Eglises d'Asie – Inde
Orissa : acquittement de 54 hindouistes jugés pour les pogroms antichrétiens de 2007
Publié le 30/10/2013
… par un tribunal du district du Kandhamal, rapporte The Hindu à la Une de son édition de ce mercredi 30 octobre.
Barkhama, fut l’un des villages les plus touchés par la vague de violence antichrétienne qui, du 24 au 28 décembre 2007, a déferlé sur le Kandhamal, faisant au moins dix morts, 400 maisons de chrétiens incendiées et plus d’une centaine d’églises détruites.
Le 24 décembre 2007, lors de la messe de Noël que les différentes Eglises protestantes du village de Barkhama célébraient en commun, sous une grande tente dressée à l’extérieur de l’église, près d’une centaine d’extrémistes hindous avaient lancé une attaque d’une grande violence. Alors que la célébration venait de débuter, ils avaient fondu sur le village, brûlant les objets et le mobilier liturgique et mettant à sac, avant de les incendier, les maisons des chrétiens ainsi que l’église baptiste.
Les hindouistes revinrent le lendemain avec le corps de l’un d’entre eux, décédé de mort naturelle, dont ils effectuèrent la crémation sur l’un des espaces servant au culte des chrétiens, avant d’incendier ensuite d’autres maisons. A chaque attaque, la police, appelée sur les lieux par les victimes, se contenta d’assister aux violences sans intervenir.
Ces violences de Noël 2007, qui auguraient des pogroms qui allaient dès août 2008 toucher les chrétiens du Kandhamal avant de s’étendre à l’ensemble de l’Orissa puis à d’autres Etats de l’Inde, n’avaient été que très partiellement portées devant les tribunaux. La plupart des témoins s’étaient rétractés de peur de représailles des hindouistes et peu de plaintes avaient pou être enregistrées par la police, complice des faits dans bon nombre de cas.
L’acquittement des 54 hindouistes impliqués dans les violences antichrétiennes à Barkhama, prouve une fois de plus que « la justice n’a pas été rendue », s’indigne le P. Charles Irudayam, à la tête de la Commission ‘Justice et Paix’ de la Conférence épiscopale indienne.
L’annonce du verdict a été immédiatement suivie des déclarations des différents responsable de l’archidiocèse catholique de Cuttack-Bhubaneswar, dont le territoire comprend le Kandhamal, lesquels ont assuré qu’ils feraient pression sur l’Etat de l’Orissa – qui s’est portée partie civile dans l’affaire –, pour qu’il fasse appel de la décision prise par la Cour de Phulbani. Le juge Rajendra Kumar Tosh, qui a fait connaître son verdict hier soir 29 octobre, est le même magistrat qui avait condamné le 1er octobre dernier sept chrétiens pour le meurtre du leader hindouiste Laxmanananda Saraswati.
« Les faits ne peuvent être niés, a affirmé le P. Santhosh Digal, de l’archidiocèse de Cuttack-Bhubaneswar. Une église et 14 maisons ont été incendiées, et le système judiciaire ne sanctionne pas ceux qui ont fait cela ! »
John Dayal, secrétaire général du All India Christian Council (AICC), a fait part de ses craintes que cette nouvelle injustice ne plonge à nouveau les chrétiens dans la terreur, les coupables ayant été relâchés et la protection de leurs victimes étant loin d’être assurée.
Dans un communiqué de presse diffusé aujourd’hui, le Global Council of Indian Christians (GCIC) a appelé la Commission nationale des droits de l’homme à « lancer une enquête indépendante sur l’implication des autorités de l’Orissa dans l’étouffement des affaires concernant les violences antichrétiennes au Kandhamal ».
Le président du GCIC, Sajan George, a souligné que « les preuves, dans le cadre du procès de ces 54 hommes, étaient évidentes et incontestables », concluant au parti pris des juges dans le Kandhamal et à la nécessité de dépayser l’affaire. Il a rappelé également qu’en octobre 2012, la Cour suprême de l’Inde avait estimé que les tribunaux spéciaux mis en place en Orissa pour juger les personnes impliquées dans les violences antichrétiennes de 2008, « ne semblaient pas appliquer la justice de façon objective et équitable ».
Plus de cinq ans après les faits, ce verdict du 30 octobre absolvant 54 hindouistes s’ajoute à la décision rendue il y a quelques semaines, condamnant sept chrétiens à l’emprisonnement à vie pour le meurtre du Swami Saraswati – dont la mort a été à l’origine des violences de 2008 –, un crime revendiqué pourtant depuis le début par les maoïstes.
Il est manifeste, conclut Sajan George, que les hindouistes poursuivent avec la complicité des autorités, « leur programme de destruction totale des communautés chrétiennes ».
(eda/msb)