Eglises d'Asie – Inde
Madhya Pradesh : chrétiens et musulmans ont été soulagés d’apprendre que le culte du soleil sera facultatif dans l’ensemble des établissements d’enseignement
Publié le 18/03/2010
Le Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP), à la tête de l’Etat depuis le 3 décembre 2003, avait déclaré que cette action de masse préparerait l’introduction définitive de cette pratique dans l’ensemble des établissements d’enseignement. C’est un groupe de fidèles musulmans qui avait entrepris, le premier, une démarche auprès des autorités judiciaires après la décision du gouvernement, le 3 janvier, d’organiser une grande “surya namaskar” (‘salutation au soleil’) dans l’ensemble des écoles et des collèges.
Aussitôt la décision de la Haute Cour connue, Mgr Pascal Topno, archevêque catholique de Bhopal, a exprimé devant les journalistes sa joie, tout en soulignant que la cour “avait ainsi confirmé les valeurs séculaires de la Constitution indienne ». Il est vrai que l’archevêque s’était déjà joint précédemment aux musulmans et aux tribus aborigènes dans leur opposition au gouvernement (1).
L’un des responsables musulmans, Haji Mohammed Haroon, a lui aussi déclaré aux journalistes combien sa communauté avait été soulagée. Pour lui, un musulman cesse d’être musulman quand il adore des dieux autres qu’Allah, ajoutant que le soleil est une création d’Allah et que l’adorer serait un sacrilège pour un musulman (2).
Mgr Topno pense que, par le biais de cette décision, le gouvernement essaye insidieusement d’imposer les pratiques hindoues et de contrecarrer ainsi les droits des groupes religieux minoritaires. “Puisqu’il s’agit d’un culte du soleil, cela nous est interdit a-t-il expliqué. Le Surya namaskar est considéré comme faisant partie du culte hindou, auquel “un chrétien ne peut donc pas participer”. Il a spécifié clairement que l’Eglise ne s’opposerait pas à ce programme s’il s’insérait à l’école uniquement en tant qu’exercice physique, et non comme un acte religieux (3).
Gulzar Singh Markam, président du Gondwana Ganatantra Party (Parti démocratique du pays Gond), pense également que le gouvernement BJP essaie, sous divers prétextes, d’imposer les pratiques de l’hindouisme. Le Gond est un groupe tribal important dans l’Etat du Madhya Pradesh. Précédemment, le gouvernement avait déclaré qu’il n’entendait pas contraindre les institutions de l’enseignement privé. Mais le P. Anand Muttungal, porte-parole de l’Eglise catholique au Madhya Pradesh, a confié à l’agence Ucanews que les écoles libres avaient reçu une lettre du ministère de l’Education, menaçant de retirer leur affiliation officielle aux écoles qui refuseraient d’organiser la cérémonie du 25 janvier. Le prêtre a précisé que l’Eglise avait prévu de saisir la Haute Cour même si le gouvernement exigeait que les élèves des seules écoles gouvernementales participent au surya manaskar, étant donné que les enfants des minorités ethniques étudient aussi dans des écoles publiques.
Mgr Topno a expliqué que l’Eglise catholique était devenue méfiante après avoir remarqué les efforts constants du gouvernement pour instiller la promotion idéologique de l’hindouisme. Gulzar Singh Markam, de son côté, a expliqué que, d’après les croyances religieuses de son ethnie, le surya namaskar était un sacrilège. Il a ainsi accusé le gouvernement de s’écarter de son “véritable devoir celui d’assurer, dans l’Etat, le développement, la loi et l’ordre. Il n’a pas oublié non plus qu’en septembre 2006, le gouvernement avait essayé d’imposer un chant controversé. Le Rashtriya Swayamsevak (Corps national des volontaires, RSS), en effet, voulait que le chant Vande Mataram (‘obéissance à la mère’) devienne l’hymne national. Le RSS fédère des groupes d’extrême droite qui veulent faire de l’Inde un Etat théocratique, le BJP étant considéré comme son aile politique.
Des hindous eux-mêmes s’opposent aux manouvres du gouvernement. H. P. Verma, un universitaire à la retraite, les estime injustifiées et contraires à la structure laïque du pays comme à son esprit. Ces manouvres sont de réelles menaces contre la démocratie nationale, a-t-il assuré.