Eglises d'Asie

Un nouveau départ pour l’évangélisation

Publié le 25/03/2010




Des études sociologiques récentes et la diffusion de données statistiques sur le développement du christianisme au Vietnam ont alerté les responsables de l’Eglise catholique sur la nécessité d’une réflexion approfondie sur l’annonce de l’Evangile. Pour le moment, les progrès de l’évangélisation ne correspondent ni aux vœux ni aux efforts des catholiques du pays.

Cette inquiétude était au cœur du récent colloque organisé par la Commission épiscopale pour l’évangélisation, qui s’est tenu à Hô Chi Minh-Ville, du 23 au 25 mars dernier. Le thème des débats était ainsi intitulé : « Missionnaires dans le champ pastoral ». Les 26 responsables des sous-commissions diocésaines, ainsi qu’un certain nombre de prêtres, religieux, religieuses et laïcs, sous la conduite de Mgr Michel Hoang Duc Oanh, évêque de Kontum et président de la commission, ont réécouté ensemble les consignes d’évangélisation laissées par le Christ à son Eglise. Ils ont fait le point sur la situation actuelle de la mission dans leur pays et ont cherché les moyens d’imprimer une nouvelle impulsion à l’évangélisation des non-chrétiens.

Voilà déjà quelques années que les études statistiques sur le développement de l’Eglise inquiètent les responsables, dans la mesure où elles indiquent une quasi-absence de progrès démographique du catholicisme vietnamien. Le P. Nguyên Ngoc Son a fait part de ses constatations à ce sujet à ses confrères du doyenné de Tân Dinh (Saigon) durant les récollections mensuelles de février et de mars (1). Selon les conclusions de ce prêtre, spécialisé dans les études sociologiques, de 1960 (date de la création de la hiérarchie catholique au Vietnam) à 2008, la proportion des croyants dans le pays s’est pratiquement maintenue au même niveau.

En 1960, la population globale du Vietnam était estimée à 30 172 000 habitants tandis que le nombre des catholiques s’élevait à 2 094 640, soit une proportion de 6,93 %. Le recensement général de l’année 2000 dénombrait 77 635 400 habitants dans le pays. Lors de leur assemblée générale, cette année-là, les évêques du Vietnam estimaient la population catholique à 5 234 303, soit une proportion de 6,7 %. La comparaison des statistiques montre que, pour la période en question, le développement de l’Eglise au Vietnam suit le rythme de la croissance démographique générale et est assurée davantage par les naissances que par les conversions. Entre 2000 et 2007, le nombre moyen de baptêmes d’adultes au Vietnam a été de 35 000, chaque année. Une grande partie d’entre eux étaient motivés par le désir de se marier avec un partenaire catholique.

Au cours de l’histoire de l’Eglise du Vietnam, le rythme de progression de la population catholique a varié selon les périodes. En 1802 (soit 187 ans après l’arrivée des premiers jésuites et moins de 150 ans après la venue des premiers vicaires apostoliques), les catholiques, au nombre de 320 000, ne représentaient encore que 3 % de la population du pays. Paradoxalement, c’est au cours des terribles persécutions qui sévirent contre les chrétiens à l’époque des Nguyên que se produisit le véritable développement de l’Eglise du Vietnam. De 1802 à 1886, alors que mouraient pour la foi des dizaines de milliers de martyrs, que des chrétientés entières étaient décimées lors de « la révolte des lettrés », le nombre des catholiques a doublé (648 435) et leur proportion dans le pays est passée de 3 à 7 %. Depuis, elle n’a guère varié.

Mgr Oanh, dans une interview publiée sur le site de la Conférence épiscopale après le colloque de mars dernier, a d’abord souligné la difficulté d’apprécier les résultats de l’évangélisation. Cependant, certaines réalités historiques sont indubitables : il ne fait pas de doute, par exemple, que la grande période d’expansion de l’Eglise au Vietnam correspond exactement à la période des persécutions dans la première moitié du XIXème siècle. L’Eglise du Vietnam a vécu à cette époque la même histoire que celle des débuts de l’Eglise universelle. Les progrès accomplis par la suite ont été minimes. Les travaux du colloque ont déterminé un certain nombre de raisons expliquant cet état de choses. Les participants ont déploré par exemple la modestie des investissements consentis par l’Eglise dans le domaine de la mission, surtout si on les compare à ceux qui sont consacrés à la construction ou à d’autres domaines comme la culture ou la formation. Par ailleurs, les difficultés de l’heure ont rendu le travail pastoral plus accaparant, si bien que la tâche missionnaire a été oubliée ou est restée dans l’ombre.

Le récent colloque de Hô Chi Minh-Ville est sans doute le début d’un vaste travail de réflexion qui va se prolonger tout au long de l’année sainte à venir et débouchera sur des options de grande envergure. Pour le moment, le colloque s’est contenté de faire certaines propositions aux diocèses concernant la multiplication des postes missionnaires ou encore la diffusion de la Bible au sein de la population vietnamienne.