Eglises d'Asie

Le centre d’accueil des réfugiés montagnards du Vietnam à Phnom Penh vient de fermer définitivement ses portes

Publié le 16/02/2011




Le 15 février 2011, une page d’histoire a été tournée avec la fermeture, à Phnom Penh, du camp de réfugiés montagnards venant des Hauts Plateaux du Centre-Vietnam. Ce centre d’accueil fonctionnait depuis plus de dix ans sous le patronage du Haut Commissariat pour les réfugiés des Nations Unies. Il travaillait à réinstaller dans des pays tiers plusieurs milliers de ressortissants des minorités ethniques du Vietnam, …

… en butte aux persécutions et tracasseries des autorités.

L’initiative de cette mesure de fermeture appartient en dernier ressort au gouvernement cambodgien. A la fin de l’année dernière (1), il avait fait savoir au Haut Commissariat aux réfugiés que son centre d’accueil devrait disparaître avant le 1er janvier de l’année 2011. Il avait, en même temps, fait connaître sa volonté de ne plus accepter de demandeurs d’asile venant des pays voisins. A la demande du Haut Commissariat, la date fixée pour la fermeture du camp fut repoussée jusqu’au 15 février. Au moment de l’annonce gouvernementale, il restait 75 demandeurs d’asile à l’intérieur du camp. La semaine dernière, cinquante d’entre eux ont été envoyés au Canada. Cinq autres sont sur le point de partir aux Etats-Unis, qui les a acceptés. Dix des vingt pensionnaires du camp encore sur les lieux obtiendront une résidence provisoire à Phnom Penh en attendant d’être accueillis définitivement dans un pays tiers. Les dix derniers n’ont pas eu cette chance, puisqu’ils n’ont pas obtenu le statut de réfugié auprès des instances du Haut Commissariat.

 

Il est prévu que, très tôt dans la matinée du 16 février 2011, ces dix demandeurs d’asile seront expulsés vers le Vietnam. Cependant, le 15 février, deux d’entre eux refusaient toujours d’exprimer par écrit leur accord avec leur rapatriement.

 

Dans un communiqué de presse publié le 14 février 201, l’organisation américaine Human Rights Watch (2) a vivement réagi à la fermeture du centre d’accueil des réfugiés et à l’expulsion d’une dizaine d’entre eux. Elle exprime sa préoccupation à leur sujet, estimant que le gouvernement vietnamien continue ses persécutions contre les Montagnards des Hauts Plateaux du centre, dont beaucoup sont chrétiens.

 

L’organisation américaine déplore aussi la fermeture définitive du centre. Cette mesure ne mettra pas un terme à l’exode des Montagnards du Centre-Vietnam. D’autres personnes de cette même région viendront réclamer asile auprès du gouvernement cambodgien, signataire de la Convention internationale sur les réfugiés de 1951 et qui a donc le devoir d’accueillir les demandeurs d’asile, même en l’absence d’un centre d’accueil placé sous la responsabilité de l’ONU. La fermeture du camp ne change rien aux obligations contractées par le Cambodge en adhérant à la convention sur les réfugiés.

 

Par ailleurs, l’organisation humanitaire américaine a affirmé sa conviction que des Montagnards du Centre-Vietnam continuent d’endurer des persécutions de la part des autorités centrales. En 2010 encore, de nombreuses entraves au culte chrétien, aux assemblées domestiques, des contrôles intempestifs des activités religieuses ont été relevés en divers lieux.

 

Ainsi, Human Rights Watch semble penser que la fermeture du camp de Phnom Penh ne mettra pas un terme à l’exode des Montagnards du Centre-Vietnam vers le Cambodge. Celui-ci a débuté voilà plus de dix ans, en 2001. Cette année-là, la répression et les procès qui suivirent le premier soulèvement des Montagnards entraînèrent un premier exode des militants les plus engagés vers le Cambodge. Un millier de ces premiers demandeurs d’asile avaient été ensuite admis dans un pays d’asile définitif, la plupart aux Etats-Unis. Trois ans plus tard, après le second soulèvement du week-end pascal 2004 et la violente répression qui suivit, le mouvement d’exode avait repris, moins massif mais durable, un mouvement aussi mal considéré par les autorités vietnamiennes que cambodgiennes. Les chiffres précis de la totalité des Montagnards des Hauts Plateaux ayant franchi la frontière depuis avril 2004 ne sont pas disponibles. En janvier 2005, des accords tripartites ont été signés entre le Haut Commissariat, le Vietnam et le Cambodge (2), prévoyant la possibilité pour les Montagnards de revenir volontairement dans leur pays. En 2006, 700 Montagnards du second exode avaient déjà choisi de s’établir dans un pays tiers, généralement aux Etats-Unis. Depuis les accords tripartites, des rapatriements ont eu lieu à de nombreuses reprises, touchant des Montagnards n’ayant pas obtenu du Haut Commissariat le statut de réfugié. D’autres, arrêtés par la police cambodgienne avant de rencontrer les fonctionnaires du HCR, ont été directement livrés à la police vietnamienne.

 

Par ailleurs, les accords tripartites de janvier 2005 donnent au Haut Commissariat aux réfugiés un droit de regard sur les conditions d’existence des Montagnards ayant choisi le retour dans leur pays. Des délégués du HCR sont venus rendre visite aux anciens réfugiés revenus au Vietnam. Certains des rapports publiés à l’issue de ces voyages ont été violemment critiqués par des associations humanitaires concernées par le problème, notamment Human Rights Watch.