Eglises d'Asie

Pour approfondir – Avortement et choix du sexe des enfants à naître

Publié le 18/03/2010




Le déséquilibre des sexes à la naissance est une réalité tragique dans un certain nombre de pays d’Asie, que ce soit en Inde, en Chine populaire, à Taiwan ou en Corée du Sud. Dans l’article ci-dessous, le P. Olivier Lardinois, jésuite installé à Taiwan, synthétise un article paru dans un des principaux quotidiens de l’île à ce sujet, notamment les conséquences de ce déséquilibre pour la condition de la femme, que ce soit aujourd’hui ou demain lorsque les filles manquant à l’appel auraient dû parvenir à l’âge nuptial.

Le 22 juin 2008, l’un des principaux quotidiens de Taipei, le Lianhebao, consacrait sa Une à un phénomène de société assez inquiétant observé depuis le début des années 1990 non seulement en Chine populaire, mais aussi à Taiwan : une augmentation considérable de la disparité des sexes à la naissance du fait de l’avortement croissant des fœtus de sexe féminin en raison d’une préférence affichée d’une majorité des parents chinois pour le sexe fort.

 

En Chine populaire, ce phénomène est fort connu et étudié. La disparité actuelle à la naissance a presque atteint 120 garçons pour 100 filles. Il y a déjà dans le pays quelque 18 millions d’hommes de plus de vingt ans contraints à rester célibataire par manque de femmes en âge de se marier. Si le mouvement n’est pas enrayé, les statisticiens prévoient qu’en 2020, il y aura plus de 30 millions d’hommes chinois adultes qui ne pourront fonder un foyer. Le manque de jeunes femmes chinoises entraîne un autre phénomène moins connu : l’achat massif de « fiancées à marier » en provenance de pays pauvres limitrophes (Vietnam, Laos, Cambodge et Birmanie). Loin de résoudre le problème, cette façon de procéder, fort pragmatique, ne fait en réalité que le déplacer. De plus en plus d’hommes adultes des classes les plus défavorisées des pays indochinois ne trouvent pas ou ne trouveront plus de femmes pour fonder une famille.

 

A Taiwan, où pourtant la politique de l’« enfant unique » n’est pas en vigueur, on observe depuis 1990 une disparité à la naissance de 110 garçons pour 100 filles, soit un « surplus » annuel de 18 000 nourrissons mâles. Autrement dit, il y aura, dans les vingt années à venir, plus de 350 000 hommes adultes taïwanais qui ne trouveront pas de femmes locales à marier, du fait des avortements aujourd’hui volontaires et en nombre croissant des fœtus de sexe féminin. Ce phénomène, note le Lianhebao, risque d’accentuer le manque déjà réel et assez notable de femmes locales à marier du fait que de nombreuses jeunes taïwanaises ne désirent plus fonder un foyer, spécialement avec les hommes peu éduqués ou vivant dans les zones rurales de l’île. Pour contrer ce manque, il y a déjà à Taiwan plus de 250 000 jeunes femmes mariées originaires du Sud-Est asiatique (principalement des Vietnamiennes) dont le mariage a été arrangé par des sociétés spécialisées en importation de « fiancées étrangères ». Ce commerce d’intermédiaire marieur est fort lucratif ; il est promis à un bel avenir, mais il entraîne d’énormes problèmes sociaux liés à la difficile intégration de nombreuses femmes forcées à se mettre en ménage et à fonder une famille avec un homme qu’elles n’ont pas choisi, dans une culture qu’elles ne connaissent pas et dans un pays dont elles parlent pas ou peu la langue (1).

 

On imagine déjà les plus ardentes avocates de l’avortement comme voie royale vers la « libération de la femme » au XXème siècle se retourner dans leur tombe. En Asie orientale, la généralisation du « libre choix » concernant le sexe des enfants à naître s’avère bien plutôt contribuer à la lente destruction de la gente féminine et à son esclavage !