Eglises d'Asie

Après 39 ans d’exil, une figure du bouddhisme rentre au Vietnam pour faire la promotion de son mouvement

Publié le 18/03/2010




Le 12 janvier dernier, le moine Thich Nhat Hanh, figure internationale du bouddhisme, est rentré au Vietnam pour une visite qui doit durer trois mois. Après un exil de 39 ans, c’est la première fois que le moine bouddhiste remet le pied dans son pays. A la tête d’une délégation de quelque 200 adeptes, principalement français et américains, le bonze est arrivé à Hanoi et s’est rendu à la pagode Bo De, de la capitale, où il loge. Selon le site d’information officiel VietnamNet, Thich Nhat Hanh, qui a plus de 70 ans, doit rencontrer des membres de l’Eglise bouddhique du Vietnam, donner des conférences publiques et enseigner dans différentes pagodes pendant son séjour. Il est aussi prévu qu’il rencontrera des responsables de l’administration des Affaires religieuses.

A son départ de Paris, Thich Nhat Hanh a estimé que son retour au Vietnam témoignait d’un “effort d’ouverture de la part du gouvernement” vietnamien. Il y a deux ans en effet, il avait déposé une demande de visa auprès des autorités vietnamiennes et sa demande avait été rejetée. Aujourd’hui, a-t-il déclaré avant de s’envoler pour le Vietnam, “je vais là-bas pour comprendre et pratiquer l’Ecoute profonde. Le temps des peurs, des suspicions, des discriminations doit passer”. “L’Ecoute profonde” est un des préceptes-clés de l’enseignement développé par Thich Nhat Hanh.

Avant son départ du Vietnam, Thich Nhat Hanh avait été un temps membre de l’Eglise bouddhiste unifiée du Vietnam, du nom de cette branche du bouddhisme réprimée par le gouvernement vietnamien, depuis 1981, pour avoir refusé de se soumettre à l’autorité du Parti communiste (1). Ayant rompu avec son monastère, dans le contexte d’un Vietnam ravagé par la guerre, il avait été un adepte de “la troisième voie non violente, militant pour un “bouddhisme engagé Contraint à l’exil en 1967, s’étant fait des ennemis au Sud comme au Nord, il avait obtenu asile en France, où il a enseigné à l’université de la Sorbonne. En 1973, il présidait la délégation bouddhiste, lors des négociations devant aboutir aux accords de paix de Paris. Ayant fondé son propre mouvement bouddhique, il s’est installé en 1982 dans le sud-ouest de la France, où sa communauté, le Village des Pruniers, a rencontré un certain succès. Une des particularités de la communauté est d’accepter le mariage entre bonzes et nonnes. Auteur de nombreux ouvrages, publiés aux Etats-Unis, en Europe et jusqu’en Chine populaire, le moine a su attirer à son mouvement plusieurs milliers de fidèles.

Pour son retour au Vietnam, Thich Nhat Hanh a déclaré qu’il espérait “dissiper les doutes et notamment rassurer les autorités quant à son mouvement, pour aider à établir des centres de pratique bouddhique au Vietnam. “Le Vietnam que j’ai quitté il y a près de quarante ans n’est plus là a-t-il dit. A France-Presse, la nonne Chân Không, fidèle assistante du moine, qui l’accompagne depuis 1960, a tenu à clarifier les choses : “Nous avons l’ambition d’apporter la paix dans les cours, pas l’ambition de prendre le pouvoir.”

Selon les observateurs, le fait que Hanoi a accordé un visa à Thich Nhat Hanh est à mettre en relation avec le fait que les Etats-Unis doivent prochainement décider s’ils imposent ou non des sanctions au Vietnam pour les restrictions imposées par Hanoi à la liberté religieuse. En septembre dernier, le Vietnam a été inscrit par les Etats-Unis sur leur liste des “pays particulièrement préoccupants” en matière de liberté religieuse (2) et le Congrès doit décider s’il y a lieu ou non de voter des sanctions. Par ailleurs, le Parlement européen a récemment voté un texte exprimant son inquiétude quant au non-respect de la liberté religieuse au Vietnam. Dans un tel contexte, Hanoi a tout intérêt à montrer des signes d’ouverture dans ce domaine.