Eglises d'Asie

Signature d’un accord avec Manille en vue d’améliorer l’intégration des Philippines épousant des Coréens

Publié le 19/03/2012




Manille et Séoul ont signé, le 12 mars dernier, un accord visant à faciliter l’intégration des Philippines qui choisissent de se marier avec un Coréen. « Plus de 9 000 Philippines sont mariées à des Sud-Coréens et vivent en Corée du Sud. Nos deux pays considèrent que faciliter l’intégration dans la société sud-coréenne des épouses philippines est une manière de protéger leurs droits fondamentaux et les soutenir dans leur épanouissement », a assuré à Manille …

… Imelda Nicolas, présidente de la Commission pour les migrants philippins (Filipinos Overseas), en présence de la Sud-Coréenne Kim Kum-lae, ministre de la Famille et de l’Egalité des genres du gouvernement sud-coréen.

Après des accords similaires signés avec le Vietnam et la Mongolie, les Philippines sont le troisième pays à conclure un tel accord avec Séoul. « Un nombre croissant de Philippines se marient avec des Coréens. De façon à aider ces femmes à s’adapter à leur nouvel environnement en Corée du Sud, nous sommes décidés à leur offrir des programmes éducatifs, tels que des cours de langue, des enseignements sur la culture et la société coréenne, aux Philippines mêmes, avant leur envol pour la Corée », a expliqué lors d’une conférence de presse la ministre sud-coréenne.

En 2010, 1 906 Philippines ont obtenu un visa de résidentes permanentes en Corée du Sud après s’être mariées à un Coréen, un chiffre en nette augmentation par rapport à 2001 (502 mariages) et 2005 (980 mariages). Au total, les mariages entre Sud-Coréens et Philippines représentent 5,7 % des mariages internationaux contractés par des Sud-Coréens, certes loin derrière les mariages de Sud-Coréens avec des Chinoises ou des Vietnamiennes mais au troisième rang, devant les mariages avec des Japonaises ou des Cambodgiennes.

Dans un pays à la dénatalité profonde, les mariages internationaux sont devenus depuis une vingtaine d’années un phénomène notable, au point de représenter un mariage sur dix, avec des pointes en zones rurales à quatre mariages sur dix. Par ailleurs, là où bien des Coréennes n’hésitent plus à attendre l’âge de la trentaine avant de convoler en justes noces et se limitent à un seul enfant par couple, les mariages internationaux concernent des étrangères âgées d’une vingtaine d’années et dont les couples sont souvent plus féconds. Conséquence, dans une société jusqu’ici très homogène ethniquement, les enfants issus de couples mixtes sont devenus, en quelques années, une réalité statistique et sociologique.

En 2008, le gouvernement de Lee Myung-bak a pris acte de ces changements et fait voter une loi en faveur des familles multiculturelles. Désormais, l’Etat ainsi que les collectivités locales sont tenues de mener des actions en vue d’aider ces familles.

Par ailleurs, réagissant à plusieurs drames fortement médiatisés concernant des mauvais traitements exercés à l’encontre de femmes étrangères en Corée ainsi que des meurtres d’enfants issus de couples mixtes, le président avait déclaré : « Où qu’ils vivent, les êtres humains ont droit à un niveau minimum de bonheur. Les gouvernements provinciaux se concentreront sur l’éducation des femmes étrangères ; le gouvernement central, quant à lui, prendra en charge l’éducation des hommes coréens qui se marient à des étrangères. »

L’un des objectifs de l’Etat était alors de casser l’essor des agences matrimoniales et des intermédiaires qui prospéraient sur le terrain des mariages internationaux. En 2009, la Korea Consumer Agency (KCA) estimait qu’un mariage mixte coûtait en moyenne un total de 13 millions de wons (8 800 euros) aux deux parties en présence et que l’ensemble de la démarche prenait seulement 88 jours, entre le moment où la partie coréenne franchissait le seuil de l’une des 1 044 agences matrimoniales ayant pignon sur rue en Corée et l’instant où son épouse chinoise, vietnamienne ou philippine franchissait le seuil de son nouveau foyer.

Depuis, et en dépit d’une loi philippine interdisant aux agences matrimoniales internationales de s’établir sur le sol philippin, les mariages de Philippines avec des Coréens n’ont pas diminué en nombre, au contraire. Pour autant, les difficultés que rencontrent les Philippines à s’adapter à leur nouvel univers coréen ne disparaissent pas. L’ambassade des Philippines à Séoul reçoit régulièrement des plaintes de la part de Philippines maltraitées par leurs maris coréens ; certaines se retrouvent à la rue, abandonnées avec un enfant ou en instance de divorce.

Selon les observateurs, il n’est pas sûr que le cadre réglementaire mis en place en Corée ni même les accords internationaux du type de celui signé le 12 mars avec les Philippines suffiront à améliorer la condition des épouses étrangères en Corée. En janvier, un décret du ministère coréen de la Justice est paru afin de tenter de diminuer la fréquence des divorces qui frappent les mariages internationaux : désormais, les futurs époux devront prendre un cours sur la culture du pays de leurs partenaires ; la durée de ce cours a été fixée à trois heures ! Pour autant, a estimé la Philippine Imelda Nicolas, l’accord coréano-philippin « témoigne du fort engagement des deux gouvernements » et de leur volonté de « répondre de manière complète et adaptée aux besoins » nés de ces unions internationales. « Moins les épouses s’adapteront à la culture coréenne, moins elles seront capables de s’en sortir en tant que migrantes, travailleuses, femmes et mères », a-t-elle déclaré.

Enfin, dans un pays – la Corée – en majorité bouddhiste, les unions matrimoniales avec des Philippines créent le plus souvent des mariages mixtes religieusement. Dans leur isolement, les épousées philippines trouvent un soutien et un réconfort auprès des Eglises chrétiennes, très implantées en Corée du Sud (10 % des Coréens sont catholiques et 20 % sont protestants). Les Eglises chrétiennes ont ainsi mis sur pied de nombreuses initiatives pour leur venir en aide que ce soit sur un plan social (notamment via des centres éducatifs pour leurs enfants) ou sur un plan spirituel (avec, par exemple, des bibles bilingues – en coréen sur une page et en anglais sur la page en vis-à-vis).