qui ont failli à « leur devoir de protéger les croyants et les lieux de culte ». L’organisation a particulièrement fustigé le gouvernement hindouiste BJP (Bharatya Janata Party, Parti du peuple indien), au pouvoir dans l’Etat depuis 2001 et déjà accusé d’avoir une grande part de responsabilité dans les violences exercées régulièrement dans l’Etat à l’encontre des musulmans et des chrétiens (1).
« Il y a au Gujarat un immense mépris pour les droits et les sentiments religieux des minorités : ni les vivants ni les morts ne sont respectés. Dans le Gujarat de Narendra Modi, où l’Etat de droit n’existe plus, après les musulmans, le tour des chrétiens est venu », a déclaré Samson Christian, l’un des responsables de l’AICC. Le chrétien s’exprimait à l’issue d’une visite au cimetière de Sabarmati où il avait constaté les actes de vandalisme décrits par les témoins : pierres tombales et croix descellées et brisées, tombes retournées par les bulldozers et une partie du site d’inhumation transformée en parking où stationnaient déjà plusieurs véhicules.
Dès qu’elle avait eu connaissance des faits, l’organisation avait porté plainte au commissariat de Sabarmati pour actes de vandalisme et atteinte aux sentiments religieux des chrétiens. Face à l’inaction de la police, l’AICC a dû, le 31 janvier dernier, refaire une déposition, dont elle a envoyé copie aux instances supérieures de l’Etat.
Le responsable de la police locale de Sabarmati, S. D. Patel, a tenu à s’expliquer auprès de l’Indian Express paru le 1er février : « Nous avons enregistré la plainte et pris des photos du site en question. Nous avons également interrogé les habitants. » Mais à l’heure actuelle, aucun coupable n’a été identifié, ni encore moins arrêté, bien que l’AICC ait fait part de soupçons fondés à l’encontre de l’Ahmedabad Municipal Corporation (AMC), la puissante organisation des services publics de l’agglomération, elle aussi entièrement constituée de membres du BJP. A son tour, le responsable des services d’hygiène s’est défendu de toute intervention émanant des services municipaux : « Nous ne nettoyons pas les sites religieux, les cimetières ou les terrains privés. Je ne suis au courant d’aucune opération de ce genre ayant été effectuée par l’AMC ».
A l’appel de l’AICC, des milliers de chrétiens de toutes confessions ont manifesté, hier 1er février, dans les rues d’Ahmadabad, réclamant le respect des droits des minorités religieuses. Devant le bureau central de l’Ahmedabad Municipal Corporation, ils ont scandé des slogans demandant la démission du ministre-président Narendra Modi ainsi que la destitution de S. D. Patel, chef de la police de Sabarmati.