Eglises d'Asie

Assemblée plénière des évêques catholiques : une invitation à davantage de simplicité

Publié le 17/03/2016




« L’Eglise en Inde se doit de fuir le cléricalisme et de rejeter le gaspillage, en adoptant une vie simple et en encourageant l’amour et la sauvegarde de la Création », ont affirmé les évêques catholiques indiens, dans la déclaration finale de la 32ème assemblée plénière de la Conférence épiscopale (CBCI), …

… qui s’est tenue à Bangalore, du 2 au 9 mars dernier. Pendant une semaine, les évêques indiens s’étaient retrouvés afin d’échanger sur le thème « Aider l’Eglise à répondre aux défis actuels ».

Quelles principales priorités sont ressorties de cette vaste assemblée, composée de 178 évêques pour 171 diocèses, la plus importante conférence épiscopale d’Asie et la 4ème plus importante du monde ?

Le contexte politique actuel – gouvernement nationaliste (BJP) au pouvoir qui accentue les pressions sur les minorités religieuses – pouvait laisser penser que la liberté religieuse serait un des points saillants des échanges entre les évêques. S’ils ont effectivement abordé cette question en début d’assemblée plénière, dans le contexte dramatique de l’assassinat de quatre religieuses Missionnaires de la Charité au Yémen, ce sont pourtant les priorités de simplicité, de spiritualité et de sauvegarde de la Création qui ont été retenus pour l’Eglise en Inde.

Un appel à davantage de simplicité et de spiritualité

« Nous devons, avant tout, être les bergers de nos troupeaux, des bergers disponibles et serviables. (…). Nos vies de prêtres et d’évêques doivent être un exemple de simplicité et de spiritualité, une source d’inspiration pour tous », ont-ils affirmé, ajoutant qu’« une vie simple signifie ouvrir nos maisons et nos institutions aux plus pauvres » et « redécouvrir la puissance de la parole de Dieu et de la prière dans nos vies ».

Très marqués par le témoignage de vie simple du pape François, les évêques indiens ont retenu son appel à « être authentique, en se libérant des modes de fonctionnement traditionnels, de l’institutionnalisation et du confort et des privilèges conférés par le statut social ou hiérarchique ».

Une simplicité qui, si elle doit se concrétiser dans la vie quotidienne de chaque membre de son clergé, doit également transparaître dans la vie matérielle de l’Eglise, notamment à travers la gestion administrative et économique des paroisses. Les évêques indiens ont donc proposé la création de « conseils économiques et financiers au sein des conseils paroissiaux », afin de développer et d’appliquer les valeurs de « transparence administrative et de responsabilité financière » à tous les échelons de l’Eglise.

Une Eglise plus proche des fidèles et des Indiens

Les évêques ont ainsi réaffirmé la vocation et la mission de l’Eglise en Inde : « En tant que communauté des disciples du Christ, l’Eglise est au service du Royaume de Dieu. L’Eglise, en tant que communauté diverse et accueillante, est le signe de la présence constante du Christ, qui incarne les valeurs d’amour, de justice, d’égalité, de miséricorde et de paix. Comme la lumière, le sel et le levain dans la société, l’Eglise vit en pleine solidarité avec les personnes, et tout particulièrement avec les plus pauvres. »

Pour l’Eglise catholique en Inde, l’enjeu est bel et bien de devenir une communauté proche des gens, ouverte et accueillante dans tous les domaines de la pastorale. « Une nouvelle manière d’être Eglise – représentée par des figures comme la Bienheureuse Mère Teresa et le pape François – appelle à ouvrir de nouvelles routes, à quitter le confort (…), en portant à tous la miséricorde, la grâce et l’amour du Christ », ont insisté les évêques, soulignant les défis internes qu’il reste à relever : déclin des valeurs familiales au profit du consumérisme, vocations, évangélisation et œcuménisme.

Au sein des paroisses, la CBCI a également appelé le clergé à contribuer à l’amélioration de la vie des familles, en multipliant les visites aux familles, en dynamisant la préparation au sacrement du mariage, en développant des programmes d’écoute conjugale et familiale, et en mettant en place une dynamique paroissiale qui permette d’être attentif aux fidèles et de prendre soin des plus faibles, y compris des personnes âgées.

Le défi de la sauvegarde de la Création

Répondant à l’appel du pape en faveur d’un engagement de l’Eglise sur les questions environnementales et l’écologie humaine, les évêques indiens ont également insisté sur la priorité d’éducation en matière de responsabilité écologique.

Chaque paroisse indienne est ainsi invitée à élaborer sa propre feuille de route écologique, à développer des programmes de sensibilisation à l’amour et à la sauvegarde de la Création, et à poser des actes concrets : choix d’énergies renouvelables, utilisation de récupérateurs d’eaux de pluie, développement de l’agriculture biologique, restriction de l’utilisation de matières plastiques et de pesticides, etc.

Enjeux nationaux

Parmi les principaux défis auxquels la nation indienne fait face, les évêques soulignent la pauvreté, l’illettrisme, le travail des enfants, les inégalités croissantes entre riches et pauvres, et les phénomènes migratoires. Interrogé par Ucanews, Mgr Baselios Cleemis, président de la CBCI, a affirmé que « l’Eglise en Inde répond[ait] de manière positive à ces nombreux défis grâce à ses structures éducatives, sanitaires et sociales et ses services auprès des plus pauvres », soulignant qu’« à présent, notre priorité [devait] être de réaffirmer notre engagement à être au service la nation indienne ».

Défi pour l’Eglise, effectivement, de continuer à servir la nation indienne dans un contexte politique tendu, où le principe constitutionnel de liberté religieuse est fortement malmené par des lois anti conversion votées sous l’égide du BJP, le parti nationaliste au pouvoir, qui visent à empêcher les citoyens indiens de changer librement de religion. Qualifiant l’Inde de « pays où se vit le pluralisme », le président de la CBCI, a néanmoins tenu à rappeler que « les chrétiens indiens disposaient d’un espace constitutionnel pour croire, professer et annoncer leur foi » et que l’Eglise faisait confiance aux valeurs démocratiques et à la Constitution indienne.

« Confiants dans la grâce, l’amour et la miséricorde de Dieu, nous cheminons pour accomplir la mission que Dieu nous a confiée. Nous appelons toutes les personnes de bonne volonté présentes en Inde à collaborer avec nous pour une Eglise et une société meilleures ». A nous tous, concluent les évêques, il est demandé « d’obéir à l’appel du Seigneur afin que toutes les périphéries soient touchées par la lumière de l’Evangile ».

Selon le dernier recensement de 2011, l’Inde compte près de 28 millions de chrétiens, soit 2,3 % de la population du pays (1,3 milliard d’habitants). Les catholiques, tous rites confondus (rites latin, syro-malabar et syro-malankar) au nombre de 15,6 millions, représentent 55% des chrétiens indiens.

(eda/nfb)