Eglises d'Asie – Inde
Fermeture des centres d’adoption des Missionnaires de la Charité
Publié le 13/10/2015
« Nous avons volontairement décidé d’abandonner notre statut de centre d’adoption agréé car, avec ces nouvelles dispositions, il aurait été difficile de continuer la mission commencée par Mère Teresa », peut-on lire dans le communiqué. « Cette décision de fermeture ne s’applique qu’à l’Inde », a précisé Sr Mary Prema, supérieure générale de la congrégation, à l’agence Ucanews. Parmi les différents orphelinats gérés par les Missionnaires de la Charité en Inde, dix-huit d’entre eux ayant reçu l’agrément de centre d’adoption sont concernés.
Mise en place en juillet dernier, la nouvelle disposition du ministère des Droits des Femmes et du Développement des Enfants stipule que « tout parent potentiel, avec ou sans enfant, sans distinction de son statut marital, peut adopter un enfant ». Les centres d’adoption qui refuseront le droit d’adopter à une personne seule pourront voir leur agrément annulé. Pour le Central Adoption Resource Authority, ces mesures ont été prises afin de rendre les procédures d’adoption plus transparentes et permettent à davantage de personnes d’accéder à l’adoption. Elles ont également rendu obligatoire l’inscription des personnes candidates à l’adoption, auprès de l’Agence nationale de l’adoption. Auparavant, il n’existait pas de procédure nationale de contrôle et les centres d’adoption du pays pouvaient aisément, selon leur bon vouloir, assouplir ou renforcer les règles d’adoption, vis-à-vis des parents candidats. Cette absence de contrôle national avait notamment permis le développement d’un marché noir florissant de trafics d’enfants et d’adoption.
La nouvelle directive précise, entre autres, qu’une femme seule pourra adopter un enfant quel que soit le sexe de celui-ci, mais qu’un homme seul ne pourra pas adopter de fille.
Pour le P. Joseph Chinnayyan, porte-parole de la Conférence épiscopale indienne (CBCI), cette mesure ouvre implicitement le droit à l’adoption aux couples de même sexe, aux couples non mariés ou divorcés, ce qui est contraire à l’enseignement de l’Eglise catholique sur la famille et la parentalité.
Les parents adoptants pourront également voir jusqu’à six profils d’enfants – photos, dossiers scolaires et médicaux – avant de se décider. Selon le P. Joseph Chinnayyan, cette clause pose également question, car « elle est contraire à la dignité des enfants ». C’est pourquoi « les évêques indiens soutiennent pleinement les Missionnaires de la Charité dans leur décision ».
D’après Sunita Kumar, porte-parole des Missionnaires de la Charité, « les sœurs ont toujours été très prudentes lorsqu’elles ont envoyé des enfants dans des familles adoptives. Nos centres menaient des enquêtes approfondies sur les familles adoptantes, afin de s’assurer que les enfants seraient en sécurité. Nous avons toujours essayé de trouver des familles saines et solides. Nous ne pouvons prendre de risques dès lors qu’il est question de l’avenir des enfants qui nous ont été confiés. En ce qui concerne des personnes seules, comment pouvons-nous être sûres qu’elles souhaitent sincèrement adopter un enfant ? Que se passera-t-il si l’enfant est maltraité ? », a-t-elle déclaré, en précisant que les Missionnaires de la Charité continueront leurs activités dans les orphelinats, en procurant soin et assistance aux orphelins et aux enfants abandonnés.
Autre soutien venu du monde politique cette fois-ci : celui de Mamata Banerjee, ministre-président du Bengale-Occidental (l’Etat dont la capitale est Calcutta, la ville où s’était installée Mère Teresa), qui, dans un tweet, a assuré les religieuses de son soutien dans leur décision de fermer leurs centres d’adoption. Pour la Congrégation des Missionnaires de la Charité, les adoptions en Inde représentaient 30 % des adoptions dont elles s’occupent à travers le monde.
Actuellement, il n’existe pas de statistiques officielles sur le nombre d’enfants à adopter en Inde mais, selon certaines associations, on recenserait des millions d’enfants susceptibles d’être adoptés. Le taux officiel d’adoption reste toutefois très bas, compte tenu des longues démarches administratives à mener pour adopter un enfant. Entre 2014 et 2015, le Central Adoption Resource Authority a recensé le placement de seulement 4 362 enfants auprès de familles adoptives en Inde, dans un pays qui compte 1,2 milliard d’habitants.
(eda/nfb)