Eglises d'Asie

Côn Dâu : les forces de l’ordre ont entamé la destruction des maisons des paroissiens qui refusent de s’en aller

Publié le 03/10/2012




Un nouvel et triste épisode est venu s’ajouter, ce 2 octobre 2012, à la liste déjà longue de ceux qu’a déjà connus la petite paroisse de Côn Dâu, depuis que la municipalité de Da Nang a décidé d’inclure son territoire dans une nouvelle zone urbaine. Une de ses maisons a été totalement détruite par les forces de l’ordre. La famille qui l’habitait était restée sur place malgré les sommations répétées des autorités…

… car elle estimait insuffisante l’indemnisation proposée par la municipalité pour construire un nouveau domicile.

Huynh Ngoc Chay, propriétaire de la maison, où il vivait avec sa femme et ses deux jeunes enfants, a rapporté à Radio Free Asia, le récit de l’opération policière qui a débuté à 8h00 du matin. Elle était menée par des agents de la Sécurité publique du district et de l’arrondissement de Câm Lê. Après avoir lu l’ordre de destruction de la maison, les agents entreprirent sa démolition, à l’aide de bulldozers et de divers engins mécaniques. A 11h00, la maison était rasée.

Huynh Ngoc Chay a également expliqué que les autorités locales lui avaient, à de nombreuses reprises, envoyé des sommations à quitter les lieux. Mais, selon lui, la somme proposée comme indemnisation, à savoir 600 millions de dongs (22 300 euros) était par trop insuffisante pour subvenir aux frais de construction d’un nouveau domicile dans un autre lieu. Il était donc resté sur place, souhaitant négocier le montant de la somme avec les services compétents de la municipalité. Mais il n’y a pas eu de nouvelles négociations… Après la démolition de sa maison, lui et sa famille sont désormais privés de logement.

La tragédie de la paroisse de Côn Dâu a débuté à la fin de l’année 2009. C’est à cette date que les habitants, fort attachés à leur mode de vie traditionnel autour de leur clocher, apprirent que l’ensemble du village, maisons et rizières, à l’exception de l’église, allait être détruit pour faire place à une « zone touristique écologique ». Lorsque dans les premiers mois de 2010, les représentants de la municipalité de Da Nang sont venus procéder à l’estimation des maisons du village, l’ensemble de la population, à l’exception de quelques familles, entra en résistance. Celle-ci connut de nombreuses péripéties. La plus dramatique eut lieu au mois de mai 2010. Bien que les autorités eussent interdit l’utilisation du cimetière paroissial, les paroissiens, conformément au désir exprimé avant sa mort par une défunte, Maria Dang Thi Tân, organisèrent ses obsèques dans le lieu de sépulture traditionnel. Le convoi funéraire se heurta aux forces de la police et de la milice régionale. Une bagarre générale s’ensuivit. La police s’empara du cercueil et arrêta un certain nombre de paroissiens. Six d’entre eux furent ensuite jugés et condamnés par le tribunal de Da Nang, un procès qui fut sévèrement critiqué par le président de la Commission ‘Justice et Paix’ de la Conférence épiscopale. Au mois de juillet 2010, un paroissien, Nguyên Thanh Nam, membre du comité d’organisation des obsèques de Maria Tân, décéda peu après avoir été passé à tabac par la police.

Après l’enterrement, plus de 70 fidèles de la paroisse avaient fui en Thaïlande pour demander le statut de réfugié auprès des représentants des Nations Unies. Aujourd’hui, quatorze d’entre eux ont rejoint les Etats-Unis. Les autres, qui ont achevé les formalités préalables à l’obtention du statut de réfugié, sont encore en Thaïlande.

La maison de Huynh Ngoc Chay n’est pas la première à avoir été ainsi récupérée de force et démolie. Deux maisons voisines avaient déjà subi le même sort. Désormais, les autorités ont abandonné les rencontres avec la population organisées autrefois. Ces derniers temps, des émissaires de la municipalité se sont présentés dans les maisons pour exiger que leurs habitants qu’ils abandonnent leurs maisons et leurs rizières aux services compétents ; sinon, elles leur seront enlevées de force au cours d’opérations policières, comme celle qui vient d’être organisée contre la maison de Huynh Ngoc Chay.