Eglises d'Asie – Maldives
La peine de mort pour les enfants rétablie au nom de la charia
Publié le 22/05/2014
… y compris pour les enfants qui se seraient rendus coupables de meurtre.
Cette mesure, qui a été annoncée par le président Abdulla Yameen Abdul Gayoom comme nécessaire pour « appliquer parfaitement la charia », met fin à un moratoire de 60 ans de la peine capitale (la dernière exécution remontant à 1953).
Aux Maldives, où l’islam est religion d’Etat, l’âge de la responsabilité criminelle est fixé à 10 ans de manière générale, voire à 7 ans pour certains crimes « hadd », comme le vol, la fornication, la consommation d’alcool et l’apostasie. Le hadd ou le hudud sont des sanctions prévues par la charia, la loi religieuse islamique, pour des infractions précises.
Mais si les enfants peuvent désormais être condamnés à la peine capitale, ils ne pourront être exécutés avant l’âge de 18 ans, et devront attendre dans le couloir de la mort jusqu’à leur majorité.
Dès le 27 avril, le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a dénoncé une « grave violation des droits de l’homme » ainsi que des conventions internationales signées par la République des Maldives. « Les traités internationaux des droits de l’homme, et en particulier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention relative aux droits de l’enfant, que les Maldives ont ratifiés, imposent une interdiction absolue de la peine de mort pour des personnes âgées de moins de 18 ans au moment où le crime a été commis », a notamment déclaré Ravina Shamdasani, porte-parole du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme lors d’une conférence de presse le 29 avril dernier. « Nous demandons au gouvernement [maldivien] d’abroger le nouveau règlement ainsi que toutes les dispositions légales concernant la peine de mort », a-t-elle ajouté.
Catherine Ashton, Haute Représentante de l’Union européenne, a également fait part le 30 avril de sa « vive préoccupation ». « L’abolition de la peine de mort est l’un des objectifs fondamentaux de la politique de l’Union européenne en matière de droits de l’homme dans le monde », a-t-elle rappelé, engageant instamment « le gouvernement [maldivien] à maintenir le moratoire sur la peine de mort en toutes circonstances, notamment dans les cas où les délinquants sont des mineurs, et à œuvrer à l’abolition totale de cette pratique ».
Face aux réactions de la communauté internationale, le président Abdulla Yameen Abdul Gayoom a répondu vouloir maintenir sa décision, affirmant que « le meurtre devait être puni par le meurtre ».
Le 29 avril, lors d’une conférence de presse, le ministre de l’Intérieur maldivien, Umar Naseer, a déclaré que « la communauté internationale devait comprendre que les Maldives avaient de bonnes raison de vouloir faire appliquer cette loi ». Le ministre a poursuivi en expliquant que « le pays était à 100 % musulman » et que cela avait pour conséquence de « partager certaines valeurs ».
Depuis l’élection en novembre 2013 d’Abdulla Yameen, porte-étendard d’un islam radical, après des élections sous surveillance internationale, la République des Maldives voit s’institutionnaliser la tendance à une application stricte de la charia, tendance amorcée ces deux dernières années.
Parallèlement, un durcissement de la sécurité et du renforcement du pouvoir présidentiel est également à l’œuvre, inquiétant son voisin indien qui dénonce « une défaite de la démocratie ».
(eda/msb)