Eglises d'Asie

Mindanao: l’enlèvement de l’administrateur apostolique de Marawi par d’anciens rebelles musulmans a porté un coup au dialogue entre musulmans et chrétiens.

Publié le 18/03/2010




Le dialogue très prometteur entre évêques catholiques et oulémas musulmans de l’île de Mindanao, commencé il y a quelques mois à la suite de l’accord signé entre rebelles musulmans du MNLF (Mouvement moro de libération nationale) et le gouvernement, a subi un coup d’arrêt après l’enlèvement, le 26 octobre 1997, de Mgr Desmond Hartford, administrateur apostolique de Marawi, par des membres du MNLF.

La quatrième réunion du Forum de dialogue tripartite, qui réunit évêques catholiques, oulémas musulmans et représentants des Eglises protestantes, a bien eu lieu comme prévu à Zamboanga, le 8 novembre, mais tous les oulémas musulmans étaient absents. Shariff Mohsin Julabbi, représentant de l’assemblée des oulémas, est venu expliquer aux onze évêques catholiques et protestants présents que le gouverneur de Lanao Del Sur, Mahid Mutilan, président des oulémas, estimait que ceuxci “avaient perdu la face” à la suite de cet enlèvement, ce qui expliquait leur absence. Le prélat catholique avait été libéré par ses ravisseurs, le 8 novembre, quelques heures avant la réunion prévue, mais il semble que les négociations qui avaient été commencées par Mahid Mutilan pour faire libérer Mgr Hartford, aient été finalement terminées par son rival politique, le gouverneur de Lanao Del Norte.

Les ravisseurs du prélat irlandais voulaient forcer la main du gouvernement philippin qui n avait pas encore payé les sommes prévues par les accords de 1996 pour la réinsertion sociale des anciens combattants du MNLF. On ne sait pas si ces sommes ont été finalement versées pour obtenir la libération de Mgr Hartford.

Malgré ce coup d’arrêt, les participants de la réunion de Zambounfa n’ont pas perdu l’espoir de remettre la machine de dialogue en marche. Une autre réunion est prévue pour le 9 février 1998, à laquelle chacun espère que les oulémas participeront. Elle sera suivie d’un séminaire de trois jours sur les méthodes de résolution des conflits.

L’un des signes d’espoir retenu par les participants a été l’étroite collaboration entre Mgr Fernando Capalla, archevêque de Dav loi et le président des ‘,’.H6 as, Mabid Mutile, pour négocier la libération de Mgr Desmond Hartford. Par ailleurs, le P. Sebastiano d’Ambra, secrétaire de la commission épiscopale philippine pour le dialogue interreligieux, qui bénéficie d’une expérience considérable dans le dialogue avec les musulmans, a estimé que rien n’était perdu: “On ne peut pas forcer le dialogue, mais le fait que le groupe ait décidé d’aller de l’avant est le signe que le travail pour la pair pourra avancer”. De son côté, Mgr Fernando Capalla avait affirmé quelques jours auparavant: In ni a pas de raison que les oulémas se sentent embarrassés. Cet enlèvement n’est pas de leur faute, tout comme les évêques ne sont pas responsables de tous les cames commis par des catholiques. Tout au contraire, ce genre d’incident renforce le besoin de dialogue”

Quant à Mgr Desmond Hartford, il a déclaré après sa libération que le gouvernement qui n’avait pas tenu ses promesses portait une part de responsabilité dans son enlèvement. Il a dit aussi être très affecté par la trahison dont il estime avoir été victime de la part d’hommes à qui il accordait sa confiance. Il a qualifié leur conduite de “contraire aux lois de l’islam”. Le prélat était très engagé, depuis plusieurs années, dans le dialogue entre chrétiens et musulmans.

Au cours de la réunion du 8 novembre 1997, à Zamboanga, Mgr Carmelo Morelos, archevêque de Zamboanga, a annoncé que le président Fidel Ramos avait approuvé un budget de plus de 100 000 dollars américains pour les réunions tripartites entre évêques catholiques, oulémas musulmans et représentants des Eglises protestantes.

Plusieurs prêtres catholiques de Mindanao craignent que les enlèvements de dirigeants religieux ne reprennent à l’approche des élections nationales qui auront lieu en 1998. Ils ont recommencé à prendre des précautions et des mesures de sécurité qu’ils ne jugeaient plus utiles depuis deux ans.