Eglises d'Asie

Un groupe d’extrémistes incendie une église la veille de Noël

Publié le 02/01/2014




Un groupe d’hindouistes présumés a mis le feu à une église protestante ainsi qu’aux maisons de quatre récents convertis au christianisme. L’attaque s’est produite le 23 décembre dans le village de Kichet situé dans le district de Dhading, à quelques km de la capitale.

« Nous n’en revenions pas de trouver notre église complètement détruite, et nous avons mis un petit moment à réaliser ce qu’il s’était passé », rapporte Rima Tamang, l’une des paroissiennes du village, qui était absente au moment des faits. « Certains habitants ont dit qu’ils avaient essayé d’arrêter les assaillants qui étaient armés, mais ils ont été violemment frappés ; le gouvernement doit absolument arrêter les responsables et les sanctionner », a-t-elle confié le 30 décembre à l’agence AsiaNews.

Les maisons incendiées appartenaient à de nouveaux convertis, Ganga Lama Tamang, Lama Bahadur Tamang, Lama Bokta et Bikram Lama. Pour la plupart des habitants du village, il ne fait aucun doute que ces incendies criminels sont des avertissements adressés à ceux qui envisageraient de se convertir à leur tour au christianisme.

« Les autorités renâclent à enregistrer nos plaintes et ignorent systématiquement les affaires qui concernent les chrétiens. Un incident comme celui-ci ne devrait pas arriver dans un pays laïc », s’insurge le Rév. Chari Bahadur Gahatraj, qui défend régulièrement les droits des chrétiens, à  la tête de la Federation of National Christian Nepal (FNCN).

Cette fois-ci, l’affaire a été révélée par les médias dès le lendemain 24 décembre. « Un groupe d’environ neuf personnes est arrivé au village dans l’après-midi du 23 décembre, rôdant un moment les armes à la main avant d’entrer brusquement dans l’église de Kichet et d’ attaquer les habitants », peut-on ainsi lire dans l’Himalayan Times du 24 décembre. Le site d’information népalais précise que les habitants étaient en pleins préparatifs de la veillée de Noël lorsque les assaillants ont pénétré dans l’église.

Les agresseurs ont ensuite mis le feu aux maisons de quatre chrétiens, « les réduisant en cendres », poursuit le quotidien népalais, lequel conclut que « les raisons de l’attaque n’ont pas encore été déterminées par les services de police ».

Le responsable de la police locale, Ashok Singh affirme quant à lui ue ses services n’ont été avertis des faits que tardivement : « Mais dès que nous avons appris ce qu’il s’était passé, nous nous sommes immédiatement rendus sur les lieux pour investigation », a t-il déclaré à l’Himalayan Times.

Le ministre de l’Information et porte-parole du gouvernement, Madhav Poudel, a minimisé l’incident, affirmant notamment qu’aucun groupe organisé n’était derrière l’attaque des chrétiens. « Des investigations sont en cours et nous serons bientôt en mesure de donner plus d’informations sur l’affaire », a-t-il promis.

Depuis 2008, Noël est devenu un jour férié au Népal et les chrétiens ont désormais le droit de d’afficher leur foi en public, en décorant leurs fenêtres et les alentours de leurs maisons et églises. Ces manifestations d’expression religieuse ont cependant déclenché une vague d’attaques antichrétiennes qui se manifestent chaque année au moment des fêtes, généralement orchestrées par les extrémistes hindous partisans d’un retour à la monarchie et à l’hindouisme en tant que religion d’Etat.

Cependant dans d’autres parties du Népal, les fêtes de Noël ont été l’occasion, tout au contraire, de démarches de réconciliation et de fraternité entre les différentes religions qui cohabitent dans le pays.

Le P. Lawrence Maniya, qui travaille dans cette région depuis plus de 35 ans, rapportait le 20 décembre dernier que selon lui, seuls quelques groupes hindouistes minoritaires, faisaient régner la terreur parmi les chrétiens et les autres minorités religieuses, tel la Nepal Defense Army (NDA), dont les membres « devraient être sanctionnés faute de quoi la réconciliation entre les hindous et les fidèles des autres religions ne pourrait jamais se faire ».

La nuit de Noël, des centaines de personnes se sont pressées à la messe de minuit dans l’église de l’Assomption de Katmandou, celle-là même où la NDA avait perpétré un attentat à la bombe meurtrier en mai 2009.

Plus encore que les années précédentes, la célébration de la Nativité a rassemblé un grand nombre de participants non-chrétiens, essentiellement hindous et bouddhistes. « Aux yeux de Dieu, nul n’est abandonné ou mal considéré ; la grâce du Seigneur est destinée à tous ceux qui désirent vivre sous son regard », a déclaré lors de l’homélie de Noël, le P. Robin Rai,  vicaire de la cathédrale de l’Assomption.

Cette ouverture aux autres, sans discrimination, est selon le sociologue népalais Manohar Sharma, ce qui aujourd’hui attire vers le christianisme de plus en plus de fidèles d’autres religions, en particulier ceux de l’hindouisme qui « est constitué d’une foule de pratiques discriminatoires »

Les catholiques seraient aujourd’hui au Népal plus de 10 000 et, selon certaines statistiques, l’ensemble des chrétiens toutes confessions confondues atteindrait les deux millions de personnes.

(eda/msb)