Eglises d'Asie

Catholiques et protestants s’unissent contre la traite des êtres humains

Publié le 25/06/2013




« Nous voulons une véritable action contre la traite des êtres humains, et les différents groupes chrétiens des Philippines sont décidés à agir ensemble. Nous ne pouvons tout simplement plus garder le silence à propos de ce qu’il se passe », a déclaré, pour la Conférence épiscopale philippine, Mgr Broderick Pabillo, évêque auxiliaire de Manille, samedi 22 juin dernier. 

Rapportés par le Manila Times dans son édition du 23 juin, les propos du prélat rejoignent les nombreuses autres déclarations faites par la Conférence des évêques catholiques des Philippines (CBCP) depuis la parution en septembre dernier du rapport du département d’Etat américain sur le trafic des êtres humains et la corruption dans l’archipel.

Il s’agit en revanche de la première fois où l’Eglise catholique annonce avoir mis en place une « alliance chrétienne » pour agir concrètement sur cette question préoccupante. « Nous voulons unir nos forces pour lutter contre ce fléau et nous avons déjà commencé les réunions de préparation », a expliqué Mgr Pabillo, précisant que la CBCP, le Conseil philippin des Eglises évangéliques (PCEC), et le Conseil national des Eglises aux Philippines (NCCP) pensaient finaliser leur collaboration pour le Freedom Forum prévu en septembre prochain.

En tant que secrétaire national pour l’Action sociale, la Justice et la Paix (NASSA) de la CBCP, Mgr Pabillo s’est adressé à de nombreuses reprises aux fidèles philippins pour dénoncer l’aggravation du trafic des êtres humains et de la prostitution, favorisée par « l’inaction du gouvernement » et la corruption rongeant les institutions étatiques.

Déjà en septembre 2012, lors de la parution du rapport du département d’Etat américain, l’évêque avait plaidé vigoureusement pour une véritable prise de conscience du fléau par toute la population philippine, en particulier les catholiques, car « la lutte contre la traite des êtres humains est l’affaire de tous ».

Le rapport du département d’Etat américain dressait en effet, chiffres à l’appui, un tableau accablant du trafic des êtres humains aux Philippines, en tant que pays d’origine, de destination et de transit. « Nous devons arrêter les trafics d’êtres humains (…), et réaliser l’urgence qu’il y a à agir concrètement pour secourir les victimes de cet esclavage moderne », avait déclaré le prélat dans un communiqué envoyé au nom de la NASSA à tous les diocèses, paroisses, communautés religieuses et organisations de l’Eglise catholique aux Philippines.

Aujourd’hui, le pays est toujours classé niveau 2, stade où il est considéré comme ne respectant pas les standards minimums internationaux fixés par le Victims Protection Act. Le rapport américain dénonce de plus une « corruption rampante » à tous les niveaux de l’Etat, qui ruine les efforts déployés contre la traite et empêche la sanction des coupables.

Toujours en septembre dernier, s’était tenue à Manille la première consultation nationale sur la traite des êtres humains « dans la perspective des droits de l’homme », afin de préparer le rapport qui serait présenté en mai 2013 dans le cadre d’une réunion de l’ASEAN (Association des nations du Sud-Est asiatique) .

Tous les organismes d’Etat mais aussi les ONG et différents représentants des pays étrangers chargés de la lutte aux Philippines contre le trafic des êtres humains étaient présents, hormis la Visayan Forum Foundation Inc (VFF), ONG philippine d’une grande notoriété, qui venait d’être reconnue coupable de détournements de fonds.

Ce dernier scandale n’avait fait que souligner le lien direct entre la corruption et l’augmentation de la traite des êtres humains aux Philippines, estimée à l’heure actuelle à plus de dix millions de ressortissants envoyés illégalement à l’étranger, sans compter les millions d’autres victimes, dont une majorité d’enfants, prisonniers de réseaux fonctionnant au sein même de l’archipel.

Ce dimanche 23 juin, le gouvernement philippin a annoncé publiquement approuver l’initiative des Eglises. « Nous ferons les efforts nécessaires pour vous assister dans les domaines qui ont besoin d’être améliorés », a notamment déclaré le porte-parole du président Benigno Aquino, cité par le Philippine Star dans son édition dominicale.