Eglises d'Asie

Battu aux élections du 10 mai, le Père Panlilio envisage un retour au sacerdoce, qui, selon son évêque, a peu de chances d’aboutir

Publié le 19/05/2010




Les récentes déclarations à la presse d’Eddie Panlilio, prêtre catholique et gouverneur de la province de Pampanga, ont été démenties, le 17 mai dernier, par son supérieur hiérarchique, Mgr Paciano Aniceto, archevêque de San Fernando, sur le site Internet de la Conférence des évêques catholiques des Philippines (CBCP) (1). Le Père Panlilio, dont l’engagement en politique…

… divise depuis plusieurs années l’Eglise des Philippines, avait annoncé en juillet 2009, malgré la réprobation manifeste de sa hiérarchie (2), sa candidature aux élections présidentielles, avant de se rétracter en septembre, en faveur de Benigno Aquino, lequel a été élu le 10 mai dernier (3). Gouverneur de la province de Pampanga depuis 2007, le prêtre controversé et charismatique était déjà « suspendu » par l’Eglise en vertu de l’article 285 du code de droit canon qui interdit aux clercs de « participer à l’exercice du pouvoir » (4). Lorsqu’il s’était présenté comme candidat à la présidence des Philippines, de nombreux prélats, dont Mgr Paciano Aniceto et Mgr Oscar Cruz, archevêque de Lingayen-Dagupan, avaient tenté, en vain, de le faire renoncer à son projet, lui faisant valoir qu’il devrait renoncer à l’état clérical s’il persistait à vouloir briguer la présidence. Le prêtre-gouverneur avait alors déclaré à la presse qu’il était prêt à abandonner « son état de prêtre [qu’il] aimait tellement (…) pour un plus grand amour qui était celui de [son] pays » (5). Sa renonciation quelques mois plus tard à sa candidature aux présidentielles n’avait fait que reculer l’échéance : pour se présenter pour un nouveau mandat à la tête de la province de Pampanga, le Père Panlilio avait finalement fait une demande de réduction à l’état laïc.

 

« Je lui ai dit qu’il avait rompu deux promesses qu’il m’avait faites : la première était de ne se présenter qu’une fois en tant que gouverneur et la seconde était de trouver et de former un laïc pour lui succéder », a expliqué Mgr Paciano Aniceto sur le site Internet de la CBCP. « Il a déclaré aux médias qu’il s’apprêtait à revenir dans les ordres dès que les évêques le lui permettraient, mais il avait déjà rédigé en décembre dernier une requête [demandant sa réduction à l’état laïc] qu’il m’avait adressée et que j’ai envoyée au Saint-Père », s’est indigné le prélat, qui considère que les déclarations à la presse du Père Panlilio ne sont que des « manœuvres de politicien ».

 

L’archevêque de San Fernando a également souligné qu’il serait de toute façon très difficile à l’ancien prêtre de revenir à la prêtrise, son engagement en politique ayant été la cause de nombreuses divisions entre les catholiques et au sein même du clergé. Mgr Paciano Aniceto a ensuite précisé que lorsqu’un prêtre entrait dans le monde de la politique, il prenait des chemins qui différaient considérablement de ceux du sacerdoce et l’amenaient à renier ses valeurs.

 

Interrogé par CBCP News sur les leçons à tirer de « l’affaire Panlilio », le prélat a conclu sur la nécessité d’intensifier la formation des laïcs afin qu’ils prennent davantage de responsabilités en tant que citoyens : « Si nous autorisons les prêtres à briguer des postes politiques, cela n’encourage pas le développement de la formation des laïcs et nous exposons notre clergé à la vanité, l’orgueil et l’ambition. »

 

Le P. Panlilio, 57 ans, avait été élu gouverneur pour un mandat de trois ans en 2007. Déjà à l’époque, alors qu’il avait été suspendu par son évêque, il déclarait vouloir revenir à la prêtrise une fois accompli son mandat en tant que gouverneur et ne pas désirer se représenter (6).

 

Sur un plan politique, dès avant l’élection du 10 mai, la situation du Père Panlilio s’était compliquée. En effet, un nouveau décompte des voix par la Commission électorale (COMELEC) avait annulé, le 6 mai 2010, les résultats des élections de 2007 et désigné comme vainqueur Lilia Pineda, laquelle a, de surcroît, battu le Père Panlilio le 10 mai dernier. Le prêtre-gouverneur, qui avait fondé sa campagne électorale et sa popularité sur la lutte contre la corruption et les jueteng, des jeux d’argent clandestins gérés dans la province de Pampanga par le clan Pineda, a fait appel de la décision de la COMELEC auprès de la Cour suprême (7). Quelle que soit la décision que prendront les juges suprêmes, le mandat de gouverneur du Père Panlilio prendra fin le 30 juin prochain.