Eglises d'Asie – Japon
La crise économique amène le gouvernement à inciter les travailleurs immigrés brésiliens et péruviens à quitter le pays
Publié le 25/03/2010
… en Amérique latine à différentes époques du XXème siècle (après la crise de 1929 et 1945-1946), fuyant la pauvreté au Japon. Une ou deux générations plus tard, leurs descendants ont fait le chemin inverse, invité par un Japon en proie à une crise de dénatalité aiguë et se trouvant en manque de main-d’œuvre ; ils ont trouvé à s’employer dans les secteurs demandeurs d’une main-d’œuvre peu ou semi-qualifiée. En recourant aux Nikkeijin (‘deuxième génération’) et en favorisant ainsi une définition ethnique de la « nipponitude », le gouvernement japonais évitait d’ouvrir la conception japonaise de l’identité, sans pour autant se donner les moyens d’intégrer culturellement des immigrés ayant du sang japonais dans leurs veines mais n’appartenant pas à la culture japonaise.
Ces derniers mois, du fait de la brutalité de la récession économique, des milliers de Nikkeijin ont perdu leur emploi dans l’industrie automobile ou électronique. Et, pour certains, la perte de leur emploi implique aussi la perte de leur toit, l’employeur assurant fréquemment le logement. Selon le ministère des Affaires sociales, du Travail et de la Santé, le nombre des immigrés qui se sont inscrits auprès des services de placement des chômeurs a été multiplié par onze. Le gouvernement a donc décidé de proposer aux immigrés d’origine japonaise qui sont sans travail de quitter le Japon en étant doté d’un pécule de 300 000 yens (2 300 euros), augmenté de 200 000 yens par personne à charge. La contrepartie est que ceux qui bénéficieront de la prime au retour ne pourront plus jamais prétendre revenir travailler au Japon. « Ce programme a été mis en place pour répondre à un problème social croissant », a justifié Yamashita Hiroshi, haut fonctionnaire du ministère.
Le taux de chômage est en hausse très rapide au Japon. De janvier à février 2009, il est passé de 4,1 % à 4,4 % de la population active et les économistes prédisent qu’il dépassera les 5 % d’ici à la fin de l’année. En incitant les immigrés brésiliens et péruviens venus au Japon avec des contrats spécifiques à quitter le pays, le gouvernement poursuit des objectifs à court terme qui semblent en contradiction avec sa volonté d’entrouvrir le pays à l’immigration étrangère afin de compenser le vieillissement de la population. En 2006, les immigrés brésiliens, avec environ 300 000 personnes, représentaient la troisième communauté étrangère au Japon, après les Coréens et les Chinois ; les immigrés péruviens formaient le cinquième groupe, avec quelque 60 000 personnes.
Avec les immigrés philippins (1), ces communautés brésiliennes et péruviennes présentent la particularité d’être très majoritairement chrétiennes – et catholiques pour la plupart d’entre elles. Leur présence au Japon avait ainsi contribué à changer le visage de l’Eglise catholique au Japon, en doublant le nombre des fidèles. Sur un million de catholiques au Japon, on comptait ainsi, ces dernières années, près de 500 000 catholiques étrangers, qu’ils soient lusophones, hispanophones ou anglophones (2). On peut penser que si la politique de retour au pays amène au départ d’un nombre conséquent de ces immigrés, le visage de l’Eglise au Japon en sera, à son tour, changé.