Eglises d'Asie

Saigon : répression policière des « débats en plein air sur les droits de l’homme »

Publié le 14/05/2013




Grâce sans doute à une très forte pression internationale, les « Rencontres en plein air pour les droits de l’homme » (Da Ngoai Nhân Quyên) se sont prolongées ce dimanche 12 mai à Hanoi et à Saigon. Il s’agit là d’une forme nouvelle de manifestation inaugurée le 5 mai dernier dans trois villes du Vietnam, Saigon, Nha Trang et Hanoi. Dans la métropole du sud, la Sécurité publique était intervenue avec force.

Ce 12 mai à Hanoi, de jeunes étudiants ont distribué des exemplaires de la Déclaration universelle des droits de l’homme aux portes de l’université, dans différentes stations d’autobus, dans les transports en commun et en plusieurs autres lieux. Ils ont également pris la parole pour commenter le texte distribué. Celui-ci a été bien accueilli par quelques-uns et avec une certaine crainte par d’autres. A Saigon, des rencontres avec discussion sur le thème des droits de l’homme ont eu lieu dans le jardin public Lê Thi Riêng. De nombreux jeunes y ont participé et ont discuté avec passion sur de nombreux sujets de 20h à 22h. Dans la matinée, des exemplaires de la Déclaration universelle avaient été distribués dans les rues. Les sources consultées ne signalent aucun incident notable.

Ce fut loin d’être le cas dimanche 5 mai, jour des premières « Rencontres en plein air pour les droits de l’homme ». Trois rencontres avaient été prévues dans trois jardins publics des villes de Hanoi, Nha Trang et Saigon. L’objectif était de diffuser des informations sur les droits de l’homme et d’organiser des débats sur le sujet. Ces rassemblements se sont heurtés très vite à une forte répression policière, surtout à Saigon où les participants ont été nombreux à être frappés par les forces de l’ordre.

A Saigon, si, dès le début de la réunion, à 20h30, de soi-disant « jardiniers » s’étaient seulement contenté d’arroser copieusement les nombreux jeunes rassemblés dans le jardin public, les choses ont commencé à prendre une tournure véritablement répressive une heure plus tard lorsque les blogueurs Quoc Anh et Nguyên Hoang Vi étaient interpellés et conduits au poste de police de l’arrondissement. Là, ils y étaient fouillés et frappés, tandis que plusieurs objets personnels leur étaient confisqués. Le lendemain, des membres de la famille de Nguyên Hoang Vi qui s’étaient présentés au poste de la Sécurité de Phu Thanh pour demander la restitution de certains objets confisqués illégalement, devaient repartir sous les coups des forces de l’ordre.

Le 7 mai, le bureau ‘Justice et Paix’ de la congrégation des rédemptoristes de Saigon portait plainte contre les services de Sécurité de l’arrondissement pour « atteinte à l’intégrité physique et à la réputation de Melle Nguyên Hoang Vi et de sa famille » (1).

De leur côté, les principales associations internationales des droits de l’homme ont vivement dénoncé la répression de ces premières manifestations du 5 mai dernier, dans les trois villes où elles ont eu lieu. Tour à tour, Human Rights Watch depuis Washington, Amnesty International depuis Londres, et Reporters sans frontières depuis Paris se sont scandalisés de la violence utilisée par les forces de l’ordre pour réprimer le petit nombre de citoyens ayant participé pacifiquement à ces rencontres, mettant en relief les cas des blogueurs Nguyên Hoang Vi, Quôc Anh et Châu Van Thi, arrêtés et frappés dans la journée du 5 mai.

Dans l’un de ses communiqués, Human Rights Watch (HRW) a entre autres appelé les services vietnamiens de la Sécurité à cesser d’entraver la participation des citoyens aux « Rencontres en plein air pour les droits de l’homme ». Dans une interview à Radio Free Asia (2), le directeur pour l’Asie de HRW a rappelé que le Vietnam avait adhéré aux différentes conventions internationales pour les droits de l’homme. Il a tenu également à faire remarquer qu’à l’intérieur même du pays et avec l’autorisation des pouvoirs publics, des débats étaient en cours pour savoir s’il fallait introduire les droits de l’homme au sein d’une nouvelle Constitution amendée. Les jeunes molestés par la police le 5 mai dernier ne faisaient donc qu’informer leurs concitoyens de la nature de ces droits, a-t-il souligné.

Amnesty International, le 9 mai 2013, a mis en ligne un modèle de lettre à envoyer au ministère de la Sécurité vietnamienne afin de dénoncer les violences du 5 mai. Il y est demandé de mettre en place une enquête indépendante sur les violations des droits de l’homme dont certains militants ont été victimes ce jour-là. Le gouvernement est également prié de respecter ces mêmes droits, en particulier celui concernant la liberté d’expression et d’association.

Reporters sans frontières, dans son communiqué du 8 mai, a également vivement condamné « les violences délibérées perpétrées par les forces de l’ordre contre des acteurs de l’information » et s’est déclarée « inquiète de constater que ces violences inacceptables semblent être la réponse automatique et systématique des autorités à toute initiative en faveur de la liberté d’expression ».