Eglises d'Asie

Les voyages du pape François en Asie se précisent

Publié le 11/06/2014




 Le pape François avait confirmé l’information dans l’avion qui le ramenait de Terre sainte le 26 mai dernier : outre le voyage en Corée du Sud à l’occasion des VIèmes Journées asiatiques de la jeunesse en août prochain, un autre déplacement en Asie était au programme. Ce deuxième voyage emmènera le chef de l’Eglise catholique au Sri Lanka puis aux Philippines. …

 … Seules les dates manquaient. Le cardinal Malcolm Ranjith, archevêque de Colombo, les a données hier : le pape sera au Sri Lanka du 13 au 15 janvier 2015. Aucune précision n’a encore été communiquée concernant la durée du séjour du pape aux Philippines.

A son retour des JMJ (Journées mondiales de la jeunesse) de Rio (juillet 2013), le pape François avait évoqué ce double voyage au Sri Lanka et aux Philippines. « J’ai reçu une invitation à me rendre au Sri Lanka ainsi qu’aux Philippines », expliquait-il alors aux journalistes. Sachant que bon nombre d’autres pays ont invité le pape à venir les visiter, le pape ajoutait : « Je dois aller en Asie. Parce que le pape Benoît n’a pas eu le temps de se rendre en Asie et que c’est important. »

Si l’Asie occupe sans doute une place particulière dans le cœur du pape (il a témoigné qu’étant jeune, il avait le désir de partir comme missionnaire au Japon), ses prochains déplacements dans ces trois pays seront avant tout de nature pastorale mais ils n’en revêtiront pas moins une dimension politique importante.

Concernant le Sri Lanka, pays visité en décembre 1970 par le pape Paul VI puis en janvier 1995 par le pape Jean Paul II, le voyage du pape François prend place dans une période difficile pour l’Eglise catholique locale. En janvier dernier, recevant les évêques sri-lankais pour leur visite ad limina, le pape les avait exhortés « à continuer à jouer leur rôle dans la réconciliation entre le gouvernement et la minorité tamoule ». De fait, si la communauté catholique (environ 7 % de la population) présente la particularité de réunir à la fois des Tamouls et des Cinghalais, son unité est menacée par les très profonds antagonismes qui séparent les deux populations.

Par ailleurs, le pape François sera reçu par le président en place, Mahinda Rajapaksa, lequel refuse que les Nations Unies viennent enquêter sur place sur les violations des droits de l’homme et crimes de guerre commis durant le conflit avec les Tigres tamouls. Le programme du pape durant les deux jours qu’il passera au Sri Lanka n’est pas encore connu, mais il reste à voir où et comment le souverain pontife posera un geste de paix pour favoriser la réconciliation entre Tamouls et Cinghalais. En novembre dernier, lors du dernier somment du Commonwealth, le Premier ministre britannique avait dû fermement imposer sa volonté de se rendre à Jaffna, dans la partie de l’île où les stigmates de la guerre étaient encore les plus visibles. Si David Cameron avait obtenu de faire un déplacement éclair dans cette ville, le président Rajapaksa n’avait pas dissimulé sa contrariété à ce propos.

A priori, le déplacement aux Philippines, le plus grand pays catholique d’Asie, présente moins de difficultés politiques (1). Le cardinal archevêque de Manille, Mgr Luis Antonio Tagle, a fait part du désir du pape de se rendre auprès des victimes du typhon Yolanda (Haiyan) et du tremblement de terre qui ont frappé les Visayas, au centre de l’archipel, l’an dernier. L’effet de « sa venue (dans les régions affectées) sera plus fort que le typhon, mais dans un sens positif », a déclaré le cardinal.

Pour autant, les sujets sensibles ne manquent pas. L’Eglise catholique locale dénonce régulièrement les effets négatifs du développement économique et de la mondialisation, que ce soit du fait de l’émigration des Philippins, hommes et femmes, et de ses conséquences sur les familles, que ce soit du fait de l’extrême inégale répartition des richesses qui caractérise ce pays ou encore que ce soit du fait des atteintes à l’environnement. L’Eglise des Philippines n’a par ailleurs jamais hésité à croiser le fer avec les autorités politiques dès lors qu’elle estime que l’action gouvernementale est contraire à la défense de la vie.

Enfin, si l’accord signé en mars dernier entre le gouvernement et le MILF ouvre une perspective de résolution du conflit de Mindanao, le sud philippin demeure une région où la paix reste à construire. Le cardinal Orlando Quevedo, dont le diocèse de Cotabato est enclavé dans la future Région autonome Bangsamoro, vient de déclarer qu’il aimerait que le pape François se rende en visite à Mindanao. Tout comme le pape vient de poser des actes et des gestes pour la paix en Terre sainte, il « peut peut-être contribuer à la paix à Mindanao », a déclaré le cardinal depuis Manille, ajoutant qu’il espérait que si le pape se rende auprès des victimes du typhon et du tremblement de terre, il pourrait aussi se rendre « à Mindanao auprès des victimes d’une catastrophe faite de la main des hommes ».

Pour le déplacement en Corée du Sud (2), s’il sera l’occasion d’un coup de projecteur sur une des Eglises les plus dynamiques d’Asie, le pape s’adressera à la jeunesse de tout un continent. Les VIèmes Journées asiatiques de la jeunesse (Asian Youth Day 2014), organisées dans le diocèse de Daejeon du 10 au 17 août prochain, ont pour thème : « Jeunesse d’Asie, réveille-toi ! La gloire des martyrs brille sur toi ! ». Réunissant des délégations venues de près de trente pays, ces journées seront d’abord une occasion pour des jeunes venus de pays où, le plus souvent, les catholiques ne sont qu’une petite minorité de se rencontrer et de partager une espérance commune. Le pape, présent du 14 au 18 sur le sol coréen, célèbrera le 18 août une messe à Séoul pour la béatification de 124 martyrs coréens tués « en haine de la foi » entre 1791 et 1888, une messe célébrée à quelques dizaines de kilomètres du voisin nord-coréen où le fait d’être chrétien vous envoie en camps ou à la mort.

(eda/ra)