Eglises d'Asie

Un nouveau projet d’ordonnance sur la religion est soumis à l’appréciation des diverses religions du Vietnam

Publié le 18/03/2010




Les différents évêchés du Vietnam ont reçu le mois dernier une nouvelle mouture d’un projet d’ordonnance sur la religion promise depuis le mois de juillet 1998 par une directive du bureau politique. Selon une note placée en tête de ce texte, il s’agirait du 19e projet de ce type soumis à l’appréciation des évêques et du clergé vietnamiens (1).

Ce nouveau projet d’ordonnance avait été précédé d’un premier publié le 25 décembre 2000 (2). Il ne comporte que peu d’éléments nouveaux par rapport à la multitude de textes de ce type déjà publiés par le gouvernement vietnamien depuis la fondation de la République démocratique du Vietnam en 1954. Ils n’ont, en effet, jamais fait défaut, depuis le premier décret signé en 1954 par Hô Chi Minh, suivi en 1977 du décret 297 CP signé de Pham Van Dông, auquel succéda le décret 69 HDBT, signé le 21 mars 1991 par Dô Muoi. Vint ensuite le décret n° 26/1999/ND-CP du 19 avril 1999, signé du Premier ministre Pham Van Khai, sans compter de multiples lettres d’application, amendements et compléments divers (3). L’ordonnance en cours d’évaluation se différencie de textes précédents par des marques plus formelles qu’essentielles. A la différence des autres textes qui se présentaient comme des décrets (Quyêt Dinh) du Premier ministre, il s’agit aujourd’hui d’une ordonnance (Phap Lênh) qui, à ce titre, sera promulguée par le bureau de l’Assemblée nationale, sans toutefois être soumise aux votes des députés.

La première version du projet de décembre 2000 avait suscité un grand nombre de réactions négatives. Un prêtre de Saigon, interrogé par l’agence Vietcatholic News (4) après une réunion de prêtres consacrée à l’ordonnance, résumait l’opinion générale en disant que l’ordonnance était beaucoup trop longue (huit pages) ; une ligne aurait été suffisante, qui aurait affirmé que, pour garantir la liberté religieuse, le Parti communiste renonçait à son monopole et rétablissait des partis d’opposition ayant la charge de contrôler la politique de liberté religieuse de l’Etat. Les opinions apportées par les prêtres lors des débats sur ce type de textes ne contribuent en fin de compte qu’à intensifier le contrôle de l’Etat sur l’exercice de la religion. Une critique sévère du projet d’ordonnance avait été publiée par les évêques de la province ecclésiastique de Hô Chi Minh-Ville. On peut résumer l’esprit de cette critique par une phrase extraite du texte des évêques : “La liberté religieuse comme toutes les libertés est un droit et un droit ne s’accommode pas d’un système ‘fonctionnant par demande d’autorisation et octroi d’autorisation’.” Cette idée avait été ensuite au cour de la lettre envoyée à l’Assemblée nationale à l’issue de la dernière assemblée des évêques, lettre reprise par l’archevêque de Hô Chi Minh-Ville en janvier 2003 (5).

En fait, peu de choses ont changé dans ce 19e projet d’ordonnance. Le changement le plus marquant est celui qui touche les treize définitions des réalités religieuses proposées dans la première version. Certaines ont été purement et simplement supprimées comme celles de la croyance foi en des forces surnaturelles de la religion communauté de personnes de même croyance de l’Eglise (identifiée au clergé et à la hiérarchie), de la superstition action anti-scientifique Les autres ont été légèrement remaniées. Comme dans la résolution sur la religion publiée à l’issue du dernier plénum, on peut remarquer une volonté d’engager toutes les forces politiques dans l’application de la politique religieuse de l’Etat. On peut lire à l’article 8 : “Les organes d’Etat, les organisations politiques, politiques et sociales, économiques, professionnelles et sociales, les unités militaires populaires et tous les individus ont la responsabilité de mettre en application les dispositions de la présente ordonnance.”

L’ordonnance dont on connaît aujourd’hui le 19e projet avait été annoncée pour la première fois dans une directive du Bureau politique, publiée le 2 juillet 1988, à l’issue d’une réunion de deux jours qui avait débattu de la question religieuse. Un certain nombre d’initiatives avaient été annoncées parmi lesquelles l’élaboration d’une ordonnance sur la religion qui serait promulguée par le Bureau permanent de l’Assemblée nationale (6). Lors de la parution du décret 26/1999/ND-CP (7), le Bureau des Affaires religieuses faisait savoir que ce nouveau texte n’avait pour but que de compléter les décrets et arrêtés précédents concernant la question religieuse. Une ordonnance était en préparation pour laquelle les autorités religieuses seraient consultées. On précisait même que cette ordonnance serait suivie d’une loi pour laquelle un sondage de l’ensemble de la population serait organisé. Ces intentions avaient été réitérées à plusieurs reprises par Lê Quang Vinh, directeur du Bureau des Affaires religieuses, notamment le 12 octobre 1999, lors de la réunion de la Conférence épiscopale à Nha Trang (8), et dans une interview accordée à la revue des Etudes religieuses (n°2) (9). A chaque fois, M. Vinh a souligné que la publication de cette ordonnance ne sera qu’une étape transitoire avant l’adoption par l’Assemblée nationale d’une loi sur la religion.