Eglises d'Asie – Vietnam
Décès, à quelques jours d’intervalle, de deux évêques du Centre-Vietnam, appartenant à deux générations différentes
Publié le 02/03/2017
… Ils étaient les pasteurs de deux diocèses limitrophes, Phan Thiêt et Nha Trang, qui avaient été séparés l’un de l’autre peu avant le changement de régime d’avril 1975.
Ils appartenaient à deux générations différentes. Le plus âgé, Mgr Paul Nguyên Van Hoa, appelé à l’épiscopat en 1975, était évêque émérite du diocèse de Nha Trang. Il était à la retraite depuis de nombreuses années. Le second évêque était encore en pleine activité dans le diocèse de Phan Thiêt, où son décès subit et inattendu a atterré les fidèles.
Mgr Joseph Vu Duy Thông était né en 1952 dans le diocèse de Thai Binh. Il était encore tout jeune lorsqu’il avait rejoint le Sud-Vietnam deux ans plus tard, avec sa famille, dans le grand exode qui a entraîné hors du Tonkin des centaines de milliers de catholiques. Après des études secondaires au petit séminaire de Long Xuyên, à la frontière cambodgienne, puis des études de philosophie à Saigon et enfin une formation sacerdotale au grand séminaire de Saigon, il avait été ordonné prêtre en 1985 pour le diocèse de Saigon. Son ordination sera suivie de quelques années de ministère pastoral dans son diocèse. En 1993, il est envoyé poursuivre des études de théologie à l’Institut catholique de Paris. De retour au Vietnam, il est nommé professeur au grand séminaire Saint-Joseph. C’est le 4 juillet 2000 que le pape Jean-Paul II le nomme évêque coadjuteur de Saigon. Au sein de la Conférence épiscopale, il sera nommé responsable de la Commission pour la culture. En juillet 2009, il devient évêque de Phan Thiêt, où il succède à Mgr Nguyên Thanh Hoan.
Un évêque serein et persévérant face à des autorités méfiantes, voire hostiles
Mgr Paul Nguyên Van Hoa, évêque émérite du diocèse de Nha Trang et ancien président de la Conférence épiscopale du Vietnam, s’est éteint dans la soirée du 14 février 2017. Il faisait partie de cette génération d’évêques nommés et consacrés au cours des bouleversements sociaux et politiques qui ont accompagné la chute du Sud-Vietnam en 1975, comme Mgr Lam, nommé évêque de Dalat, ou encore Mgr Nghi, deuxième évêque de Phan Thiêt, ou encore Mgr François-Xavier Nguyên Van Thuân, nommé archevêque coadjuteur de Saigon.
Mgr Paul Nguyên Van Hoa, alors en poste à Ban Mê Thuot, avait été nommé, le 30 janvier 1975, évêque du diocèse Phan Thiêt, nouvellement créé sur une partie du territoire du diocèse de Nha Trang. La consécration épiscopale fut organisée le 5 avril à Ban Mê Thuot. A cette date, l’offensive militaire des forces du Nord-Vietnam était déjà fort avancée. Elle empêcha l’évêque de se rendre jusqu’au siège de son diocèse. En fait, il n’y parvint jamais car, entre-temps, le Saint-Siège l’avait nommé évêque du diocèse de Nha Trang dont l’évêque titulaire, Mgr François-Xavier Nguyên Van Thuân, venait d’être nommé archevêque coadjuteur de Saigon.
Arrivé sur place, le nouvel évêque dut faire face à la défiance des nouvelles autorités suspectant la légalité de sa nomination à ce poste. Il fallut toute la sérénité et la persévérance du nouvel évêque pour en venir à bout. Les premiers temps de l’évêque dans le diocèse de Nha Trang furent difficiles. Cependant, à force de patience, il réussit à se faire reconnaître et à s’imposer devant les autorités civiles. Il remit peu à peu en marche un diocèse quelque peu traumatisé par le brusque changement de régime. Les anciennes institutions ayant été confisquées, il en fit construire d’autres, en particulier le grand séminaire interdiocésain « Etoile de la mer », qui fut reconnue par les autorités romaines et le pouvoir local. Ce grand séminaire Stella Maris fonctionne encore aujourd’hui au service des diocèses du Centre-Vietnam.
Mgr Paul Nguyên Van Hoa assuma la présidence de la Conférence épiscopale au cours de deux mandats successifs (1989-1995). Sous son impulsion, l’assemblée des évêques se structura fortement et de nouvelles commissions épiscopales furent créées, prenant ainsi en charge divers secteurs pastoraux de l’Eglise du Vietnam. Sa présidence bienveillante ne manqua pas d’autorité. Il contredit même en public une déclaration du chef de l’Etat vietnamien qui avait laissé entendre que les évêques étaient satisfaits de la présence de certains de leurs prêtres en prison. Cette franchise lui coûta sans doute une nomination à l’archevêché de Hanoi, nomination voulue et proposée par le Saint-Siège, mais refusée plusieurs fois par le gouvernement vietnamien, qui exerçait là son droit de veto sur les nominations épiscopales.
(eda/jm)