Eglises d'Asie – Corée du sud
Députés à l’Assemblée nationale, des parlementaires catholiques s’engagent à défendre la vie
Publié le 11/07/2016
… suscité une initiative inédite en faveur de « la défense de la vie ».
Le 4 juillet dernier, l’homme politique et élu à l’Assemblée nationale Immanuel Lee Seok-hyun a en effet annoncé la création d’un « Forum pour le respect de la vie ». Dans un Parlement unicaméral qui compte 300 députés, ce forum réunit trente-trois élus, tous catholiques, qui s’engagent « à promouvoir et défendre une culture respectant la vie dans la société [sud-coréenne] », a déclaré Lee Seok-hyun, qui co-présidera ce forum non partisan. Elu du Minjoo Party, Lee Seok-hyun appartient à l’opposition, son parti réunissant 123 élus, face aux 122 élus du Saenuri Party, la formation de la présidente Park qui comptait 156 élus dans la législature précédente, et aux 38 élus du tout-nouveau Parti du peuple, issu d’une scission avec le Minjoo Party.
A dix-huit mois des prochaines élections présidentielles et alors que le pays connaît actuellement une recomposition du paysage politique avec la confirmation d’une montée en puissance de l’opposition, la création d’un tel forum n’est pas un geste neutre. Le cardinal Andrew Yeom Soo-jung, archevêque de Séoul, se défend de toute volonté de l’Eglise catholique de s’ingérer dans le jeu politique ; toutefois, après les élections législatives du 13 avril, il avait présidé une messe à laquelle étaient conviés les élus catholiques de la nouvelle Assemblée nationale. A cette occasion, il n’a pas hésité à leur déclarer : « J’espère que vous, élus catholiques, réviserez les lois qui vont à l’encontre des principes de [défense de la vie]. »
Lors du lancement officiel du forum, le cardinal était de nouveau présent, entouré de Mgr Chung Soon-taek, évêque auxiliaire de Séoul, et du P. Lee Dong-ik, secrétaire du Comité pour la bioéthique de la Conférence épiscopale.
Les membres du forum n’ont pas encore précisé comment ils souhaitaient peser sur les débats et les votes à l’Assemblée nationale. Ils ont seulement rappelé que la Constitution de la République de Corée garantissait le caractère inviolable de la vie humaine ; ils ont aussi souligné que l’action gouvernementale devrait s’attacher à protéger la vie humaine sous toutes ses formes, y compris la vie des enfants à naître. Le forum, ont souligné ses fondateurs, n’a pas vocation à n’accueillir que des élus catholiques, il est ouvert à tous les députés, quelle que soit leur appartenance religieuse, et vise à obtenir la révision d’un certain nombre de lois. Des rapports sur l’importance du respect de la vie seront publiés et le forum visera aussi à ce que les manuels scolaires des élèves sud-coréens comportent « une éducation à la vie ».
Dans un pays de 50 millions d’habitants où les catholiques représentent un peu plus de 10 % des habitants et où, de longue date, les chrétiens de manière générale, les catholiques en particulier, sont surreprésentés parmi les élus et les responsables politiques, la création du forum ne surprend pas. Elle marque néanmoins, notent les observateurs, une volonté nette de l’Eglise de peser sur les enjeux politiques actuels. Si l’Eglise catholique en Corée est connue pour son engagement ces dernières décennies dans les grandes luttes qui ont mené à une très réelle démocratisation politique et sociale, elle s’est également montrée très active dans le domaine de la défense de la vie. Sa dénonciation notamment de l’importance du recours à l’avortement dans le pays a rencontré ces dernières années le souci des autorités gouvernementales de relancer la natalité, la démographie très déprimée de la Corée du Sud menaçant aujourd’hui les acquis d’un développement économique chèrement acquis.
Au-delà de l’éventuelle refonte de la Loi sur la santé de la mère et de l’enfant, loi de 1972 sur laquelle est de facto fondée la légalisation de l’avortement en Corée, l’épiscopat catholique est très attentif aux dérives possibles d’une recherche médicale de pointe dont le gouvernement ne cache pas vouloir faire un pilier du secteur des biotechnologies. Au début de ce mois de juillet, le Comité pour la vie de l’archidiocèse de Séoul a ainsi dit son complet désaccord avec une récente décision du Comité national de bioéthique autorisant les recherches sur les embryons humains surnuméraires, ces embryons congelés à la suite d’une PMA (procréation médicalement assistée) qui ne font plus l’objet d’un projet parental. « Il n’est pas juste de mener des recherches sur des maladies incurables en détruisant des vies humaines. Si nous ne disons pas notre ferme opposition à la destruction d’embryons humains sans défense, les mots ‘respect de la vie’ ne sont que des mots vides de sens », pouvait-on lire sur le communiqué publié à cette occasion par l’archidiocèse de Séoul.
(eda/ra)