Eglises d'Asie

Les autorités locales reconnaissent les revendications des chrétiens de Nuwakot

Publié le 17/07/2012




A l’issue d’un long bras de fer, les chrétiens protestants du district de Nuwakot ont obtenu du gouvernement qu’il répare les dégâts causés à leur église par la construction d’une nouvelle route.Alors que le pays est toujours en attente de sa Constitution – dont la date de remise a été fixée au 22 novembre prochain –, les discriminations envers les minorités religieuses s’accroissent …

… favorisées par le vide juridique et les incertitudes concernant leur statut. Dans le district de Nuwakot, situé dans une région montagneuse et difficile d’accès au nord de Katmandou, les autorités locales se sont toutefois engagées à étayer et à réparer une église protestante menacée d’effondrement à la suite de travaux routiers effectués par le district.

La communauté chrétienne, après avoir en vain tenté d’obtenir la déviation de la route de quelques mètres, puis l’édification de murs de soutènement pour empêcher l’écroulement de leur église, avait fini par porter le sujet à l’attention des associations de défense des droits des minorités religieuses, lesquelles avaient alerté les médias le 8 juillet dernier.

Les chrétiens locaux étaient en train d’achever la construction de leur lieu de culte sur un terrain acheté en 2010 pour environ 23 000 euros, lorsque l’administration du district de Nuwakot avait décidé de faire passer une nouvelle route en contrebas de l’église située au sommet d’une pente raide, sans étayer les excavations, ni édifier de murs de soutènement. Dans cette région escarpée où les glissements de terrain sont fréquents, le bâtiment de culte est aujourd’hui en passe de s’effondrer, malgré les remblais édifiés en hâte par les chrétiens aux premières pluies de mousson.

Selon le Rév. Govinda Khadga, pasteur de la communauté concernée, la route a été volontairement déviée pour passer à proximité de l’église en construction, afin de l’endommager définitivement. Depuis le début des travaux du lieu de culte, les fidèles se heurtent en effet à l’hostilité croissante des populations locales. « Quelques personnes de la région avaient commencé à dire que les chrétiens étaient suffisamment riches pour construire un mur en or et que le gouvernement avait autre chose à faire [que de leur bâtir un remblai] », rapporte entre autres le Rév. Khadga.

Dans le district de Nuwakot, les populations tamangs et newars, qui pratiquent majoritairement le bouddhisme et l’hindouisme, ont une attitude de défiance envers les Eglises chrétiennes qui se sont récemment développées dans la région à la faveur de programmes humanitaires menés par des ONG d’obédience essentiellement protestante (baptiste, anglicane, évangélique …). Le district est en effet tristement réputé pour être la ‘zone d’approvisionnement’ principale des réseaux de prostitution infantile qui acheminent des enfants vers l’Inde. L’activité des trafiquants est telle que, dans certains villages de la région, il n’y a aujourd’hui plus aucune fille.

Mais il aura fallu l’intervention de plusieurs associations, dont l’ONG Freedom for All et la Nepal Christian Federation (NCF), qui regroupe la majorité des Eglises protestantes au Népal, pour que les autorités de Nuwakot acceptent d’intervenir. « Les soupçons selon lesquels nous n’avons pas bâti de mur de soutènement ici parce qu’il y avait une église au-dessus sont infondés », s’est défendu Deepak Shrestha, qui dirige le département des routes dans la région. « Il y avait seulement un tournant difficile sur la route et nous avions prévu de régler cela plus tard », a-t-il affirmé aux responsables des organisation de défense des droits de l’homme et des minorités religieuses qui avaient parcouru les 90 km qui séparent Katmandou de Nuwakot pour apporter leur soutien à l’Eglise protestante.

Le Rév. Chari Bahadur Gahatraj, à la tête de la NCF et secrétaire général du Christian Advisory Committee for a New Constitution, soutient pour sa part que ce dernier incident ne fait que démontrer l’accroissement des discriminations envers les chrétiens, lesquels sont « continuellement traités comme des citoyens de seconde zone ».

Le pasteur ne cache pas son inquiétude concernant les difficultés d’élaboration de la Constitution népalaise. L’un des points de désaccords les plus importants au sein de la Constituante concerne le caractère séculier du pays et la question d’une éventuelle promulgation de lois anti-conversion qui permettraient de rétablir un Etat hindou, des mesures contre lesquelles les chrétiens et les différentes minorités religieuses s’étaient fortement mobilisées ces derniers mois.

Malgré un accroissement spectaculaire ces dernières années, les chrétiens restent très minoritaires au Népal, où ils représentent entre 1 et 4 % de la population (pour 80 % d’hindous et 10 % de bouddhistes). En 2011, alors que le gouvernement népalais ne déclarait que 0,5 % de chrétiens, le Nepal Catholic Directory 2010-2011 avait annoncé deux millions de chrétiens (majoritairement protestants), soit 6,9 % de la population. Le chiffre avait cependant été contesté au sein même des communautés chrétiennes, certaines Eglises protestantes préférant s’en tenir au chiffre d’un million de fidèles tandis que l’Eglise catholique déclarait ne pouvoir assurer que la fiabilité de ses propres statistiques (soit 8 000 croyants). Des recensements, effectués par le gouvernement et les Eglises chrétiennes sont actuellement en cours afin de confirmer ou infirmer ces données statistiques.