Eglises d'Asie – Inde
Les chrétiens sommés par les islamistes de quitter le Cachemire
Publié le 03/05/2013
Le Conseil uni du djihad (United Jihad Council – UJC), une organisation rassemblant différents groupes islamiques armés du Cachemire (1), a déclaré lundi 30 avril que « les missionnaires chrétiens travaillant dans la vallée avaient pour but caché d’exploiter les pauvres et les déshérités en leur offrant de l’argent, afin de les convertir au christianisme ».
Qualifiant ce comportement d’« inacceptable », le porte-parole de l’UJC, Syed Sadaqat Hussain, a poursuivi en expliquant que « l’islam était une religion de paix et d’harmonie qui protégeait les minorités, mais qu’elle ne pouvait tolérer l’existence d’activités anti-musulmanes ».
La déclaration se concluait en ordonnant à tous les missionnaires chrétiens de quitter immédiatement le Jammu-et-Cachemire, sous peine de « devoir en subir les graves et inévitables conséquences ». L’UJC appellait ensuite les organisations islamiques à prendre le relais de l’aide humanitaire et caritative dispensée habituellement par les chrétiens aux populations en difficulté.
Ce n’est pas la première fois que l’UJC menace ainsi les missionnaires, ni que sont portées de fausses accusations de conversions à l’encontre de la petite minorité encore présente dans le seul Etat à majorité musulmane de l’Union indienne. Depuis plus d’une dizaine d’années, les quelques chrétiens qui résistent encore aux islamistes de la Vallée du Cachemire et à leur volonté d’y imposer la charia, font l’objet d’attaques incessantes, alimentées par des accusations de prosélytisme qui, malgré les dénégations des responsables des différentes Eglises, ne cessent de croître.
Le mois dernier, l’agence Fides rapportait que des mollahs avaient accusé de « conversions forcées d’enfants » les bénévoles du centre social et éducatif Agape à Srinagar, géré par l’Agape Mission, une association chrétienne oecuménique. Après enquête de la police, la plainte avait finalement été rejetée.
Les islamistes affirmaient que le « personnel étranger d’Agape cherchait à faire changer les enfants de religion », une accusation qui avaient été réfutée par les familles mêmes des jeunes fréquentant le centre, tous musulmans. Quelques mois auparavant, ces mollahs avaient tenté de faire entrer de force dans leurs madrasas (écoles coraniques), une partie des enfants allant à Agape. Face à la résistance des parents de ces derniers, les islamistes avaient menacé les responsables du centre, puis lancé des raids nocturnes avant que la police n’intervienne pour les empêcher d’incendier les bâtiments.
La même fausse accusation de prosélytisme avait été lancée l’an passé à l’encontre du Rév. C. M Khanna, pasteur de la All Saints Church de Srinagar, une affaire qui avait fait la Une des journaux indiens (2). Le missionnaire avait été arrêté par la police sur ordre du grand mufti pour le Cachemire, Ahmad Bashir-ud-Din, et condamné par une cour islamique, au mépris de toutes les lois régissant l’Union indienne, à l’expulsion définitive de l’Etat pour « avoir dévoyé de jeunes musulmans, les amenant à se convertir au christianisme en exploitant leur pauvreté ». Le Rév. Khanna avait par la suite été acquitté par la Haute Cour de l’Etat de Jammu-et-Cachemire, ainsi que les quatre autres chrétiens, également condamnés par le grand mufti, parmi lesquels se trouvait le P. Jim Borst, missionnaire catholique hollandais de la Société de Saint-Joseph de Mill-Hill, oeuvrant dans la vallée du Cachemire depuis près de cinquante ans.
Mais depuis l’affaire Khanna, la situation des chrétiens dans l’Etat semble s’être encore aggravée, du fait de l’augmentation des fatwas lancées contre les chrétiens en toute impunité par les tribunaux islamiques. Quant aux écoles chrétiennes, elles reçoivent des menaces régulières et leurs directeurs sont sommés d’inclure les prières et l’enseignement musulmans dans les programmes scolaires ainsi que de fournir les preuves qu’ils ne se livrent à aucun prosélytisme.
Lorsqu’elles ne sont pas rattachées à une obédience spécifiquement islamique, les ONG travaillant dans la région sont également sous surveillance. Ces associations ainsi que les organisations de défense des droits de l’homme multiplient cependant les démarches auprès des autorités du Jammu-et-Cachemire comme du gouvernement central indien, menaçant d’en appeler aux instances internationales si rien n’est fait pour arrêter les islamistes et protéger les minorités.