Eglises d'Asie

Vénéré comme un martyr, le P. Diêp draine les foules pour l’Année de la Foi

Publié le 30/10/2012




Dans le cadre de l’Année de la foi, l’Eglise du Vietnam redécouvre un authentique témoin de l’Evangile, le P. François-Xavier Truong Buu Diêp, mort en martyr en 1946. 

Peu après l’ouverture officielle de l’Année de la foi proclamée par l’épiscopat vietnamien à Thanh Hoa le 12 octobre dernier, chaque diocèse a lancé à son tour les célébrations lors de la journée du 18 octobre, puis chaque paroisse à l’occasion du dimanche des missions le 21 octobre.

Ces célébrations ont été rapidement suivies par diverses manifestations destinées à éveiller, former et approfondir la foi des catholiques. Dans ce cadre, il a entre autres été proposé aux fidèles de découvrir, ou redécouvrir, la vie des chrétiens ayant témoigné de leur foi avec héroïsme dans l’histoire récente du Vietnam.
C’est dans ce but que des catholiques de l’archidiocèse de Saïgon ont effectué un pèlerinage le 22 octobre dernier à l’église de Tac Say, dans le diocèse de Can Tho, lieu où repose la dépouille du P. François-Xavier Truong Buu Diêp, mort héroïquement en 1946. Réunis autour de son tombeau, après sept heures de route, les pèlerins ont médité sur la vie et la foi de ce prêtre (1).

Rares sont les Vietnamiens, catholiques ou non, qui n’ont jamais entendu parler du P. François-Xavier Truong Buu Diêp. On a pu voir ces vingt dernières années, de véritables foules de pèlerins, toutes religions confondues, se presser autour de sa tombe, demandant au prêtre d’intercéder pour eux ou pour leurs proches. Les catholiques vietnamiens considèrent cet homme qui a donné sa vie pour ses fidèles, comme un pasteur exemplaire et un témoin de la foi.

François-Xavier Truong Buu Diêp est né à la fin du XIXe siècle (1897) dans un petit village appartenant aujourd’hui à la province de An Giang dans le Sud-Ouest du Vietnam, une région qui à l’époque dépendait du Vicariat apostolique de Phnom Penh au Cambodge. À l’âge de 12 ans, il entre au petit séminaire en vue de se préparer au sacerdoce. Il termina sa formation au grand séminaire de Phnom-Penh en 1924, date à laquelle il sera ordonné prêtre dans cette ville. Il fait ensuite ses premières expériences pastorales dans une paroisse de Vietnamiens du Cambodge, enseigne pendant deux ans au petit séminaire du Vicariat apostolique, avant d’être nommé en 1930, curé de la paroisse de Tac Say, au Vietnam. Il en sera le pasteur pendant 16 ans, jusqu’à sa mort. Durant toutes ces années, il acquiert la réputation d’un prêtre zélé, proche des fidèles, très attentif à leurs besoins, animé d’un grand esprit missionnaire : il a implanté plus de huit chrétientés aux alentours de la paroisse.

En 1945, c’est le début de la première guerre d’Indochine et moins d’un an plus tard, la région où il habite s’embrase ; une grande partie en est occupée par le Vietminh. La presque totalité du clergé s’est retirée provisoirement de la région pour laisser passer l’orage. Ses supérieurs conseillent vivement au P. Diêp d’en faire autant. Mais celui-ci refuse de quitter ses fidèles dispersés dans les diverses communautés qu’il a fondées.

Le 12 mars 1946, avec 70 de ses paroissiens de Tac Say, il est arrêté par le Vietminh. Tout le groupe est enfermé dans un grenier à riz. C’est là qu’il propose à ses gardiens d’échanger sa vie pour le salut de ses fidèles. On découvrira plus tard son corps nu et affreusement mutilé dans un étang proche du lieu où il avait été détenu.

Il reste encore un certain nombre de catholiques ayant connu le P. Diêp. L’archevêque de Saïgon, le cardinal Pham Minh Mân, est de ceux-là. Dans une interview traduite par Eglises d’Asie (2), il a confié que c’était le P. Truong Buu Diêp qui avait conseillé à sa famille de l’orienter vers le sacerdoce dès son très jeune âge.

Mais les catholiques sont loin d’être les seuls à avoir conservé sa mémoire. Un véritable mouvement populaire s’est en effet peu à peu développé autour de sa sépulture, attirant vers elle encore plus de non-chrétiens que de chrétiens. En 1996, la tombe du P. Truong Buu Diêp a été officiellement reconnue comme lieu de pèlerinage par le diocèse de Can Tho, malgré la réticence des autorités civiles.

Lors de leur première assemblée annuelle au mois de mars 2012, les évêques ont approuvé l’envoi à Rome des premiers éléments d’un dossier de demande de béatification du curé de Tac Say.