Eglises d'Asie – Vietnam
La Commission ‘Justice et Paix’ du diocèse de Vinh demande que le procès en appel de trois jeunes catholiques soit conforme au droit international
Publié le 05/09/2012
… Ce crime est mentionné à l’article 88 (paragraphe 1c) du Code pénal. Trois des quatre condamnés ayant fait appel vont comparaître dans les jours qui viennent devant un tribunal de seconde instance.
En prévision de ce procès, la Commission ‘Justice et Paix’ du diocèse de Vinh a fait paraître un communiqué sur cette affaire qui a suscité beaucoup de mécontentement et de nombreuses polémiques à l’intérieur du pays comme à l’étranger. Le communiqué insiste surtout sur le caractère inconstitutionnel de l’article du Code pénal sur lequel s’appuie l’accusation. Le crime de propagande contre l’Etat va à l’encontre des dispositions de la Constitution concernant les droits civiques. La Commission souligne aussi la non-conformité des articles du Code pénal avec la législation internationale sur le sujet. Il énumère enfin les très nombreuses fautes de procédure qui entachent l’instruction et le déroulement du procès. Ce communiqué, publié le 28 août 2012 sur le site Internet du diocèse de Vinh, a été traduit et adapté en français par la rédaction d’Eglises d’Asie.
La démonstration du législateur vietnamien, en particulier celle des organes judiciaires de la province du Nghê An, s’appuie sur des éléments qui vont à l’encontre des dispositions de la Constitution de la République socialiste du Vietnam. En effet, l’article 88 ainsi que l’article 79 du Code pénal en vigueur aujourd’hui mentionnent le crime de propagande contre l’Etat de la République socialiste du Vietnam ou encore le crime d’activité visant à renverser le pouvoir populaire. Cela est en contradiction avec les droits civiques affirmés par la Constitution : liberté d’expression, liberté de presse, liberté d’information, liberté de réunion et de rassemblement, liberté de manifestation dans le cadre des dispositions de la loi. Aucun de ces droits n’a été inscrit dans le Code civil de 2006.
Quatre jeunes catholiques ont été arrêtés en utilisant des procédés apparentés au terrorisme. Au mois de mai, ils ont comparu devant un tribunal de première instance dans une parodie de procès. Tout particulièrement, le jugement prononcé est en contradiction avec un droit essentiel, à savoir la liberté de fonder des associations, droit reconnu par le droit international à l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations Unies (décembre 1948), déclaration à laquelle le Vietnam a souscrit en devenant membre des Nations unies le 20 septembre 1977. Le jugement va également à l’encontre de la Convention internationale relative aux droits civils et politiques de 1966, à laquelle le Vietnam a adhéré le 24 septembre 1992.
En regard des dispositions citées, les activités des jeunes catholiques en question n’ont été que l’expression de consciences modérées s’appuyant sur les droits les plus fondamentaux de la personne humaine pour faire naître une société de progrès. La loi leur donnait la liberté de chercher, de recevoir et de diffuser toutes sortes d’informations et d’opinions sans distinction ni frontières, et cela par oral, par écrit, par imprimé ou sous une forme artistique. Ils pouvaient recourir à n’importe quel moyen de communication de masse, à leur choix.
Tout cela fait aujourd’hui partie de l’acquis de l’humanité tout entière en matière de droits de l’homme. C’est aussi le but, l’aspiration légitime de tous les membres de la société. En aucune manière, ce comportement ne peut, pour des raisons opportunistes, être considéré comme criminel.
Les jeunes gens arrêtés et jugés sont tous de bons étudiants qui ont suivi ou sont en train de poursuivre des études dans des institutions universitaires du Vietnam. Ils sont issus de familles paysannes modestes et laborieuses. Non seulement ils n’ont jamais eu de condamnation ou de démêlé avec la justice mais, au contraire, ils participent avec enthousiasme à des activités positives visant le bien commun de la communauté et de la société. S’ils ont été mêlés à des activités, d’ailleurs sans grande envergure, comme celles que le tribunal a citées, c’est parce qu’ils étaient animés de la volonté de parvenir à une société libre, bénéficiant du progrès et du développement.
On peut se demander aussi dans quelle mesure les témoignages apportés par le tribunal du Nghê An étaient suffisants pour étayer une accusation de crime contre la sécurité nationale, portée contre ces jeunes gens ? Ont-ils provoqué des bouleversements, ont-ils suscité du mécontentement dans l’opinion publique ?
En examinant comment se sont déroulés les arrestations, l’instruction de l’affaire, le jugement et la condamnation, l’opinion publique a relevé de nombreuses fautes de procédure en regard des règles qui ont été fixées par le Code de procédure pénale en vigueur aujourd’hui. On peut relever une infraction à ce code dans la façon dont les arrestations ont été effectuées (article 80), dans l’absence de confrontation (article 138), dans la retenue des biens et pièces à conviction (article 145), dans le recueil des preuves et des témoignages sur les motifs du crime (article le 63-78), et enfin dans le refus de transmettre le dossier d’enquête pour suppléer à l’absence de preuves importantes, ce qui est une faute de procédure très grave (article 163). Avec des infractions aussi graves aux règles de la procédure, comment éviter un jugement inique et illégal ?
En raison des insuffisances dans l’application de la loi vietnamienne, des fautes de procédure, nous proposons, en seconde instance, que le tribunal populaire suprême examine à nouveau l’intégralité de cette affaire et qu’ainsi il aboutisse à des décisions véritablement impartiales et justes, garantissant une application correcte du droit vietnamien, conformes au droit international, respectant les intérêts du peuple et répondant aux aspirations de l’opinion publique.