Eglises d'Asie

Jharkhand : les hindouistes exigent le vote d’une loi anti-conversion

Publié le 09/11/2010




Le Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS, Corps national des volontaires) du Jharkhand a fait part de son intention de convaincre le Bharatiya Janata Party (BJP, Parti du peuple indien), parti hindouiste à la tête de l’Etat, de faire passer rapidement une loi anti-conversion. « Nous allons nous entretenir avec le ministre-président Arjun Munda (…) afin de mettre en place…

une loi interdisant les conversions dans l’Etat. La conversion, quelle qu’elle soit, doit être condamnée », a déclaré Jagannath Shahi, responsable du RSS au Jharkhand, lors d’une conférence de presse au quartier général du mouvement à Ranchi, le 7 novembre 2010. « Les conversions sont interdites dans de nombreux pays comme la Chine, Israël ou d’autres. Il n’y a qu’en Inde que ce n’est pas condamné », a-t-il ajouté.

 

Fer de lance du Sangh Parivar, la nébuleuse qui réunit les partis hindous extrémistes (1), le RSS affiche clairement son objectif de faire de l’Inde un « Etat hindou » et n’hésite pas à commettre régulièrement des violences contre les chrétiens, qu’il accuse de pratiquer des conversions forcées. Dans l’Etat voisin de l’Orissa, lui aussi dirigé par le BJP, le RSS a été reconnu comme l’un des instigateurs des attaques antichrétiennes de 2008, qui ont fait plus d’une centaine de morts, déplacé près de 50 000 personnes et détruits des milliers de maisons, lieux de culte et habitations (2).

 

Le Jharkhand, Etat situé dans le nord-est de l’Inde, est un Etat récemment créé, en 2000, à partir des districts méridionaux du Bihar ; il est connu pour être l’un des territoires les plus pauvres du pays, ce qui en fait un terrain de prédilection pour les hindouistes comme pour les maoïstes. (Le Jharkhand fait partie du « corridor rouge » et connaît, en ce temps d’élections des panchayat (3), une recrudescence très forte des attentats naxalites (4)). Sa population, à forte composante aborigène (adivasi ou « tribals »), comprend un peu plus de 4 % chrétiens (recensement de 2001), un pourcentage relativement élevé au regard de la population totale des chrétiens qui n’atteint que 2,3 % pour l’ensemble de l’Inde.

 

Bien que l’Eglise catholique joue au Jharkhand un rôle socio-économique et culturel important avec ses institutions d’enseignement, ses centres médicaux, ou encore ses services d’aide sociale et juridique, les attaques contre les chrétiens y sont en constante augmentation (5), sans que les pouvoirs publics n’aient pris officiellement de mesures afin de les faire diminuer. Le cardinal Telesphore Placidus Toppo, archevêque de Ranchi (6), fustige « l’inertie et la mauvaise volonté » du gouvernement de l’Etat à protéger les minorités chrétiennes et poursuivre les coupables ; il n’hésite pas également fréquemment à affronter les hindouistes au sujet de la proposition de loi anti-conversion, un thème récurrent au Jharkhand. « Le principe de la conversion forcée n’existe pas dans l’Eglise, celle-ci ne la pratiquant pas et la considérant comme invalide », martèle régulièrement le prélat, qui a été le premier aborigène en Asie à avoir été élevé au cardinalat.

 

Lors de sa conférence de presse du 7 novembre, le RSS a annoncé également avoir planifié des manifestations pour le 16 novembre, qui auront lieu dans les 24 districts du Jharkhand comme ailleurs dans d’autres Etats de l’Inde, afin de protester contre les accusations récemment portées par les brigades anti-terroristes de police (ATS) du Rajasthan, à l’encontre de l’un de leurs principaux leaders, Indresh Kumar, soupçonné d’être impliqués dans les attentats à la bombe contre des lieux de culte musulmans en 2007 et 2008 (7).

 

« L’ATS du Rajasthan tente d’impliquer calomnieusement notre responsable Indresh Kumar dans l’attentat à la bombe d’Ajmer. Son nom a été cité sans aucune raison dans l’affaire et les charges retenues contre lui n’indiquent nullement un rôle quelconque dans l’explosion. Nous protesterons si les leaders du RSS sont soupçonnés injustement, pour des raisons subjectives », a conclu Jagannath Shahi, ajoutant qu’il s’agissait là d’une tentative du Congrès et de son leader Sonia Gandhi pour « ternir l’image du front hindou ».