… dans les grandes villes où la Saint-Valentin gagne en popularité au sein de la jeunesse des classes moyennes.
Dans l’Etat du Madhya Pradesh où ils sont très influents, le Vishwa Hindu Parishad (VHP) et sa branche jeunesse, le Bajrang Dal, ont publié une déclaration commune mardi 11 février à l’issue d’une manifestation qui s’est tenue à Bhopal.
Brandissant des tridents et des matraques, les membres des deux organisations hindouistes ont menacé les couples « qui envisageraient de fêter la Saint-Valentin malgré leurs avertissements » qu’ils « n’auraient pas peur d’utiliser des ‘lathi’ (bâtons)pour leur donner une leçon de culture indienne », rapporte The New Indian Express dans son édition du 13 février.
« Nos militants patrouilleront dans la ville et se rendront dans tous les lieux fréquentés par les couples », a expliqué l’organisateur de la manifestation, Daulat Singh Chouhan. « Si jamais nous apercevons qui que ce soit en train de porter atteinte à la décence et de se livrer à des activités immorales, nous lui donnerons une bonne leçon et nous n’hésiterons pas à frapper », a-t-il affirmé, ajoutant que les membres des deux groupes étaient prêts à se confronter à la police.
« Que la police fasse son travail, nous ferons le nôtre », a lancé de son côté le secrétaire général de district pour le VHP, Rajesh Sahu. « Il est du devoir du gouvernement de l’Etat de s’assurer qu’il n’y ait aucune scène obscène le 14 février », a-t il poursuivi, précisant que ses militants avaient déjà effectué des « patrouilles d’avertissement » dans la ville de Bhopal. « Nous ne sommes pas contre l’amour, mais les couples doivent apprendre comment se comporter en public ; ceux qui feront preuve d’un comportement indécent devront en subir les conséquences », a-t-il mis en garde.
Des déclarations semblables ont été diffusées à la presse par le Bajrang Dal de l’Etat voisin du Chhattisgarh. A Raipur, rapporte le Times of India du 12 février, l’organisation a averti que ce vendredi serait un jour de mobilisation contre « la conspiration occidentale visant à détruire les valeurs fondamentales de l’hindouisme » et qu’il ne serait « toléré aucun geste indécent ni aucune célébration de la Saint-Valentin ».
Comme tous les ans, les menaces les plus importantes ont été émises par le Shiv Sena (‘l’armée de Shiva’) dont les militants ont déjà, dans différentes grandes villes de l’Inde, attaqué et incendié des magasins vendant des cartes ou des fleurs pour la Saint-Valentin, ainsi que différents commerces dont les vitrines avaient été décorées pour l’occasion.
« Cette fête de la dépravation venue de l’Occident est étrangère à notre culture et corrompt nos jeunes gens en faisant la promotion des relations sexuelles pré-maritales », a déclaré Vinayak Raut, l’un des principaux leaders du parti hindouiste, le 12 février à l’agence Reuters. « Nous sommes prêts à défendre nos valeurs indiennes et à passer à l’attaque si nos avertissements ne sont pas écoutés », a t-il ajouté.
En 2013, des groupes du Shiv Sena avaient fait la Une des journaux indiens pour avoir agressé des couples se tenant la main dans la rue, s’embrassant en public ou assis dans des bars le jour de la Saint-Valentin. « Les Occidentaux essayent de briser le système familial indien traditionnel, explique un jeune militant du Shiv Sena, sur le site d’information en ligne OneIndia, du 12 février. Offrir des fleurs en pleine rue, montrer son affection en public, s’embrasser devant tout le monde, c’est vraiment dégoûtant. Quelle différence y a-t-il entre nous et les animaux, alors ? » Le jeune homme a participé aux attaques des femmes dans les bars en 2013 et se dit prêt à recommencer.
D’autres mouvements issus de la mouvance hindouiste du Sangh Parivar (1) ont émis les mêmes avertissements dans plusieurs Etats de l’Inde : de l’Hindu Janajagruti Samiti (HJS) au groupuscule Gau Raksha Samiti – des organisations récentes –, les groupes hindouistes les plus divers ont convoqué les journalistes pour rappeler leur position vis-à-vis de la Saint-Valentin et leur intention d’empêcher par tous les moyens la célébration de cette fête, prétexte « aux viols et autres atrocités ».
A Mangalore, rapporte Daijiworld Media Network (DMN), Prasanna Kamath, coordinateur de l’HJS pour le Karnataka, a déclaré mercredi 12 février que chaque Etat de l’Inde devrait interdire la Saint-Valentin et remplacer cette fête « occidentale et mercantile » par des célébrations issues de l’hindouisme traditionnel. « Dans certains collèges, écoles ou lieux touristiques, on célèbre encore la Saint-Valentin et des multinationales font des affaires en or en vendant des gadgets sur ce thème, dévoyant ainsi les jeunes générations indiennes », s’est-il indigné. « Par conséquent, le gouvernement (…) doit faire de la prévention auprès des jeunes dans les milieux scolaires vis-à-vis de cette fête et même l’interdire totalement, en encourageant toutes les célébrations liées à la culture indienne », a t-il conclu, affirmant que puisque « la Malaisie et d’autres pays avaient interdit la Saint-Valentin », tous les Etats de l’Inde devaient faire de même, et suivre l’exemple du « Chhattisgarh, qui l’avait remplacée par le “Parents’ Day” » (2).
(eda/msb)